Mars Red Sky

Interview date

07 Mai 2014

Interviewer

dominique

I N T E R V I E W

Interview Matgaz, Jimmy Kinast & Julien Pras (face à face)


22h30, Jimmy me retrouve pendant le concert de Détroit. Le temps de me glisser que Bertrand Cantat est vraiment une bête de scène et Julien nous rejoint. On sort à l’extérieur de la salle pour l’interview. Une clope et Matgaz nous rejoint. On peut commencer.

Salut. Avant toute chose, merci pour l’invitation au concert et pour le temps que vous consacrez aux lecteurs de notre site. Vous sortez de scène. Vous êtes satisfaits du concert et de l’ambiance ?

Julien : Oui, satisfaits. Le son sur scène était très agréable. C’était sympa, le public a bien répondu.

Jimmy : On avait joué deux fois à Lausanne dans le passé. Une fois au Bleu Lézard et l’autre au For Noise Festival, il y a deux ans, juste après la sortie du premier album.

Première partie de Détroit et Bertrand Cantat, le lien entre vous c'est quoi, Bordeaux ?

Jimmy : Non, c’est beaucoup plus simple. C’est juste l'histoire de deux gars qui ne se connaissent pas et qui se rencontrent dans un train qui est à l’arrêt. D’un côté, Bruno Green qui est le clavier de Détroit et qui a enregistré leur album sur Québec. De l’autre, un mec de Bordeaux qui nous connaît. Green lui dit qu’il écoute pas mal de stoner et celui de Bordeaux le branche sur Mars Red Sky. Bruno, que je connais, prend contact avec moi après l’enregistrement du disque de Détroit en disant qu’ils recherchent de groupes pour les premières parties. Et comme Bertrand Cantat connaît un peu Julien et aime bien ce qu’il a fait en solo et avec Calc, nos agents respectifs ont pris contact et ont identifié cinq ou six dates. Mais c’est vraiment Détroit qui a imposé notre présence sur scène. Comme le faisait déjà Noir Désir à l’époque, ils ont envie d’avoir des groupes qu’ils aiment bien avec eux.

C’est intéressant, car musicalement on ne voit pas très bien le rapport.

Jimmy : C’est certain. Du coup, ce n’est pas gagné d'avance avec un public qui vient essentiellement pour voir Détroit et Cantat. Mais ici et ce soir le public a été assez réceptif, c’est cool.

Le nouvel album est sorti le 28 avril. Êtes-vous contents de ses débuts ?

Matgaz : On ne sait pas encore. On arrive à savoir que cela débute bien sur ce qui se vend en précommande, mais ce qui sort en magasin à travers notre label, on ne sait pas encore.

Comment jugez-vous la musique sous le format digital ainsi que l'émergence des formats électroniques comme iTunes ou YouTube ?

Jimmy : YouTube, tu n’as pas le choix. Si tu es un petit groupe, tu dois avoir des vidéos sur YouTube.

Matgaz : Maintenant pour ce qui est du format digital, il faut vivre avec et cela ne nous dérange pas. Le téléchargement illégal, ça existe. Les gens font ce qu’ils veulent, c’est leur conscience qui fait la différence. Le public metal est heureusement très respectueux. Ce sont des types qui vont aux concerts, qui achètent des T-shirts et des disques. Après tout, le téléchargement sert aussi à découvrir des trucs. Après, souvent les mecs achètent l’album s’ils ont aimé ce qu’ils ont écouté. Dépendant de comme on le voit, cela peut paraître comme une perte financière ou alors comme un investissement à long terme.

Le nouvel album m'a paru plus musical, plus rock et plus groove. Quelles sont les différences par rapport au premier album, notamment dans le processus de création ?

Julien : C’est Matgaz. La prod aussi est différente, mais le jeu de Matgaz est un peu plus technique et musclé. Du coup, c’est plus musical. On a pu répéter et travailler ensemble et donc créer des automatismes. La création cela reste principalement mon rôle. J’écris les trames mélodiques, on rajoute les paroles après. Tout ce qui est accords, on le fait en commun, même si en principe j’ai le dernier mot.

Jimmy : Le premier album a été fait très vite avec beaucoup d’influence de Julien. Pour le second, on a plus travaillé. On a composé les détails ensemble. On se connaît mieux. Et comme le support musical est plus solide, Julien a pu venir avec des morceaux plus complexes et denses.

Les chansons sont en anglais. C'est un acte naturel ?

Julien : C’est plus naturel pour moi. J’ai habité aux USA quand j’étais petit et c’est là-bas que j’ai découvert le rock et la guitare. C’est plus normal pour notre musique aussi.

Pourtant du stoner en français cela pourrait être intéressant, non ?

Jimmy : Notre différence, c’est la façon dont Julien impose sa voix, légère, planante et fragile sur le son lourd du groupe. Donc oui, en français cela serait possible. Même si pour notre genre de musique, je ne crois pas que cela soit fréquent. Il y a aussi une forme de pudeur de Julien. Le sens des mots en français a tendance à te ramener sur terre, trop près de la réalité.

Matgaz : Pourtant, c'est vrai que lors de notre séjour au Brésil on a entendu des groupes qui faisaient ce genre de musique en portugais. Et franchement cela donnait bien.

Pourquoi avoir choisi l’Amérique Latine pour produire cet album ?

Matgaz : C’est un accident. On devait enregistrer aux Etats-Unis suite à notre tournée. Et on a eu un problème d’immigration aux USA et on s’est retrouvé bloqué à Rio. On avait huit jours à perdre au Brésil et on en a profité, avec l’aide de Felipe Toscano le type qui avait organisé notre tournée au Brésil, pour trouver un studio. On pensait faire une pré-prod, et au fur et à mesure, malgré une méthode d’enregistrement que nous ne connaissions pas, on a produit toute la musique. Il ne restait plus que quelques textes à coller dessus.

La signature chez Listenable Records, c'est normal selon vous? Le label français n’est pourtant pas très porté sur le stoner doom.

Jimmy : C’est vrai, mais c'est une branche qu'ils développent. En fait, c’est un effet collatéral de l’incident avec l’immigration américaine. On devait signer avec le label américain Prosthetic Records et comme on n’a jamais pu entrer aux USA, on n’a jamais pu les voir. On a été contacté par Listenable qui finalement nous a proposé des conditions largement aussi intéressantes.

Matgaz : En plus, signer sur un label français a pesé sur la balance. C’est bien aussi d’être un peu à part sur leur catalogue. Du coup, à nos concerts on a plein d’auditeurs différents, plus d'amateurs de metal. Ce qui colle assez bien avec notre style qui s’appuie sur une batterie plus lourde.

Le 20 juin vous serez au Hellfest, qu’est-ce que cela signifie pour vous ?

Matgaz : C’est la fête de la musique, non ?

Jimmy : C’est génial. On fait l’entrée à 10h30. On restera deux ou trois jours et on va en profiter pour aller découvrir d’autres choses. Mat m’a fait récemment découvrir Behemoth et je vais profiter pour aller les voir sur scène.

Lors d’une interview avec Boris le leader des Monkey3, il m'a dit ne pas être favorable au compartimentage de la musique. Il pense que l’on sous-estime le public et son envie de diversité. Qu’en pensez-vous ?

Jimmy : Je ne sais pas. On est peut-être moins cloisonné que d’autres. On a osé jouer sur d’autres scènes, dans des festivals plus ouverts, tout public. Cela nous a ouvert l’esprit et peut-être que cela nous a permis de faire tomber les barrières mises au public plus facilement, de l’intérieur. Je donnerais le conseil à tous les groupes de se mélanger avec les autres. Cela ne peut être que positif.

Julien : Moi, j’aime la musique. Que ce soit en solo avec MRS ou avec Calc, la forme est différente mais le fond reste le même : c’est l’amour de la musique qui me pousse et qui compte.

J'ai vu en émission intéressante sur France 4 intitulée « La nouvelle scène française, en mode shuffle », proposée par Nicolas Prat du Mouv'. On y voit que les scènes françaises électro, rap, folk, rock-pop sont vivantes. Mais quid de la scène metal. Existe-t-elle?

Matgaz : Oui, il y a une vraie scène metal. La scène Black se porte très bien. La scène Noise roule pas mal aussi, avec beaucoup de petits groupes. D’ailleurs sur scène ce soir avec Détroit, il y a le bassiste du groupe Bordelais Sleepers. Et puis, il y a les grands groupes comme Gojira

Julien Pras, le Prodige selon les Inrockuptibles. Est-ce difficile de jouer avec l’être élu?

Jimmy : ça va le faire chier, mais je connais Julien depuis très longtemps et j’ai encore un énorme respect pour son talent. Sur ce, il ne faut pas toujours croire ce que les Inrocks disent.

Julien : Je sais que les Inrockuptibles ont toujours soutenu Calc ainsi que mon travail solo. Mais cela reste toujours flatteur de retrouver son nom en haut d’un article.


Venez donc discuter de cette interview, sur notre forum !