Groupe:

Blind Guardian + Orphaned Land

Date:

14 Avril 2015

Lieu:

Paris

Chroniqueur:

Blaster Of Muppets

Quand les Blind Guardian ont la courtoisie de nous prévenir qu'ils vont venir nous voir, on fait une croix dans le calendrier et on y va. Déjà, parce que leurs visites ne sont pas si fréquentes. La dernière fois, c'était en septembre 2010... on sait que si on les loupe, il faudra être patient. Les bardes allemands ne sont pas du genre à tourner quand ils n'ont pas d'album et vu que leurs sorties sont espacées de quatre ans ou quatre ans et demi minimum, il vaut mieux ne pas manquer un concert de ces messieurs quand l'occasion se présente. En ce 14 avril 2015, le Bataclan est donc très correctement rempli (à défaut d'être plein), preuve que le groupe jouit toujours d'une certaine popularité. Rien d'étonnant, Blind Guardian reste l'un des groupes les plus classes du style musical qu'il représente... même si les albums les plus récents divisent un peu plus les fans. Et en plus, sur cette tournée, les Allemands se sont offerts une première partie de choix avec Orphaned Land. Soirée prometteuse, s'il en est...

Vers 19h15, les Israéliens montent sur scène et entonnent la chanson titre de leur dernier album en date, All Is One. Sur ce premier morceau, le mix me semble assez confus, ce qui est souvent le cas en début de soirée, mais je suis dans la fosse aux photographes et on me confirmera plus tard que dans le centre de la salle, c'était un peu plus harmonieux. La chanson est excellente et constitue une entrée en matière idéale. On regrettera que les aspects symphoniques ou traditionnels de la musique d'Orphaned Land ne soient que moyennement audibles et samplés. Oui, je chipote car on pouvait s'y attendre : les gars n'allaient quand même pas débarquer avec un orchestre et une chorale...

Orphaned Land continue son set avec un deuxième extrait de son dernier disque : The Simple Man. Bonne rythmique heavy et public visiblement réceptif. Pourtant, je trouve qu'il manque quelque chose... cela ne vient pas vraiment du groupe qui fait bien son boulot (surtout le batteur, très à l'aise, impressionnant techniquement et ultra expressif)... je pense juste que la chanson ne me passionne pas plus que cela. Même constat avec Barakah, extrait de The Neverending Way Of ORwarriOR. En revanche, le set devient nettement plus passionnant (à mon goût) quand des compos issues de l'excellent Mabool s'insinuent dans la setlist. Comment résister à l'excellente The Kiss Of Babylon ? Sur ce morceau, Kobi, chanteur qui ne manque pas de communiquer avec son public, en profitera pour faire participer l'assistance. Le long passage en "La lala la lalalalalalala" semble avoir été créé dans ce but... et ça marche très bien. A partir de ce moment-là, le show ne perdra plus en intensité.

Parmi les moments forts du set des Israéliens, on retiendra la toujours aussi entraînante Sapari au rythme envoûtant sur laquelle le Bataclan tape des mains comme un seul homme. C'est également sur cette chanson que Kobi invite sur scène la danseuse libanaise Johanna Fakhri, habituée des concerts du groupe depuis quelques années maintenant. C'est évidemment le moment idéal que choisit Kobi pour nous adresser son message de paix et d'union entre les peuples (et à plus forte raison, entre Israël et les pays arabes... comme le Liban). La musique adoucirait-elle vraiment les moeurs alors ? Ce ne serait pas qu'une expression ? Kobi semble y croire... plus qu'il ne croit à la politique en tout cas ; un joli et sincère "Fuck the politicians" (dit avec le sourire) est là pour en attester. 

Le concert s'achève avec In Thy Never Ending Way suivi de l'habituelle et imparable Norra El Norra (un beau moment sur lequel une bonne partie de la fosse du Bataclan peut s'adonner à son envie de sauter sur place) enchaînée au final fédérateur d'Ornaments Of Gold. La prestation fut de qualité, tout comme la plupart de la musique jouée ce soir. Orphaned Land m'avait cependant fait plus d'effet lors de leur passage à Vauréal fin 2011. Certes, à l'époque, le groupe occupait la tête d'affiche, je me souviens d'une ambiance de folie... et il y avait aussi un certain Yossi Sassi à la guitare... qui manque un peu au combo aujourd'hui. Les deux guitaristes actuels du groupe ne déméritent pas et rendent justice à la musique qu'ils jouent mais Mr. Sassi dégageait plus de plaisir et de chaleur sur scène que ces messieurs, certes compétents mais bien discrets. 

Setlist Orphaned Land :

01. All Is One
02. The Simple Man
03. Barakah
04. The Kiss Of Babylon (The Sins)
05. Birth Of The Three (The Unification)
06. Olat Ha'tamid
07. Sapari
08. In Thy Never Ending Way
09. Norra El Norra (Entering The Ark)
10. Ornaments Of Gold

 

Un peu moins d'une demi-heure après le départ d'Orphaned Land, c'est au tour de Blind Guardian d'investir la scène du Bataclan. Avant que le rideau ne tombe, on retient un peu notre souffle car, pendant le set de la première partie, on avait bien remarqué que l'espace réservé aux musiciens était relativement confiné et qu'ils étaient tous alignés sur le devant de la scène. Quel décor fantastique nous ont donc préparé les bardes d'outre-Rhin ? Bah pas grand-chose en fait... si ce n'est une sorte de structure en acier sur laquelle sont positionnés les spots qui vont fournir un éclairage un peu plus recherché qu'à l'accoutumée. Soit, on s'en fiche un peu, on n'est pas venu pour commenter la déco ! Passons donc à la musique ! 

Le show début avec The Ninth Wave, chanson qui ouvre le dernier opus du gardien aveugle. Avant toute chose, une petite remarque personnelle qui vous permettra de mieux comprendre mon avis. Contrairement à Florent qui a chroniqué Beyond The Red Mirror, je n'adore pas l'album en question. Blind Guardian reste un groupe pour lequel j'ai un immense respect, j'admire leur carrière et une bonne partie de leur discographie... mais là où mon estimé collègue a entendu quelque chose qui relevait du 17/20, je n'ai ressenti que du 13/20 à tout casser. Oui, cette révélation n'est pas des plus cruciales mais ça pose le décor... il fallait que cela soit dit. Je ne m'étends pas, je ne vais pas refaire la chronique de l'album. Mais voilà, le show commence avec The Ninth Wave... un titre intéressant et ambitieux s'il en est. Sauf que je trouve qu'il a du mal à faire décoller l'opus dont il est extrait et c'est tout naturellement que je ressens la même chose pour ce qui est du début de ce concert. C'est sympa, mais ça ne prend pas complètement. Et en plus, manque de bol, la compo dure dans les neuf minutes... Je parle pour moi, vous l'avez compris... J'observe le public autour de moi, beaucoup ont l'air conquis. En attendant patiemment la deuxième chanson, je prends des photos et constate quelques petits changements par rapport au show de l'Elysée Montmartre en 2010. Un nouveau bassiste déjà, Barend Courbois. Discret mais efficace et en plus, le monsieur apporte sa contribution en participant aux choeurs (tout comme le claviériste Michael Schüren). L'amélioration notable par rapport au dernier passage des bardes dans la capitale, c'est le son. Franchement médiocre (et je suis gentil) la dernière fois, il est ce soir bien plus équilibré... Voilà qui est rassurant. Comme j'aime bien chipoter, je dirais qu'il est même très bon mais que la batterie est encore un chouilla trop en avant par rapport aux guitares. Rien de grave, les conditions sont bel et bien réunies pour que l'on savoure la musique sans gêne. 

Un peu moins de dix minutes après ce démarrage en demi-teinte (ne vous énervez pas, ça ne sert à rien, j'ai le droit de ne pas adorer The Ninth Wave) arrive un bon vieux classique speedé repondant au "doux" nom de Banish From Sanctuary. Aaaahhhh... ça fait du bien !! Juste avant, Hansi Kürsch, toujours aussi sympathique aura eu le temps de balancer un petit "Salut les amis !!!" suivi d'un magnifique "Bordel de merde !!!". Voilà, ça fait toujours son petit effet. Le public est chaud. Très chaud. Et ce n'est certainement pas l'excellente Nightfall qui va faire baisser la température, bien au contraire. Les fans chantent à s'en décrocher les cordes... la communion entre le groupe et l'assistance est totale. Et malgré quelques titres un peu moins forts (avis forcément subjectif de votre serviteur) comme Fly, Tanelorn ou Prophecies (qui ne s'en sort pas si mal, pour une compo du dernier album, je le reconnais), cette communion persistera sans jamais faillir. Il faut dire que les musiciens sont bons. Pas des bêtes de scène, assez statiques même... mais vraiment bons et sympathiques. Le batteur Fredrik Emhke est puissant, technique et très précis... il se donne avec énergie. Les autres sont beaucoup plus tranquilles, personne ne risque de se froisser un muscle ou de se fouler une cheville mais le boulot est fait avec conviction et plaisir. Et il y a les interventions souvent amusantes de Mr. Kürsch entre les chansons : "Are you ready for a rock'n'roll show ?" demande-t-il à la foule en début de soirée. Vous imaginez la clameur du genre "wooooaaaaaahhhhyeeeahhhhhh" qui en langage plus civilisé signifie "évidemment que nous sommes prêts"... avant qu'Hansi calme tout le monde en répondant "You are aware that we are not a rock'n'roll band, right?" (traduction pour ceux qui ont séché les cours d'anglais : "vous savez que nous ne sommes pas un groupe de rock'n'roll, n'est-ce pas ?". Comme si cela ne suffisait pas, le bonhomme annonce quelques chansons plus tard que le concert (comme beaucoup d'autres sur cette tournée) est enregistré pour un futur album live... ce qui ne calme personne. 

A part ça, oui, ça chante beaucoup... Un concert de Blind Guardian, c'est ça. On a parfois l'impression d'assister à une sorte de karaoké géant. Mais ça ne fait pas que chanter... ça pogote (gentiment) sur les titres les plus rapides du répertoire comme Tanelorn ou, plus tard, un certain Welcome To Dying. C'est tout ? Non, ça re-chante ! Sur le final de la géniale Last Candle, par exemple. "Somebody's out there... somebody's out there..." est répétée inlassablement pendant plusieurs minutes face à un groupe amusé et (presque) étonné. Je dis "presque" car ce final-là est bien connu du groupe comme des fans (il suffit de regarder le DVD Imaginations Through The Looking Glass). C'est exactement la même chose avec Valhalla. Excellent, mais on s'y attend. On sait qu'on va chanter la fin pendant trois plombes... tout comme l'on sait qu'au moment du rappel, on épaulera le chanteur sur The Bard's Song... C'est écrit. Et ça fait plaisir même si on ne peut pas véritablement parler de surprise.

Histoire d'apporter un peu de variété à ce show bien rodé, un petit intermède acoustique avec Miracle Machine et A Past And Future Secret permet un changement d'atmosphère. C'est très bien... et comme le dit le frontman, ça permet aux roadies d'avoir quelque chose à faire sur scène plutôt que de passer leur temps à feuilleter des magazines cochons ou s'ennuyer en coulisses. A la fin de chaque chanson, le public applaudit, hurle ou scande "Guardian ! Guardian ! Guardian !", ce qui permet à Hansi de répondre "We take that as a compliment!". Après un Imaginations From The Other Side d'anthologie, le groupe quitte la scène pour y revenir quelques minutes plus tard armé d'un excellent Into The Storm ! Encore un très bon moment. Le nouvel album n'est pas oublié et le single Twilight Of The Gods affublé d'un gros son passe assez bien l'épreuve de la scène... mais pas aussi bien que la mythique Valhalla qui vient conclure ce premier rappel. Les Allemands sont généreux ce soir, on a déjà eu quinze morceaux pour plus d'une heure quarante de concert et ce n'est pas fini : les voilà qui reviennent avec Wheel Of Time, The Bard's Song et l'irremplaçable Mirror Mirror pour nous achever ! 

Verdict : Blind Guardian en concert, c'est toujours bien. Le combo a beau être l'un des meilleurs du genre en studio, je trouve qu'il leur manque toujours un petit quelque chose pour être un grand groupe de scène. Les musiciens sont un peu trop pépères... mais le charisme de Kürsch, la grande qualité musicale et l'ambiance de folie avec ce public joyeux et très participatif font que l'on est obligé de passer un bon moment. A titre personnel, je doute que cette soirée figurera parmi mon top de l'année 2015 mais je n'aurais pas voulu louper cela. C'était cool, pêchu et généreux. Merci messieurs ! 

Setlist de Blind Guardian :

01. The Ninth Wave
02. Banish From Sanctuary
03. Nightfall
04. Fly
05. Tanelorn
06. Prophecies
07. Last Candle
08. Miracle Machine
09. A Past And Future Secret
10. Bright Eyes
11. Welcome To Dying
12. Imaginations From The Other Side
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13. Into The Storm
14. Twilight Of The Gods
15. Valhalla
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16. Wheel Of Time
17. The Bard's Song (In The Forest)
18. Mirror Mirror