Après un premier passage parisien mémorable en mars 2016, voilà pour la seconde fois dans notre capitale la troupe d'Avantasia menée par son joyeux chef d'orchestre Tobias Sammet. C'est la salle de l'Olympia, assez peu habituée à donner dans le Metal (même si elle le fait de temps en temps depuis quelques années), qui accueille Sammet et ses amis cette année... et on ne saurait s'en plaindre, vu la classe de l'endroit. Le show donné par le groupe il y a trois ans fait partie des meilleurs concerts qu'il m'ait été donné de voir ces dernières années alors autant vous dire que la question de savoir si j'allais saisir l'opportunité de remettre ça ne s'est pas posée bien longtemps. Nous voilà donc en avril 2019, avec un nouvel album tout à fait honorable (même si très légèrement inférieur à Ghostlights, son prédécesseur, je trouve), un casting familier bien qu'un peu remanié et, comme c'était déjà le cas en 2016, un show énorme de trois heures à se mettre sous la dent. 

L'Olympia n'est pas comble mais franchement pas loin d'être rempli, ce qui fait plaisir à voir. Un peu après 20 heures, alors que les lumières se tamisent, on se dit que nous sommes sur le point d'assister à un démarrage énorme... sauf que non. Il y a une première partie. Je n'ai rien contre les premières parties, bien au contraire, mais là, l'enthousiasme retombe bien vite quand je découvre qu'il s'agit (encore !) d'un DJ, comme il y a trois ans, venu nous balancer une petite playlist constituée de quelques titres de power metal destinés à faire chanter le public en attendant l'arrivée de Sammet et ses sbires. Ok, cette fois-ci, il s'agit de compos plutôt sympas (on a du Powerwolf, du Helloween, du Hammerfall ou du Rhapsody...), sauf que cela ne présente toujours pas beaucoup d'intérêt (et je formule cela de façon bien neutre et polie). Bref, un type seul sur scène qui fait jaillir I Want Out de son ordinateur en levant le bras vers le ciel, il y a sans doute pire (c'est toujours possible) mais il y a surtout mille fois mieux... Alors, je prends gentiment mon mal en patience et prie pour que cela dure le moins longtemps possible... Cinq ou six chansons plus tard, ce petit set globalement bien inutile s'achève sur un titre - pas très "power" pour le coup - de Ghost, (interrompu en cours de diffusion... un clin d'oeil au passage TV français du groupe il n'y a pas si longtemps ?) et on nous annonce une pause de vingt minutes avant l'arrivée d'Avantasia. Frustrant. Ce n'est clairement pas un départ sur les chapeaux de roue mais, bien heureusement, cela va vite changer. 

A 21 heures, le moment est enfin venu de découvrir la scène de cette tournée jusque-là cachée par un grand rideau sur lequel figure le logo du groupe. Après l'introduction sur bande, les premiers accords de Ghost In The Moon retentissent, le rideau tombe et s'offre à nous un beau décor (avec faux arbres, escaliers, écran sur lequel on aperçoit l'artwork du nouvel album). Le son est très bon, le visuel est classe, le public est plus qu'enthousiaste... et le maître de cérénomie Tobias Sammet est en voix (et le restera tout au long de la soirée). Belle entrée en matière. On retrouve les mêmes musiciens que sur la tournée précédente (le fidèle Felix d'Edguy à la batterie, les guitaristes Sascha Paeth et Oliver Hartmann, le claviériste Miro, ainsi que le bassiste Andre Neygenfind) mais il y a du changement parmi les choristes. Déjà, il n'y en plus deux mais trois. Et madame Amanda Somerville n'est plus de la partie (dommage) mais elle est remplacée par Adrienne Cowan et Ina Morgan (dont je vais vous parler un peu plus bas) qui donnent la réplique à Herbie Langhans (choriste de luxe, vu les capacités du monsieur, souvenez-vous de sa prestation il y a trois ans ou sur les premiers albums de Sinbreed). 

Bon, tout cela commence bien... mais maintenant, on attend les invités. Qui va venir tenir compagnie à Tobias en premier ? Quels morceaux vont être joués ? Répondons déjà à la dernière question. Pour ce qui est des titres, il fallait mieux aimer le dernier album... La soirée a commencé avec pas moins de quatre nouvelles chansons d'affilée (Ghost In The Moon, Starlight, Book Of Shallows et l'épique The Raven Child) ! Du coup, vous avez vu les titres et si vous vous y connaissez un peu, vous avez compris que le premier chanteur à venir rejoindre Sammet n'était autre que Ronnie Atkins. Et c'est une très bonne nouvelle... déjà parce que j'aime beaucoup ce chanteur mais en plus parce qu'il est plus audible et semble plus en forme que lors de la tournée précédente. Là, Ronnie envoie... et ça fait plaisir ! Sur Book Of Shallows, Atkins sera rejoint par Adrienne Cowan qui se chargera de faire dans la vocalise bien belliqueuse (en reprenant les parties chantées par Mille Petrozza sur album), ce qui donnera un duo bien sympa... et sur The Raven Child, on aura le plaisir de voir débarquer Jorn Lande, à la voix toujours aussi puissante... Il restera d'ailleurs sur le morceau Lucifer (extrait de Ghostlights) avant de céder la place à Geoff Tate, qui semble également en assez bonne forme (surtout si l'on a en mémoire les performances pas fantastiques du chanteur lors de ses dernières années avec Queensrÿche) pour deux autres chansons de Moonglow : Alchemy et Invincible.

Le début du show relaté ci-dessus est globalement enthousiasmant pour un certain nombre de raisons. Tout est bien en place, les vocalistes sont convaincants, le spectacle est de qualité, l'ambiance est chaleureuse, Tobias blague, se met le public dans la poche assez aisément, prend des poses très exagérées en minaudant à l'excès pour les photographes au pied de la scène, ce qui fait d'ailleurs rire certains de ses complices... et c'est aussi ça qui est particulièrement appréciable dans un concert d'Avantasia : la bonne humeur qui se dégage, le fun que semblent prendre tous les participants. On assiste à une fête joyeuse, très pro et pourtant (en apparence) très décontractée... Les musiciens qui se produisent devant nous possèdent une complicité qui saute aux yeux et ont vraiment l'air de s'éclater. Enfin, par rapport à des concerts plus anciens du groupe, il n'y a, jusque-là, quasiment que de la nouveauté à se mettre sous la dent. Cela dit, ce dernier point est un peu à double tranchant... car ça fait quand même beaucoup de chansons du nouvel album d'un coup. Sur les dix premières compos jouées ce soir, huit proviennent de Moonglow. Certains apprécient, d'autres se disent qu'un peu plus de variété, de mélange des différentes époques n'aurait pas fait de mal...

Autre point fort : la générosité. Sammet et compagnie ont encore prévu de nous régaler avec pas moins de trois heures de concert... Et bien que cela ne soit pas très apparent pendant la première heure, le set va proposer un voyage à travers les différentes périodes de la discographie d'Avantasia. On notera juste une impasse totale sur l'album The Mystery Of Time... Quant au Metal Opera II, traditionnellement assez ignoré, il ne sera encore une fois représenté que par le refrain de The Seven Angels collé au final de Sign Of The Cross. S'il fallait trouver un bémol setlistique, on pourrait d'ailleurs évoquer un certain manque de surprise dans les titres joués (dernier album mis à part, évidemment). Toutes les anciennes compos proposées sont celles que l'on trouve habituellement dans un show d'Avantasia. On trouve donc les inévitables Reach Out For The Light, Farewell, The Scarecrow, The Story Ain't Over, Dying For An Angel, Promised Land, Lost In Space, etc. (j'arrête la liste, vous n'avez qu'à vous référer à la setlist ci-dessous). Mais bon, il ne serait pas de si bon ton de cracher abondamment dans la soupe... Déjà parce que c'est sale, ensuite parce que la plupart de ces titres sont quand même très plaisants et enfin, parce que les concerts d'Avantasia en France, il n'y en a quand même pas eu tant que ça jusqu'ici (c'est le troisième, il me semble). Il est donc peut-être un peu tôt pour jouer les blasés, non ? 

Cependant, dans l'ensemble, j'ai tout de même trouvé le show de 2016 un peu plus magique. Ca ne se joue pas à grand-chose... l'absence de Michael Kiske fait sans doute pencher la balance, je trouve que sa personnalité et (surtout) sa voix manquent à ce cru 2019... qui reste tout de même de très haute tenue. L'ambiance m'avait semblé encore plus folle également. Peut-être qu'un certain effet de surprise s'est aussi légèrement dissipé. Et si les chœurs fournis par Langhans, Cowan et Morgan habillent souvent très joliment les refrains épiques du groupe, certaines interventions en solo, notamment des deux demoiselles, sont parfois un peu limites niveau justesse ou puissance (je n'accroche notamment pas au timbre de voix de Morgan mais bon, c'est totalement subjectif)... Langhans, par contre, nous rappellera à quel point il est un chanteur compétent et puissant sur l'excellente Shelter From The Rain. 

Plutôt que de m'attarder sur quelques menus bémols, je retiens plutôt le grand professionnalisme de l'entreprise, la classe du guitariste Sascha Paeth, l'endurance de Felix Bonhke (toujours excellent), le plaisir de voir se succéder sur scène les différents vocalistes de la troupe et le fun déjà évoqué plus haut (trop d'exemples pour être tous cités... certains musiciens ou choristes exécutant des pas de danse improbables sur la reprise de Maniac, un Eric Martin toujours aussi blagueur qui fait mine de se véxer quand un autre chanteur dit qu'il l'écoutait quand il était jeune, Bob Catley et sa gestuelle de chef d'orchestre quand il chante, Geoff Tate qui se marre quand Sammet en fait des caisses pour présenter Miro aux claviers et finit juste par dire "aux claviers... le claviériste !", et j'en passe...). Bref, ce fut un énorme concert aussi spectaculaire que généreux, doté d'une belle ambiance festive et d'un public participatif qui a accueilli Tobias et ses compères avec beaucoup de chaleur... ce qui lui a valu en retour une promesse à laquelle on pouvait s'attendre mais qui fait toujours plaisir : s'il y a une autre tournée, Avantasia reviendra à Paris !  

Setlist Avantasia :

01. Ghost In The Moon 
02. Starlight 
03. Book Of Shallows
04. The Raven Child
05. Lucifer
06. Alchemy
07. Invincible
08. Reach Out For The Light
09. Moonglow
10. Maniac
11. Dying For An Angel
12. Lavender
13. The Story Ain't Over
14. The Scarecrow
15. Promised Land
16. Twisted Mind
17. Avantasia 
18. Let The Storm Descend Upon You
19. Master Of The Pendulum
20. Shelter From The Rain
21. Mystery Of A Blood Red Rose
22. Lost In Space
---------------------------------------------
23. Farewell
24. Sign Of The Cross / The Seven Angels