Artiste/Groupe:

Black Sabbath

CD:

Headless Cross

Date de sortie:

1989

Label:

Style:

Heavy Metal

Chroniqueur:

Blaster Of Muppets

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Comme l'a très bien dit Orion dans sa chronique de l'album The Eternal IdolTony Iommi est un modèle de persistance. Il n'a jamais cessé de composer et proposer des albums à ses fans. Après les départs de tous les autres membres fondateurs de Black Sabbath et une poignée d'albums décevants, l'un des plus célèbres guitaristes gauchers de la planète n'a pas jeté l'éponge. Il a même sorti la tête de l'eau (à moitié, du moins) avec The Eternal Idol, pas un grand disque, certes, mais un effort qui comptait tout de même quelques qualités, une poignée de chansons réussies (surtout l'excellente The Shining) et un vocaliste convaincant dans un registre proche du grand Ronnie James Dio : le fameux Tony Martin. En 1989, deux ans après ce premier essai d'une collaboration (Iommi / Martin) qui se concrétisera tout de même sur cinq albums, un deuxième vit le jour : Headless Cross. Album ne faisant évidemment pas partie des grands classiques indispensables du Sab', ne pouvant pas rivaliser avec les opus qui ont créé un style et influencé des milliers de formations, mais qu'il me semble important de réhabiliter aujourd'hui, trente ans après sa sortie, tant il regorge de bonnes choses et s'impose finalement comme un album de heavy metal plus que correct.

Sous-estimé, le Headless Cross ? Oui. C'est sûr. Mais pas tant que cela non plus... car en fait, d'un point de vue critique, il a plutôt été bien accueilli à sa sortie. D'un point de vue marketing, ce fut plus compliqué. Le travail de promotion et de distribution ne fut clairement pas à la hauteur (aux USA surtout). Iommi et ses collègues n'étaient plus soutenus par Warner Bros / Vertigo et le nouveau label (I.R.S. Records) n'a pas fait le poids. Ce qui est fait est fait, c'est ainsi... Intéressons-nous plutôt à la musique proposée car là, il y a des choses plus positives à dire. En effet, Headless Cross s'impose, à mon humble avis, comme LE disque à retenir de la période creuse traversée par Black Sabbath entre Mob Rules et Dehumanizer et probablement comme l'effort le plus enthousiasmant de l'ère Martin

Un petit mot sur le line-up de cet album car il y a quelques changements. Iommi s'est adjoint les services d'un batteur à la frappe et à la réputation solides : Cozy Powell (Rainbow, Whitesnake, Michael Schenker Group, Gary Moore...). Un nouveau bassiste, Laurence Cottle, fait un passage plus que rapide dans le groupe (Geezer Butler était censé revenir mais il est finalement parti aider son vieux copain Ozzy à promouvoir sur la route son No Rest For The Wicked), juste le temps d'enregistrer ses parties (il sera remplacé par Neil Murray pour la tournée). Pour le reste ça n'a pas bougé : l'irremplaçable Tony Iommi bien sûr, Tony Martin au chant et Geoff Nichols aux claviers.

Musicalement, Headless Cross propose des compos très mélodiques et assez épiques, d'une efficacité perdue depuis Mob Rules mais enfin retrouvée ici (ce qui ne veut pas dire que les deux albums se valent, non, je ne blasphèmerai point de la sorte, calmez-vous !). Iommi nous ressort de beaux riffs, les ambiances sombres ne manquent pas et Tony Martin confirme qu'il est un très bon chanteur, livrant une prestation encore plus puissante et habitée que sur The Eternal Idol. Les deux albums sont d'ailleurs assez proches mais je trouve Headless Cross globalement plus accrocheur et mémorable. Là où son prédécesseur commençait par un titre fort pour nettement moins impressionner par la suite, ce nouvel opus se montre plus constant.

L'intro The Gates Of Hell, d'une bonne minute, proposant des bruitages et effets sortis du clavier de Nichols, n'a pas d'autre intérêt que de poser une ambiance inquiétante et glauque... A partir de là, il reste sept morceaux (oui, Iommi ne s'est pas trop dispersé et cela s'entend, qualitativement parlant) et le premier d'entre eux n'est autre que la chanson titre armée d'un riff immédiatement mémorable et d'une rythmique carrée portée par la frappe puissante de Cozy Powell. Le tempo et la ligne de basse sont proches de ce que l'on trouvait sur l'inoubliable compo Heaven And Hell tout comme le chant théâtral et maîtrisé de Martin peut faire penser à celui de Dio. On n'est clairement pas face à du matériel déstabilisant ou très original mais, comme dit plus haut, on a affaire à de l'efficace ! Et le grand maître nous sort un solo inspiré. Très bon titre. Le reste de l'aventure va osciller entre heavy lourd, parfois lugubre mais toujours mélodique (et souvent grandiloquent), et heavy rock plus léger, souligné par des claviers et chœurs, rapprochant Sabbath d'un style propre à la deuxième moitié des années 80 que certains ont, pour parler de quelques compos de Headless Cross, parfois qualifié de "FM" (mais restons calmes, Iommi ne fait pas dans le Bon Jovial non plus). Exemple de côté obscur de la Force : When Death Calls. Lent, sombre, pesant, avec sept minutes au compteur... le morceau est plutôt beau et son atmosphère bien rendue. Dommage que le refrain soit trop répété et finisse par fatiguer sur la longueur. Pour l'anecdote, un certain Brian May (oui, celui de Queen) est venu poser un joli solo sur ce titre. Dans un registre semblable, on retiendra Nightwing qui clôt l'album, une belle chanson assez longue (plus de six minutes), lourde et emphatique, chantée de façon admirable par Tony Martin. En contrepartie, Iommi et ses collègues proposent des compos enlevées et entraînantes qui rendent Black Sabbath plus "mainstream" et donc moins intriguant... Avec plus ou moins de réussite selon les cas. J'aime la rythmée et entêtante Devil And Daughter tout comme je ne peux résister à Black Moon (issue des sessions de The Eternal Idol) qui n'a pas grand-chose à voir avec du Sabbath classique mais qui, dans un style hard accrocheur, est une belle réussite (super riff et très bon refrain). J'accroche moins à Call Of The Wild, trop standard pour un tel groupe, malgré une petite originalité mélodique (orientale) au moment du refrain... mais qui se retrouve cassée par des chœurs (chantant "Hero") trop "hard mélodique propret". En revanche, que les chansons soient très plaisantes ou qu'elles le soient moins, un point commun se distingue : la guitare de sieur Iommi brille et nous sert de beaux solos bien développés sur l'ensemble de l'opus.

Evidemment, comme dit en introduction, Headless Cross n'aura jamais la réputation d'un chef-d'œuvre car il officie dans un registre assez classique (ce n'est finalement qu'un album de hard rock / heavy metal qui n'apporte pas spécialement de fraîcheur aux styles qu'il aborde)... Mais je ne pense pas qu'il mérite qu'on l'ignore ou le méprise un peu facilement sous prétexte qu'il n'a pas le côté novateur ou expérimental des travaux du groupe dans les 70s ou l'aura de classiques comme Heaven And Hell et Mob Rules. Moins inégal que quelques travaux antérieurs ou à venir, ce disque montre un Tony Iommi plutôt en forme, assez inspiré, qui nous prouve qu'il en a encore sous le capot en proposant un album agréable et divertissant à défaut d'être monumental. Après toutes ces années, j'y reviens encore assez régulièrement et passe systématiquement un bon moment à son écoute. 
 

Tracklist de Headless Cross :

01. The Gates Of Hell
02. Headless Cross
03. Devil And Daughter
04. When Death Calls
05. Kill In The Spirit World
06. Call Of The Wild
07. Black Moon
08. Nightwing

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