Artiste/Groupe:

Loudblast

CD:

Manifesto

Date de sortie:

Novembre 2020

Label:

Listenable Records

Style:

Death Metal

Chroniqueur:

Ignatius

Note:

15.5/20

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Il y avait longtemps que je n'avais pas laissé sa chance à un album de Loudblast, refroidi par le retour du groupe en 2014 avec un Planet Pandemonium vite oublié, je n'avais pas non plus été convaincu par les deux réalisations suivantes, oeuvres d'une formation à mon sens toujours trop perméable aux sons du moment. Loudblast m'a en effet toujours semblé désireux de suivre le mouvement et de coller aux tendances, sa discographie permet d'ailleurs de voir quels étaient les styles de metal en vogue au moment de leur sortie, Thrash Metal en 1989 (Sensorial Treatment), Death Metal en 1991 (Disincarnate), le tout teinté de Heavy en 1993 (Sublime Dementia) alors que Death ou Carcass avaient déjà amorcé ce virage, etc. Loin de moi l'envie de taxer le groupe de suiveur ou d'opportuniste, j'ai adoré tous ces albums et les écoute toujours avec un réel plaisir, je pense plutôt que Stéphane Buriez, passionné, écoute énormément de choses et se laisse facilement habiter par ce qu'il entend et par ce qu'il aime. Loudblast vogue ainsi au gré des ses amours passagères tout en entretenant, malgré cela, une solide identité sonore perceptible dès ses premiers enregistrements, un riff de Buriez sonne comme un riff de Buriez !

 

Je me demandais donc à quoi pouvait bien ressembler la musique du groupe en 2020, quelles influences j'allais y retrouver cette fois-ci et j'ai eu l'agréable surprise de constater que Loudblast, sur ce huitième opus, semblait se nourrir de lui-même, comme désireux de célébrer son propre son et sa longue histoire, cette longue expérience acquise au fil des années. Je ne parlerai pas de retour aux sources mais plutôt d'un retour à l'énergie adolescente des premières années, pleine de fougue et d'une naïveté bienvenue. Cet album sent surtout l'énergie et le plaisir, le plaisir d'un groupe qui a vécu et n'a plus rien à prouver ni à attendre, qui travaille sans pression mais avec une passion brûlante et communicative. Je n'y ressens pas la volonté d'appartenir à une scène, de prendre un train en marche, mais juste l'envie pour Loudblast de faire du Loudblast en utilisant toutes les composantes de sa longue carrière, sans se poser plus de questions. Manifesto est un condensé d'énergie Death/Thrash, clairement moderne dans l'exécution et dans son traitement mais nourri à l'adolescence du groupe, aux influences des premières heures, largement digérées depuis, qui ressurgissent ici et là et confèrent à l'ensemble une dynamique irrésistible. Difficile d'extraire un morceau du lot car ils sont tous extractibles, chacun laissant sa propre empreinte. Le groupe a travaillé dans le détail, offrant à chaque composition sa propre aura, ciblant talentueusement les arrangements selon les besoins, variant l'approche, la jouant tour à tour brutal, virulent et concis (Unit 731), inquiétant (The Promethean Fire) ou carrément pesant sur le sombre épilogue Infamy Be To You. Il y a tout Loudblast dans ce disque, solidement ancré dans son passé et parfaitement à l'aise dans le présent, des acquis et de l'audace. Dommage néanmoins que le groupe n'ait pas apporté plus de soins aux solos, globalement anecdotiques qui n'apportent rien aux morceaux alors qu'ils auraient pu servir de liant entre chaque titre et apporter plus de profondeur à l'ensemble. C'est d'autant plus dommage à l'écoute du magnifique travail réalisé sur Solace In Hell, l'impact des solis sur l'album aurait été incroyable si tous avaient bénéficié de la même attention.

 

 Côté prod, le groupe nous gâte avec un impressionnant mur de guitares au grain tranchant et précis, rapidement identifiable. Je regretterai juste un son de batterie qui, s'il est propre et puissant, demeure malgré tout un peu trop impersonnel. Je chipote, Loudblast n'a jamais été aussi velu ! Le mix est parfait, tout est à sa place, emmené par le growl dominateur, graveleux mais superbement articulé de Stephane Buriez dont le placement vocal ultra efficace est remarquable sur tout l'album.

Comme je le disais, Manifesto mélange l'acquis et l'audace et nous réserve en effet beaucoup de surprises, des plans heavy ultra énergiques de Unit 731, au refrain imparable de Invoking To Justify en passant par le riffing génialement convulsif de Festering Pyre et ses très beaux arrangements de cordes, chaque titre de cet album propose au moins une idée forte qui le différencie des autres et le rend rapidement identifiable. Manifesto n'est en effet pas un bloc compact, à savoir dix morceaux semblables les uns aux autres et dont l'écoute peut devenir lassante. Non, ici chaque titre propose une approche spécifique, témoignant de la longévité du groupe et de toutes les influences qu'il a pu digérer durant ces trois grosses décennies de service.
Mais, il y a toujours un mais, l'album a par conséquent les défauts de ses qualités. En partant un peu dans tous les sens sans réelle ligne directrice, il souffre d'un petit manque d'homogénéité et de personnalité. Si cela lui donne l'avantage non négligeable d'être particulièrement riche et varié, tous les titres étant bien distincts les uns des autres, riches en arrangements parfois subtils mais toujours très justes, il lui manque au final ce fil conducteur qui lui aurait permis de devenir une entité plus cohérente au caractère bien trempé. Comme dirait Philippe Etchebest (je cite qui je veux c'est ma chronique !) "tout est bon, les préparations sont réussies, il manque juste un bon jus pour lier tous les éléments entre eux et en faire un grand plat" ! Je repense alors à ces solos un peu bâclés, et je me dis qu'ils auraient été un jus parfait !

Néanmoins, après ces hasardeuses comparaisons culinaires, je retiendrai uniquement le plaisir que m'a procuré cet album marqué par l'engagement et la fraîcheur d'un Loudblast qui, après trente cinq de carrière, parvient à rester efficace, pertinent, et même à nous surprendre encore, animé par une enthousiasmante énergie juvénile qui fait clairement mouche.

 

Tracklist de Manifesto:

01. Todestrieb
02. Unit 731
03. Erasing Reality
04. The Promethean Fire
05. Preaching Spiritual Infirmity
06. Invoking to Justify
07. Festering Pyre
08. Into the Greatest of Unknowns
09. Solace in Hell
10. Infamy Be To You

 

 

 

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