Benighted

Interview date

22 Juin 2014

Interviewer

fimbultyr

I N T E R V I E W

Interview Julien (face à face)


Comment présenterais-tu Benighted à quelqu'un qui ne connais pas le groupe ?

Alors je vais reprendre une expression qu'un fan avait sorti et que j'avais trouvé magnifique. Il avait dit : Benighted, c'est un peu comme un accident entre deux camions remplis de porcs, c'est-à-dire que c'est très violent, ça fait beaucoup de bruit, ça gruik et ça saigne. J'avais trouvé ça magnifique. Voilà, nous on fait du Death/Grind un peu brutal avec beaucoup d'influences en fait. Notre base est Death Metal, mais autour il y a pas mal de hardcore, grindcore, du black. Donc on a une façon un peu moderne de jouer du Death Metal, en y incorporant toutes nos influences, et en privilégiant surtout l'efficacité des morceaux en live.

En parlant d'influences, quels sont les groupes qui ont véritablement influencé Benighted ?

Alors je dirais en tout premier lieu, des groupes comme Napalm Death, qui reste une référence au niveau musical, mais aussi au niveau de l'esprit sur scène. Après je dirais Aborted aussi, qui nous a énormément influencé au début. Maintenant c'est devenu des copains, et c'est un groupe qui a une musique que j'adore. Après tous les groupes comme Diying Fetus, qui ont fait école.

Au niveau des thèmes de vos chansons, elles sont vraiment axées sur les maladies psychiatriques en particulier. Qu'est-ce qui vous fascine dans ce domaine ?

C'est pas vraiment de la fascination, il s'agit surtout de mon milieu à moi, vu que je suis infirmier en hôpital psychiatrique. Et disons que notre musique est dans cet esprit d'incorporer beaucoup de choses qui vont pas forcément ensemble, mais qu'on arrive à marier. Ce qui fait que le thème de la psychiatrie, que je maitrise bien avec treize ans d'expérience dans la psychiatrie, c'était un concept logique, qui souligne bien notre façon de jouer notre musique. Toutes les paroles parlent de maladies mentales et chaque album parle d'une maladie mentale en particulier avec ce qu'elle a de réel dans les symptômes, la définition de la pathologie et la façon dont les personnes perçoivent leur maladie.

Comment le fait d'être français a-t-il influencé votre carrière et votre musique ?

Houlà, ça c'est une question compliquée, au sens où ça fait sept, huit ans que la France est prise au sérieux vis-à-vis de ses groupes de Metal, c'est-à-dire qu'en France on a eu cette époque d'or avec les groupes comme Loudblast, Massacra, Aggressor au tout début, où on avait vraiment une crédibilité en tant que pays du Metal. Après, à mon sens, on a eu toute une vague de creux, où les groupes se construisaient, évoluaient plus en copie de trucs qui marchaient. Il n'y avait pas d'identité Metal française, qui s'est retrouvée plus tard, avec une identité personnelle, une touche à la française. La crédibilité française à l'internationale a bien évolué. Nous on a eu la chance d'avoir toujours été très soutenu en Europe, et maintenant dans le monde. Mais dans les pays comme l'Allemagne, la Hollande, l'Autriche, notre nom a grossi assez vite, je pense grâce au côté en même temps old school et moderne de notre musique.

Si tu devais faire le point sur votre carrière, qu'est-ce que tu retiendrais spécifiquement ?

Et bien je retiendrais que je me rappelle encore quand on était ce petit groupe qui répétait dans le garage de mon papa, mais maintenant, sept albums en quinze ans, des centaines de dates un peu partout dans le monde, on peut dire qu'on a vraiment évolué. Une de mes grandes fiertés restera la tournée avec Morbid Angel que j'ai trouvée géniale et tous les festivals qu'on a pu faire, le Fortarock, le Wacken, le Summer Breeze, le Hellfest qui ont été à chaque fois des expériences énormes.

Ça fait un certain temps que vous êtes chez Season of Mist, tout se passe bien avec eux ?

Alors Season of Mist, c'est un label à la fois très professionnel et avec qui humainement on s'entend très bien. Par exemple, avec beaucoup de personnes de Season of Mist, en dehors du business, on est devenu amis. On se retrouve au long de l'année pour faire des bringues ensemble, on fête le nouvel an ensemble. C'est vraiment devenu des amis et c'est très facile de bosser avec eux. C'est aussi quelque chose qu'on recherche, vu qu'on n'a pas vocation à vivre de Benighted. Donc on a envie de pouvoir bosser avec des gens en qui on a confiance, avec qui on peut bosser facilement, parce que c'est pas un boulot pour nous, c'est un truc familial, qui nous éclate et qui doit se passer simplement. On est très content de bosser avec Season of Mist et de la relation qu'on a avec eux.

Vous avez des textes en français, en anglais et en allemand, est-ce que ça vous tente d'essayer une autre langue ?

Ben le problème, c'est qu'après je ne connais pas d'autres langues ! Je peux essayer mais je pense que ce serait du phonétique. J'aime beaucoup avoir des textes en français, parce que c'est paradoxalement beaucoup plus difficile en français qu'en anglais, parce qu'on est beaucoup plus dur avec notre langue, et on peut très vite sonner très stupide, quand on ne manie pas notre langue correctement. L'anglais, c'est une langue passe-partout qui n'est pas facile à manier. L'allemand, c'était pour l'album Asylum Cave, parce que ça parle de Joseph Frietzel, qu'il est autrichien et que j'avais appris l'allemand à l'école… c'était dans le thème. Après, réitérer l'expérience dans une autre langue, je ne sais pas, je ne vois pas. Si une occasion se présente, en toute cohérence avec le morceau, pourquoi pas.

Avec le recul, y a-t-il des choses que tu ferais différemment dans la carrière de Benighted ?

Oui bien sûr. Il y a toujours des choses qu'on aurait préféré faire depuis le premier album, il y a toujours des choses qu'on aurait préféré faire différemment. J'ai pas trop la mentalité de critiquer les choses que j'ai faites avant si jamais ça me plait plus, tous les albums qu'on a fait ont été faits avec le niveau d'expérience musicale qu'on avait à l'époque, ce qu'on avait dans les tripes et la façon dont on voulait jouer notre musique. Même s'il y a des albums où je me dis « non, non, jamais je ne jouerai cette chanson », jamais je dirais que j'en ai honte, parce qu'à l'époque où on l'a faite, on était dedans. On l'a fait avec sincérité, et ça marchait. On avait cette démarche de donner tout ce qu'on avait, et à chaque album, les gens nous ont dit "ça va être très dur de faire mieux", et j'ai quand même l'impression à chaque fois d'avoir poussé le bouchon un peu plus loin, dans la qualité des morceaux, et dans le sens de tailler nos morceaux pour le live. Un groupe de death grind qui arrive à te faire taper dans les mains, c'est assez rare. C'est encore ce qui s'est passé hier d'ailleurs. Ca aussi c'est important pour nous, on ne veut pas que nos albums soit un magma informe de riffs en bordel. Ce qui marche avec Benighted, c'est que les gens sont capables d'identifier et de reconnaitre les morceaux, de chanter les refrains…

Qu'est-ce que vous avez retenu du concert d'hier sur la Altar ?

Un grand moment ! Un grand moment de convivialité, parce qu'on jouait encore tôt, et on a toujours la pression de se dire "j'espère que les gens vont se lever quand même", parce que quand tu fais la bringue dans des festoches comme ça c'est dur de se lever le matin pour aller voir un concert. Et là, beaucoup de monde était présent, et surtout il y a eu un bordel dès le début du set… Les gens étaient à fond, il y a eu de la poussière qui montait à je ne sais pas combien de mètres tellement c'était la folie furieuse. Nous, on a pris un panard monstrueux sur scène.

Vous avez une grosse expérience des festivals. Quelles sont selon vous les différences entre jouer en salle et en fest ?

C'est bien différent, c'est bien différent. J'aime beaucoup les deux. Dans une petite salle où t'as peut être 150 personnes, si elles prennent plaisir avec toi, tu prends le même panard. Bien sûr, jouer sur une grosse scène comme le hellfest, c'est impressionnant, entre chaque morceaux tu entends des hurlements comme dans un stade ! C'est grisant ! Mais je pense qu'on s'exprime mieux dans une salle de quatre ou cinq cents personnes, où les mecs sont blindés, où ils peuvent monter sur scène, sauter dans la foule, chanter dans le micro avec moi. Ca renforce le côté familial de Benighted. On aime cette mentalité-là. Ça me rappelle beaucoup le rugby pour ma part. Ça fait partie de notre identité, c'est quelque chose qu'on a toujours eu, on vient pour faire la bringue avec les gens en fait. Le problème avec les gros fests comme ça, c'est que les gens ne peuvent pas monter sur scène avec nous, c'est un peu frustrant.

As-tu une anecdote surprenante ou amusante à raconter ?

Oui, ben il y en a une récente. C'est notre guitariste qui as fait une jolie pirouette sur scène, il s'est pris les pieds dans son fil et il est tombé d'une façon tout à fait incroyable, en chutant sur le côté façon judoka. Il nous a fait rire ! C'était à Limoges, pour la tournée avec Loudblast, ça a été filmé. Quelqu'un l'a mis sur internet, et juste dans la nuit ça a dû faire deux mille vues ! Sa gamelle est énorme. Moi je ne l'ai pas vu tomber, je l'ai juste vu par terre et je me suis demandé ce qu'il foutait. C'est après sur la vidéo que j'ai vu sa gamelle. C'est excellent, parce qu'il sent qu'il va tomber, alors il se jette sur le côté pour protéger sa guitare.

Un dernier mot pour les fans et nos lecteurs ?

Un grand merci à tous ceux qui nous suivent, et à tous ceux qui se sont bougés le cul hier, parce qu’à midi quinze ce n’est pas facile. Et se retrouver devant autant de monde, qui a autant la pêche, c’est à la fois un grand honneur et un pur plaisir pour nous. On a hâte de reprendre la route pour retrouver tous les potes et faire la bringue tous les soirs après un concert bien violent.


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