Aaaahhhhh les come-backs… Un vaste sujet auquel il est toujours délicat de donner un avis définitif…
Entre les nostalgiques, les opportunistes, les fabricants de billets, je me suis souvent posé la question de la motivation à revenir sur scène. Mais pour Psykup, la question ne se pose pas.

En effet, en 2007 le groupe monte sur scène après quelques années de mise en pause, pour le plaisir, pour une date, et c’est là que la machine s’emballe.
Les Toulousains n’avaient pas vu le vent venir et surtout n’avaient pas imaginé générer une telle attente auprès d’un public qui s’avère être particulièrement fidèle.
Une réédition du premier album, deux campagnes de crowdfunding particulièrement bien suivies et enfin, après neuf longues années, le nouveau Psykup est là…

Psykup nous propose Ctrl + Alt + Fuck, un album qui se veut plus cash, plus direct, peut-être un peu moins « Terminal L »… Cette démarche artistique peut paraitre un peu risquée lorsque l’on passe d’un double album de douze titres, très fouillé, d’une durée de quatre-vingt six minutes permettant de passer 198 km pénard, à quarante-cinq minutes en dix titres. Le registre n’est clairement pas le même. Mais est ce que plus concis signifie moins créatif, pas si sûr…

Un mot sur le travail de Jouch qui accompagne, depuis We Love You All, le groupe sur les pochettes. Elles sont toujours finement représentatives de l’état d’esprit du groupe. Et là, en l’occurrence, c’est plutôt frais, contrairement à la sanguinolente pochette du dernier album, c’est ambiance vacances, farniente, et du coup l’ensemble est nettement plus léger. Mais on ne se refait pas et sur la face B, le petit clin d’œil sarcastique d’une mer en sale état. La vitrine et la réalité en somme… Mais honnêtement, la représentation d’un hippopotame volant pour des autruches qui elles ne peuvent pas voler, l’image est magique.

Mais l’important c’est bien entendu la musique. Sur la démarche, pas de changement : Ju (guitare / chant) reste le principal compositeur et il est aisé de reconnaitre sa patte sur certains riffs ou arpèges. Il a d’ailleurs enregistré toutes les parties guitare, ce qui me fait tout de même regretter l’absence d’un complice comme c’était le cas avec Vidda qui apportait une vision complémentaire à celle proposé par Ju. Par contre, sa complicité avec Milka au chant est toujours aussi évidente et leur complémentarité n’est plus à prouver, ils sont certainement ce qui se fait de mieux en France. Un Milka qui, encore une fois, sur cette galette, fait étalage de son énorme potentiel vocal à chaque titre. Il est tellement à l’aise dans tellement de genres différents qu’il en est totalement déconcertant. Ju reste dans son registre si particulier et lorsqu’il lâche les chevaux, l’agression sonore est totale.


Quant à la rythmique, le duo Brice à la batterie et Julian à la basse fait un travail remarquable pour soutenir l’ensemble des compositions. Brice reste un batteur tout à fait magistral, et même s’il peut avoir tendance à étaler ses cymbales sur le bitume, il va à l’essentiel tout comme la nouvelle direction artistique. Julian a ses « moments privilégiés » sur l’album et chacune de ses interventions est toujours inspirée.

Mais ce qui est assez nouveau avec Psykup, c’est que chaque titre a une véritable identité même si chacun reste un foisonnement d’idée. Antérieurement, le groupe mixait les ambiances et l’auditeur restait pantois devant tant de changements sur un même titre. Sur Ctrl + Alt + Fuck, sans devenir linéaire, le groupe amène une certaine homogénéité dans les compositions mais développe des ambiances très différentes.  

Dès l’ouverture, Violent Brazilian Massage nous propulse du côté du Brésil (merci Jean Mich’) et débute avec un « We’re back » rageur et motivé comme jamais. Merci les gars mais on le savait déjà ! Ce titre est, à mon sens, pour la « fan base », tous les éléments « classiques » de Psykup sont présents.  Ça part dans tous les sens, un pont batucada, des riffs très inspirés, un clin d’œil à l’Autruche... Bref une première tartine de plaisir.


Mais comme Psykup n’a aucune envie de baisser le feu sous la marmite, il enchaine We Will Win This War avec son refrain totalement imparable. Plus on avance dans le disque et plus les identités sont multiples, Shampoo The Planet oscille entre funk et rock’n roll, Fuck Me Till The End Of Times amène son lot de Hip Hop, l’inquiétant Ssanta Clauss (Write Me A Letter) plonge l’auditeur dans une folie douce. Quant à Crisis Of Today, il est un véritable arc en ciel musical qui se finit en beauté avec un(e) nyckelharpa, sorte de violon scandinave joué par Florian Baudrain des Compagnons Du Gras Jambon.

Mais pour moi, il y a deux titres qui tirent vraiment leur épingle du jeu. Tout d’abord Cooler Than God, introduit par un joyeux bordel de cuivre, présent tout au long du titre en soutien du chant et qui donne une dimension particulière à ce titre. Sa structuration jazzy, son côté cinématographique, le rend à part et ce morceau transpire une véritable joie de vivre. Le second c’est The Long Ride Home. Le titre est en deux parties avec une introduction (Sunrise) absolument délicieuse qui amalgame des influences hispaniques à une musique moderne au plaisir immédiat. Suivi de son pendant (Sundown) qui parachève l’album avec puissance grâcé à une énergie fabuleuse.

Alors, au moment de conclure, j’ai tout de même quelques regrets. Le groupe a clairement gagné en efficacité et ses compositions seront en live le yang des titres les plus anciens. Mais il perd une certaine créativité. Je veux dire par là que lorsque le groupe poussait ses titres, les étirait pour pousser jusqu’au bout son histoire, je crois que c’était un des atouts charme majeurs de Psykup. Je dois faire partie de ceux qui aimait bien leur côté « Terminale L »…

Mais ne vous fourvoyez pas, cette nouvelle livraison de Psykup est à l’image de sa discographie, excellente. Le groupe conserve cette faculté à nous faire voyager, à rendre chaque titre rocambolesque, et surtout à en faire un groupe définitivement à part sur la scène française. L’histoire continue, pas totalement là où elle s’était interrompue, mais Psykup est revenu dans une forme étincelante et c’est bien là le plus important.

Tracklist de Ctrl + Alt + Fuck :

01. Violent Brazilian Massage
02. We Will Win This War
03. SSanta ClauSS (Write Me A Letter)
04. Shampoo The Planet
05. Fuck Me 'Til The End Of Times
06. Cooler Than God
07. The Intelligence
08. Crisis Of Today
09. The Long Ride Home (Sunrise)
10. The Long Ride Home (Sundown)