Après la sortie de Arise, Sepultura s'embarque sur une tournée européenne en tête d'affiche avec les Anglais de Fudge Tunnel en première partie, un groupe de Sludge / Noise paraît-il, assez éloigné du Thrash des Brésiliens (moi, ça me fait un peu penser au premier album de Nirvana). Je me rappelle encore de leur passage au Zénith de Paris (le 22 mars 1992 pour être précis) : de mémoire de metalleux ayant pourtant vu de nombreux concerts, je n'ai jamais vu un groupe se faire jeter de la sorte (ils n'ont même pas pu jouer leur troisième titre, le public hurlant "Sepultura !" plus fort que leur musique...) Pourquoi je vous parle de ça ? Eh bien parce que c'est sans aucun doute sur cette tournée qu'est né le projet Nailbomb qui nous intéresse ici, puisqu'il regroupe les leaders des deux formations : Max Cavalera, chanteur et guitariste des Brésiliens et Alex Newport, également chanteur et guitariste chez les Britanniques et aussi producteur de son état (c'est lui qui a mixé cet album).

C'est en 1994 que paraît l'album ici présent, le premier et le seul album studio du groupe (le second et dernier est un live). Sepultura, qui vient de sortir Chaos AD, est quasiment au sommet de sa popularité et nul doute que cela va grandement faciliter la vente du CD et contribuer à faire grossir la notoriété de ce combo qui, pourtant, à la base, devait être une antithèse de tout produit commercial.

Nailbomb, c'est la rencontre du Thrash Metal à la Sepultura et des sonorités indus, un courant musical assez porteur à cette époque. De Fudge Tunnel, on a gardé le côté très répétitif des riffs et la voix de Newport. Car oui, les deux compères se partagent assez équitablement le chant sur l’album et on reconnaît assez bien le phrasé de chacun.
Les fans de Sepultura ne sont donc pas dépaysés par les riffs qui rappellent forcément le Thrash made in Cavalera (ceux de Wasting Away, Blind And Lost, Exploitation ou For Fuck’s Sake auraient pu servir pour des morceaux de Sepultura), d’autant que l’on retrouve les membres de Sepultura qui sont venus filer le coup de patte : Andreas Kisser à la guitare sur pas mal de titres ainsi que le frangin Igor Cavalera à la batterie, quand celle-ci n'est pas programmée. Mais le caractère répétitif des riffs, les mixes de voix, les bruitages et autres trucs chelous, font bien penser à de l'indus, assez proche de Ministry parfois (Guerrillas, Sum Of Your Achievements). On a d’ailleurs, dès l’écoute des deux premiers morceaux, une idée précise de ce à quoi il faut s’attendre sur cet album ; car autant Wasting Away colle totalement à l’univers Sepultura, autant Vai Toma No Cu n’a rien à voir. L'album navigue ainsi entre toutes ces influences, avec un certain bonheur, il faut le dire.
On note aussi la présence de Dino Cazares (Fear Factory) qui envoie du gros riff sur 24 Hour Bullshit, un titre de nouveau très indus dans sa construction.

Côté texte, on est loin de la poésie. L'album sent le soufre avant d'avoir commencé, rien que par sa pochette qui est la réplique d'une célèbre photo d'une femme vietcong malmenée par un GI. Sur la jaquette du verso, on découvre une autre photo d’un flic en train de tabasser un noir à terre. On sent que Nailbomb ne va pas nous parler de dragons, de combats l’épée à la main ou même d’amour. Paroles nihilistes, versets anarchistes, antireligieux (le toujours d'actualité Religious Cancer avec son refrain final fait de "No God, No Master"). Et n'oublions pas le sticker "Parental Advisory" toujours présent dans pareil cas.

Cavalera et Newport, malgré le succès rencontré par l'album, ne feront pas de Nailbomb un véritable projet parallèle. Comme prévu au départ, ils sabordent le groupe après toutefois un ultime album live (qui reprend quasiment la tracklist de celui-ci), très justement nommé Proud To Commit Commercial Suicide.
Nailbomb, c’est culte !
 

Tracklist de Point Blank :

01. Wasting Away
02. Vai Toma No Cu
03. 24 Hour Bullshit
04. Guerrillas
05. Blind And Lost
06. Sum Of Your Achievements
07. Cockroaches
08. For Fuck's Sake
09. World Of Shit
10. Exploitation
11. Religious Cancer
12. Shit Piñata
13. Sick Life