Fear Factory

Artiste/Groupe

Fear Factory

CD

Obsolete

Date de sortie

1998

Style

Cyber Indus Metal

Chroniqueur

Scum

Site Officiel Artiste

Myspace Artiste

C H R O N I Q U E

Il y a quelques semaines, je cherchais dans ma discothèque de la musique calme, tranquille, fraiche, pour me permettre d'oublier les aléas de la vie de tous les jours. Un petit disque simple, beau et léger. Et j'ai repensé de manière incongrue à l'usine de la peur. Allez savoir quel racourci foireux m'a ammené à faire un parallèle entre le calme et ce groupe tombé dans la facilité et le désoeuvrement. Du coup, au lieu d'un Anneke Van Griesbergen ou d'un Ghost Fish, je me mis Obsolete. Je suis d'accord, niveau bande son pour moment de détente loin de tout, on fait plus évident. Mais alors, pourquoi cet Obsolete ?

Retour en 1998. Fear Factory, après un Soul Of A New Machine culte et un Demanufacture en forme de coup de boule adressé à une scène qui ne demandait que ça, l'usine de la peur devait se remettre en questions. Et surtout se demander comment enchainer après un album aussi important que Demanufacture, disque quasi parfait de metal industriel violent et d'une classe rarement vue ? Sortir une suite ? Aucun risque là dedans, plantage et déception des fans assurée. Se mettre à faire de la musique un peu moins violente et plus radiophonique comme beaucoup de monde va le faire très rapidement, parce qu'au final on ne fera pas plus violent que ce deuxième album ? Plutôt laisser ça aux groupes de néo. Alors ? Alors ce sera l'option la plus logique mais aussi la plus risquée : un concept album basé sur la guerre entre l'homme et les machines. Ouais, rien que ça. C'est que Burton C. Bell et ses amis ont de la suite dans les idées.

Action.
Paré d'un artwork qui met directement dans l'ambiance, Obsolete démarre dès la première seconde, avec le terrible Shock. Un riff totalement reconnaissable et Burton entre en scène en ascenant des "Shock !" absolument terribles. Dino Cazares et Christian Olde Wolbers jouent de leurs instruments avec une grande précision, Raymond Herrera, l'autre horloge atomique, est en place, et pendant que tout ce petit monde nous balance la sauce, le frontman nous narre son histoire de guerre fraticide, utilisant sa voix claire pour mieux faire ressortir la froideur du son, lançant jusqu'à la fin ces "Shock" qui, je vous le redis, sont incroyables de violence et de puissance (mon dieu, les trois derniers sont écrasants). Après une telle baffe d'ouverture, le groove sans équivalent connu d'Edgecrusher nous prend par la main pour nous plonger dans cette histoire. Groove, oui, c'est le terme. Lourdeur et dynamisme se sont rarement aussi bien mariés, Burton toujours au top envoie la purée, et rapidement c'est la sombre violence du groupe qui se fait une place dans notre cortex. Essayez de trouver un break aussi foutrement efficace que celui-ci, où machines et guitares se percutent de concert pour créer ce putain de groove démentiel. Pas possible que le groupe continue comme ça tout l'album, ça ne serait pas humain.
Mais qui a dit que l'usine de la peur était humaine. L'implacable violence d'un morceau comme Smasher-Devourer et son refrain monstrueux contrebalancé par des parties de voix claires d'une justesse éblouissante nous prouvent que Fear Fac' n'a pas tout dit en deux morceaux. Cinq minutes de bonheur, de frissons et un petit peu de peur : imaginez vous dans la peau d'un citoyen de la société décrite par le groupe, et lisez bien les paroles. Oui...
Le cybernétique Securitron (Police State 2000) nous rappelle au bon souvenir du Fear Fac' de Demanufacture: riff saccadé, break rampant absolument somptueux de violence, avec toujours ce refrain en voix claire inamovible et pourtant d'une efficacité sans pareil.
Le génial Descent, avec son groove d'un genre nouveau, parfaitement dans l'optique de ce que devrait être le Metal nouveau à la fin de ce siècle, se plante dans notre tête et ne la quittera plus. Dans trente ans, le refrain, le riff, la noirceur vous hanteront encore. Voilà ce vers quoi aurait dû tendre Digimortal.
Ou alors vers Hi-Tech Hate. Alors que les morceaux du début d'Obsolete nous faisaient penser que la violence avait atteint son paroxysme, voilà que l'usine nous balance un bon coup de chevrotine à bout portant, par surprise, avec ce qui restera l'un des morceaux les plus aliénants, écrasants et terrifiants du groupe. Les couplets sont d'une méchanceté rarement entendue ailleurs que dans un groupe de Death, avec un riff dans le genre qui t'en met plein la tête jusqu'au restant de tes jours. Et lorsque ce satané refrain en voix claire revient, c'est pour se faire laminer; lorsque le couplet repart de plus belle, c'est dans une haine vindicative qui ferait passer Glen Benton et son Deicide pour les choristes. Monstrueux, demandez donc à vos voisins s'il vous en reste.
Derrière, Freedom Or Fire se teint lui aussi de génie, entre mélodie incongrue et groove vital, avec encore ce putain de break où Burton nous sort encore des hurlements comme il ne pourra plus jamais en pousser, avec toujours la section rythmique la plus efficace qui puisse être et ce batteur, que dis-je, ce demi-dieu qu'est Raymond Herrera. Capable de choses comme peu de batteurs en ont été capables, ce gars là est un surhomme, avec un jeu supersonique et une précision à faire pâlir le premier Dirk Verbeuren venu. Très grand respect à Raymond (et à Dirk aussi, mais c'est une autre histoire).
Le morceau titre en forme de salutations adressée à ceux qui ont survécu à ce déferlement de violence et de maitrise, est envoyé avec une conviction et une énergie qui font plaisir à voir (de nos jours, qui joue encore comme ça ?). Voici le tube ultime pour les radios : "Man is obsolete, man is obsolete, erased, extinct !" Voilà un refrain qui se passe de traduction.
La messe est dite, l'aventure a bien avancé, le final peut se mettre en place. Et le final, c'est Resurrection.
Resurrection. Seul single de cet album à avoir fait l'objet d'un clip. Seule chanson axée quasi totalement sur le chant clair. Seule chanson de plus de six minutes pour ce disque. Seul truc pop qu'a composé Fear Factory jusqu'à ce jour. Jamais jusque là le groupe n'avait sonné aussi reposé, crédible dans sa pureté, énergique dans sa positivité. Jamais jusque là Fear Factory n'avait été écoutable pour les personnes qui ne sont pas adeptes du Metal. Et pourtant. Resurrection est avant tout une révélation. D'abord, la révelation de la conclusion de l'histoire du disque. Ensuite la confirmation que ce groupe tient du génie. Et surtout, la promesse d'un groupe qui, s'il est capable de tels albums à ce stade là de sa carrière, se doit de devenir totalement incontournable dix ans après. Et ce n'est pas le générique de fin, Timelessness, qui nous fera dévier d'un iota. Burton y arbore d'ailleurs un chant d'une pureté presque naïve sur une musique reposée, sombre et simple.

Alors, que retient-on d'Obsolete bientôt quinze ans après sa sortie ? Déjà, bordel ça fait déjà quinze longues années ! Si Obsolete sortait de nos jours, il serait tout à fait dans la plaque des standard des groupes qui enchantent nos jours. Obsolete est un concept album mémorable, d'une cohésion et d'une précision sans faille, montrant un Fear Factory au somment de son talent de composition, un Fear Factory froid et violent qui s'assume totalement et qui cette année-là devait être un sacré groupe de scène. Obsolete est un album comme il en existe peu, certes moins frontal que Demanufacture, mais autrement plus abouti, digne de figurer dans n'importe quel top 20 des meilleurs disques de metal (je n'ai pas dis rock, mais bien Metal) de tout les temps.
Et puis, en écoutant les Shock, Edgecrusher, Descent ou Hi-Tech Hate, on ne peut que pleurer ce groupe pitoyable qu'est devenue l'usine à peur, obligé d'aller piquer des musiciens dans feu Strapping Young Lad, et qui après avoir essayé à peu près tout ce qui était à la mode et connu des mouvements de line up qui font que seul Burton aura tout connu, se cherche désespérément un regain de crédibilité sur une scène où les outsiders tapent de plus en plus fort. Le Fear Factory de cette époque dorée me manque. C'est pour ça que je vais me réecouter Hi-Tech Hate de ce pas.

Mémo : Il est à noter que l'édition digipack d'Obsolete, contenant outre une reprise sans intérêt de Cars de et avec Gary Numan, contient aussi quatres inédits de bonne qualité, avec notamment le terrible Messiah qui aurait bien pu avoir sa place sur la version définitive du disque. Et dans la pelleté de titres remaniés, remixés ou inédits de cette époque, jetez donc une oreille avisée sur le Urban Assault Mix d'Edgecrusher, vous m'en direz des nouvelles.

 

Tracklist d'Obsolete :

01. Shock
02. Edgecrusher
03. Smasher/Devourer
04. Securitron (Police State 2000)
05. Descent
06. Hi-Tech Hate
07. Freedom Or Fire
08. Obsolete
09. Resurrection
10. Timelessness

 

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