Korn

Artiste/Groupe

Korn

CD

The Path of Totality

Date de sortie

Décembre 2011

Style

Metal d'avant garde

Chroniqueur

Hellblazer

Note Hellblazer

19/20

Site Officiel Artiste

Myspace Artiste

C H R O N I Q U E

Avant de se lancer dans la chronique de ce nouvel opus de Korn, surgi de nulle part, un peu de flasback s'impose. Quoiqu'on en dise, quoiqu'on en pense, Korn est l'un des groupes majeurs du paysage Metal des nineties / 2000's, et personne ne peut lui enlever son incroyable caractère avant-gardiste, ce que l'emblématique Untouchables (mais on aurait pu citer aussi Untitled, l'album éponyme de 2007) a démontré haut la main. Ce disque est d'ailleurs encore en avance sur son temps, même dix ans après sa sortie (2002). Korn a autant plu que déplu, exploré de nombreux univers, défrayé la chronique, puis a replié de la voilure avec son dernier opus en forme de retour aux sources (Korn III - Remember Who You Are en 2010), et pour le coup, a presque sorti ce nouvel opus dans l'anonymat médiatique. Judicieux, ça...

Jonathan Davis s'est entouré de plusieurs artistes de la scène DJ / électro aux noms aussi énigmatiques que barbares : Skrillex, Noisia, Excision, Kill The Noise, Downlink, 12th Planet, Feed Me, qui apparaissent tous sur un titre ou plus, injectant leur technovenin (le dubstep - style privilégiant puissance et distorsion sonore) à un moment où Davis en avait peut-être bien besoin (car, dans quelle direction aller lorsqu'on a exploré tant d'horizons ?). Les détracteurs diront sans doute que c'est un peu facile de faire appel à des pointures du mix (encore faut-il pondre de tels titres), mais ils oublieront que l'un des succès de la réussite en entreprise (et l'on ne peut douter qu'une entité comme Korn en soit une) est de bien s'entourer, ce qui, pour le coup, est nettement plus hasardeux et reste un art difficile.

Cet influx novateur bouleverse ainsi fortement - tout en le complétant à merveille - le style Korn. Voici le récit de ce voyage stellaire et futuriste, hallucinant et hypnotique, auquel vous convient le grand maître de cérémonie Jonathan Davis et ses fidèles lieutenants, Munky, Fieldy, Ray Luzier et leur pléthore d'invités :

Chaos Lives In Everything démarre sec sur une rythmique électro dub, façon drum & bass agressive (avec un son énorme), puis une déclamation de Davis est vite relayée par un refrain atmosphérique soutenu par de sombres nappes de claviers, ambiance post apocalyptique. Le titre renvoie direct à Untouchables, mais en plus futuriste. Le dernier tiers, ponctué de sons technoïdes du meilleur effet, finit d'achever l'auditeur encore sous le choc. Quel morceau d'ouverture ! la bande est en grande forme.

Kill Mercy enchaine d'emblée sur un riff bien lourd doublé du son électro qui fait - habituez-vous - la marque de fabrique de ce Korn 3.0. Davis prend la suite sur un couplet "ambiant" à la rythmique éthérée, pour mieux repartir en refrain sur un pilonnage sans merci. L'apport massif du son synthétique, loin d'être utilisé à de mauvaises et faciles fins, se révèle aussi judicieux qu'omni-présent et très moderne. Le résultat chope l'auditeur à la gorge et ne le lâche plus. Quelle claque.

My Wall démarre pareil : martelage en règle en rythmique saccadée, mais là encore, ce qui rend habituellement le drum & bass vite gonflant se trouve incroyablement et intelligemment dévoyé et mis en exergue par le reste du combo : vocaux de Davis  juste ce qu'il faut, guitares plombées - sous accordées comme à l'accoutumée - et basse ronflante. Derrière ses fûts, le nouveau venu Ray Luzier s'en donne à coeur joie. A mi-course, un break spatial emmène vos synapses très loin de la galaxie terrestre, reprise par le refrain mid tempo ravageur. Difficile d'y croire : ce retour en force, qu'un matraquage publicitaire totalement absent a rendu humble, prouve que les ricains en ont encore sous la pédale, et tendent à démontrer par la même qu'ils se veulent toujours aussi avant-gardistes, opérant un immense grand écart avec leur dernière livraison.

Narcissistic Canibal est une tuerie : ça enquille sur une petite rythmique anodine, puis ça éclate comme une grenade : Davis déballe ses vocaux avec hargne et un refrain de très haut vol assène à l'auditeur une claque monumentale sans tarder, avant de continuer la lancée du morceau sur un chant limité rapé, fluide, puissant. Et ça recommence, avec en toile de fond un son... mes aïeux, quel son ! Impérial. Le break central est dense, axé sur des scratches technoïdes assassins, que le refrain prend à contrepied avec maestria.

Illuminati ne rompt pas la continuité et attaque en force, pour laisser place au chant possédé (limite psycho) de Davis. Ambiances futuristes par de nombreux ajouts samplés. Korn frappe très fort avec ce titre, le truffant de petites vrilles hypnotiques du meilleur effet. Imparable.

Burn The Obedient démarre en trombe, avec dès les premières notes une attaque sans merci : Davis arrive avec un chant de dément, puis le refrain enfonce le clou, avant de stopper net sur une basse claquante. Et la course reprend, impitoyable. MAIS QU'ONT-ILS BOUFFE ? Je n'en reviens pas... On est à des années lumières de ce que le groupe a fait récemment, un peu comme si les fondements érigés tout au long de sa carrière éructaient (oui, éructaient !) sur cet album. Sans pitié. La rythmique en béton renforcée aux beats électro dresse un mur en acier.

Sanctuary pose un peu le débat (enfin, par rapport au reste !), slow tempo qui malgré tout se veut lui aussi hypnotique (c'est le mot qui me hante en écoutant cette galette hallucinante). Innombrables effets que les invités de Davis se font un plaisir de déverser sur les compos à la base très inspirées. Encore un refrain aux allures de diatribe fédératrice.

Let's Go vrille tout de suite les oreilles en crescendo, avant que Davis ne se lance dans un chaud froid d'attaque vocale calme / aggressive, soutenue par une jungle sonore maîtrisée : beats meurtriers, viol de six cordes, basse marteau piqueur, et toujours, toujours la rythmique électro en arrière plan. Construction en montée pour ce titre émaillée d'une ligne vocale de premier ordre.

Get Up - que puis-je ajouter ? - poursuit la destruction de tous vos repères, plombée par un refrain tout simplement majestueux arrivant au summum d'un édifice aussi tortueux que percutant.

Way Too Far porte superbement son nom, emmené par une atmosphère (et un soupçon de choeurs légers !) intersidérale, sans oublier les montées et descentes mélodiques, les grunts de Davis, les larsens de Munky, et le mur érigé par Fieldy et 12th Planet. Encore un titre qu'il faudra du temps pour embrasser complètement, étant donné sa densité et son refrain ultra porteur.

Bleeding Out clôture le bal sur une ouverture au piano (presque incongru de simplicité, vu la densité du reste), qui ne tarde pas à laisser place à de sublimes effets posés sur une ligne de drum & bass, elle même posée sur un mid tempo (oui je sais, c'est dur à expliquer... il faut l'écouter). Ca ne dure pas, et ça explose sur une basse slappée renforcée à la guitare bourrée d'effets, que le chant "enfantin" de Davis reprend façon yin/yang, un coup gentil, un coup méchant. Irréprochable. Un petit coup de cornemuse pour la route, quand même, au final. C'est ce qui s'appelle un retour flamboyant.

The path Of Totality, armé de onze titres aux formats courts et sans remplissage, synthétise à lui tout seul tout le passé du groupe, piochant ça et là, et le magnifiant avec un nouvel apport créatif, en l'occurence l'invasif (mais jouissif) coté beat/électro, qui va si bien aux divagations malsaines de Jonathan Davis et de sa bande de frappadingues. Imaginez un mix de Untouchables, Korn (album éponyme) et The Prodigy (Fat Of The Land), et vous serez encore loin de la réalité de cet ovni.

Tout simplement génial. L'un des albums majeurs de l'année, si ce n'est plus.

 

Tracklist de The Path Of Totality :

01. Chaos Lives in Everything (feat. Skrillex)
02. Kill Mercy Within (feat Noisia)
03. My Wall (feat. Excision)
04. Narcissistic Cannibal (feat. Skrillex & Kill The Noise)
05. Illuminati (feat. Excision & Downlink)
06. Burn the Obedient (feat. Noisia)
07. Sanctuary (feat. Downlink)
08. Let's Go (feat. Noisia)
09. Get Up! (feat. Skrillex)
10. Way Too Far (feat. 12th Planet)
11. Bleeding Out (feat. Feed Me)

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