Groupe:

Dream Theater

Date:

26 Janvier 2020

Lieu:

Boulogne-Billancourt

Chroniqueur:

ced12

Déjà plus de trois décennies de carrière pour Dream Theater et le groupe arrive encore à créer l’événement. Trois années après un mémorable concert au Zénith de Paris où le groupe reprenait Images & Words en intégralité (avec la monumentale A Change Of Season en rappel, titre fleuve issu des mêmes séances de composition que ce Images & Words qui a placé Dream Theater comme groupe majeur), c’est l’exceptionnel Metropolis Part II : Scenes From A Memory qui est à l’honneur ce soir. On n’a pas tous les jours vingt ans, il faut dire. Habitué du Zénith de Paris (pour les concerts sur Paris bien sûr), Dream Theater pose ses flight cases à Boulogne Billancourt dans la superbe (et très classe) salle de la Seine Musicale. Située sur l’île Seguin, cette salle fut inaugurée en Avril 2017 (pour l’anecdote, c’est Bob Dylan qui fut le premier à s’y produire). Plutôt pensée pour les orchestres symphoniques, le lieu a été investi par quelques groupes de rock (Alice Cooper, ZZ Top entre autres) et Dream Theater m’y semble parfaitement à sa place tant l’endroit est élégant. Un peu en retrait de la capitale même si plutôt bien desservi, me voilà investissant ce lieu pour la première fois et l’endroit en jette. Très propre, avec de l’espace pour se poser en dehors de la salle de concert proprement dite, des bars avec du choix, des sanitaires propres et spacieux, des ouvreurs agréables ; il n’y a rien à dire, voilà une bien jolie salle de spectacle. Bon malheureusement, cela a un prix et avec des places allant de 61.90 € à 101.90 € ; Dream Theater a pris un risque mais pas d’inquiétude au final, la salle est très bien remplie avec une fosse bien compacte (et spacieuse). 

A 19h tapantes, le noir se fait dans la Seine Musicale et une vidéo d’introduction présente un robot faisant défiler les différents disques du groupe avant que les quatre musiciens (vite rejoints par James Labrie, cas qu’il me faudra bien aborder) n’investissent la scène et ne lancent un Untethered Angel doté d’un bon gros riff bien heavy. Première remarque, le son est assez fort avec une prédominance pour la guitare et le clavier et au détriment d’une basse qu’on aimerait un peu plus entendre. Mais rien de bien grave, tout cela est très propre. Si le groupe a clairement communiqué sur les vingt ans de Scenes From A Memory, il n’en délaisse pas moins son dernier album Distance Over Time avec pas moins de cinq titres qui seront proposés ce soir. Ok pour de la nostalgie mais le groupe a récolté un joli succès critique et commercial (numéro un des charts allemands, la classe non ?) avec ce Distance Over Time et n’avait pas encore présenté (en salle) ce nouveau disque. Ce premier morceau ouvre très bien les débats, John Petrucci délivre son premier solo et James Labrie ne s’en sort pas si mal au chant. A la batterie, Mike Mangini et son kit incroyable avec des cymbales situés au-dessus de lui impressionnent. Quant à John Myung, que dire ? Toujours aussi discret, toujours aussi brillant. Mais c’est surtout A Nightmare To Remember que le concert décolle véritablement. L’écran géant derrière le groupe diffuse des vidéos qui accompagneront tout le concert et sur ce titre ressorti de Black Clouds & Silver Linings, nous avons droit à la première partie instrumentale « folle » de ce show. Dans cette atmosphère sombre (on est à la limite du Dimmu Borgir sur l’intro tant c’est dark ! Enfin restons mesurés, nous sommes chez DT), les musiciens régalent un auditoire franchement conquis par ce titre. Ce n’est pas un scoop mais wow ! même si on le sait, comment ne pas être bluffé par les quatre fantastiques musiciens. Premier solo de Jordan Rudess avec son fameux ZenRiffer. Après ce tour de force, deux titres du nouvel album aux formats plus courts nous sont proposés et si Paralyzed, assez heavy, passe très bien, je reste un peu frustré par l’interprétation un peu limite de James Labrie sur le refrain de la très bonne Barstool Warrior. Rien de bien grave, le chanteur fait globalement le job mais c’est plutôt poussif sur certains passages et c’est un peu dommage. Rapide retour en arrière avec In The Presence Of Enemies Part I ressorti des cartons de Systematic Chaos et le premier acte de cette soirée s’achève au bout de cinquante minutes avec Pale Blue Dot, agréable. Le groupe a retenu le même format de show qu’il y a trois ans lors de l’interprétation intégrale d’Images & Words avec un premier acte plus varié, un entracte de vingt minutes puis le gros morceau du show.

Car ne nous y trompons pas, c’est bien ce Scenes From A Memory que le public attend et il ne va pas être déçu. Cet album est celui par lequel j’ai découvert le groupe mais c’est surtout une œuvre qui a fait un bien fou aux New-Yorkais alors mal embarqués avec leur label. Pour ma part, j’avais ensuite suivi la carrière du groupe avec un peu de distance ne m’y retrouvant pas à 100% dans une musique parfois trop technique pour le non-musicien que je suis (en dépit de quelques titres d’anthologie comme Octavarium et Count Of Tuscany). Le décompte de la séance d’hypnose nous embarque direct dans l’ambiance de ce disque fabuleux et l’heure et quart qui suit est un véritable enchantement. Je ne vais pas redescendre les titres un par un, les connaisseurs maîtrisent par cœur. Quant à ceux qui ne l’ont pas encore écouté, courez-y sans hésiter. Les moments forts se succèdent, le démarrage avec cette batterie sur Overture 1928 est une merveille. La voix de James Labrie me semble un peu plus assurée sur ce deuxième acte. La guitare de John Petrucci est à l’honneur, le clavier de Jordan Rudess lui répond à merveille. Tout cela s’enchaîne à la perfection, le temps défile à une allure folle (Einstein avait raison, le Temps est vraiment relatif !), et les Strange Déjà Vu, Fatal Tragedy passent juste génialement bien. Le groupe profite du titre de transition qu’est Through Her Eyes pour rendre hommage via la vidéo d’animation à quelques grands de la musique. Alors que l’histoire raconte le meurtre de la protagoniste, des tombes défilent à l’écran avec indiqués dessus des immenses musiciens que furent (et qui seront de toute éternité) les Cliff Burton, Bowie, Mercury, Chris Cornell (particulièrement acclamé) et d’autres. Délicate attention de la part de Dream Theater. Les quelques mots de James Labrie rappelant le contexte de cette soirée vraiment spéciale sont suivis du « grand final » de ce disque. Et là, c’est juste démentiel avec de véritables montagnes russes musicales. Un Home au riff de guitare toujours aussi jouissif, un refrain dantesque, un The Dance Of Eternity complètement fou qui renvoie à Liquid Tension Experiment  (dont on murmure un potentiel retour artistique, les relations PortnoyPetrucciRudess s’étant réchauffées) avant la doublette émotionnelle One Last Time (où James Labrie délègue le refrain « One last time » au public) suivi d’un The Spirit Carries On toujours aussi fédérateur. John Petrucci le dit lui-même, ce n’est pas le morceau le plus compliqué à jouer mais avec un public déchaîné qui reprend en chœur les paroles, c’est un immense moment de ferveur que ce titre. Sur ce titre, le guitariste tutoie l’excellence et la grâce d’un David Gilmour et ce n’est pas chez moi un mince compliment. Finally Free achève l’auditoire dans les règles de l’Art avec la reprise du refrain « One last time » (encore délégué au public !) pour un dernier frisson. Moi qui voulais éviter le track by track, je me rends compte que je n’ai pas su l'éviter mais il y a tant et tant à dire sur ce disque qui est un pur chef-d’œuvre. A écouter, ré-écouter. Que du bonheur.

 

Après cet immense moment, difficile de redescendre. Le rappel avec At Wid’s End (issu du dernier disque du groupe) peine à remobiliser les troupes (et ce malgré un solo sublime) mais Scenes From A Memory a mis la barre trop haute. Que conclure de cette soirée ? Que Dream Theater est un groupe génial, que ces musiciens sont des dingues, surdoués ? Rien là de bien nouveau. Mais banaliser l’excellence n’est-il pas le moindre de leur talent ? Ok, ça ne bouge pas beaucoup sur scène mais la musique parle d’elle-même. Même après deux heures quarante-cinq de show, j’en aurais bien repris le double. Et tant pis si James Labrie est parfois à la limite, c’était juste un immense concert. D’un groupe qui ne l’est pas moins.

 

 

 

Setlist de Dream Theater :

Act 1:
01. Untethered Angel
02. A Nightmare To Remember
03. Paralyzed
04. Barstool Warrior
05. In The Presence Of Enemies, Part I
06. Pale Blue Dot

Act 2:
07. Act I: Scene One: Regression
08. Act I: Scene Two: I. Overture 1928
09. Act I: Scene Two: II. Strange Déjà Vu
10. Act I: Scene Three: I. Through My Words
11. Act I: Scene Three: II. Fatal Tragedy
12. Act I: Scene Four: Beyond This Life
13. Act I: Scene Five: Through Her Eyes
14. Act I: Scene Six: Home
15. Act II: Scene Seven: I. The Dance Of Eternity
16. Act II: Scene Seven: II. One Last Time
17. Act II: Scene Eight: The Spirit Carries On
18. Act II: Scene Nine: Finally Free
Encore:
19. At Wid’s End

 

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