C H R O N I Q U E

Wisconsin Death Trip est une bombe. N'en déplaise a ceux qui taxèrent et taxent encore Wayne Static et sa bande de faire du néo, ce premier album de Static X est une tuerie intégrale ne souffrant d'aucun défaut et surpassant allègrement la plupart des albums sortis en 1999 tant cet album est cohérent et accrocheur.
Static X, c'est d'abord un petit groupe qui vient du fin fond de l'Amérique profonde. C'est quatre personnalités qui deviendront cultes dans la culture dégénérée du début des années 2000 : l'imposant et pas rassurant Tony Campos, le cool Koichi Fukuda, l'étrange Ken Jay et le barré Wayne Static, admiré de tous par sa capacité à garder une coupe de cheveu hautement improbable et impressionnante. Et lorsque ces quatres neuneus décidèrent de faire du bruit ensemble, il était certain que leur environnement débridé et crade allait influencer le résultat et que ce qui allait sortir de leurs cerveaux allait être différent.

Tout commence par un artwork ravageur, avec un livret simple mais efficace, qui permet tout de suite de capter l'ambiance. Et cette ambiance, c'est avec Push It qu'elle va se poser. Tube en carbone, inoxydable, à peine compréhensible niveau paroles, déclamées par Wayne Static et Tony Campos, riff simple mais efficace, sur le fond rien de bien nouveau. Mais ce qui fait déjà la différence, c'est la forme. Les bruitages étranges venus d'on ne sait où, la virulence du chant et l'enveloppe crade qui entoure le tout. Facile, immédiat, dérangeant, Push It est à l'image de l'album : il fait chier son monde. Impossible de classer ça sérieusement dans le néo, trop accrocheur pour de l'indus, comment définir Push It ? La réponse : en ne sortant pas du cadre Static X ! La preuve avec I'm With Stupid, conte totalement débile - regardez le clip si vous ne me croyez pas - mais en même temps tellement badass et efficace qu'il innonde lui aussi votre tête. Bienvenue au royaume des freaks, dans un imaginaire sombre et crasseux, qui ne demande qu'à trouver une existence dans le monde réel. Bled For Days est plus adulte, avec son refrain en souffrance, et ses grognements honnêtes. Le son de guitare est totalement indus, clair tout en étant gras, mais le rendu global est irritant, énervant, car pas assez lisse pour plaire au quidam qui écoute la radio.

Love Dump dépose sur cet album l'ambiance unique qui deviendra la touche Wisconsin Death Trip : samples barrés, limite démoniaques, les paroles sont toujours abstraites mais sûrement claires pour son auteur, tout est ici question de colère nocturne gelée. Une question de tabassage classieux, sans se salir les mains mais en faisant manger de la terre et de la rouille à son compagnon de baston. I Am est branché, comme Push It et I'm With Stupid sur la tension continue : sautillant, dansant tout en gardant cette part d'agression propre à cette période de fin de cycle. Otsegolation, c'est la complainte rituelle qui explose à grand coup de guitare scie sauteuse, avec les hurlement de Static dans le fond. Impressionnant. Le riff distordu qui ponctue ce titre est remarquable, c'est une claque. Tout comme le génial Stem, proclamé avec vigueur par le meneur de jeu, sur un titre tout en ambiances synthétiques et toujours très noires, et rapidement l'auditeur tout humain qu'il est ne peut s'empecher de fredonner cet air improbable et ces paroles sans queue ni tête qui sont irrésistibles. Passons Sweat Of The Bud sans surprise - encore que son break à base d'hurlements apocalyptiques sur fond de tonnerre est assez surréaliste - et l'autre tube qu'est Fix avec son riff perçeuse et attardons nous sur le triplé final. D'abord l'orgasmique Wisconsin Death Trip, vraie bombe metallique élaborée pour dévaster la concurrence, armée d'un vrai refrain dévastateur et simple, emmené par un Wayne Static rageur et un riff qui tape. Ensuite, la montée d'adrénaline continue avec The Trance Is The Motion, aux relents de Nine Inch Nails dégénéré, bande son d'une apocalypse au clair de lune - définitivement nocturne cet album -, totalement abstrait mais foutrement efficace. Hanté. Tout comme le grésillant et obsédant December, générique post-apocalypse idéal, apaisé dans la mort. Post metal, post indus, post ce que vous voulez, ça tue.

Ce qui fait de ce premier album (!) un si grand disque c'est son âme. D'un bout à l'autre, aucun titre ne dépareille, aucun instant ne fait tâche, aucun riff ne parait déplacé. D'un bout à l'autre de ces trois quart d'heure, Static X nous invite à voyager dans son monde, son propre monde, pour une virée nocturne en enfer dont vous reviendrez changé. La suite sera moins réussie, la faute à la disparition définitive de cette âme, le monde ayant définitivement abandonné le réel au profit du superficiel. Un disque intemporel et indispensable pour tout fan de Metal profond.

Tracklist de Wisconsin Death Trip :

1. Push It
2. I'm With Stupid
3. Bled For Days
4. Love Dump
5. I Am
6. Otsegolation
7. Stem
8. Sweat Of The Bud
9. Fix
10. Wisconsin Death Trip
11. The Trance Is The Motion
12. December

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