Europe

Interview date

14 Novembre 2012

Interviewer

Didier, Philippec, Evanessa

I N T E R V I E W

Interview Joey Tempest (face à face)


Bonjour et merci de prendre le temps de répondre à nos questions, nous sommes le webzine français Auxportesdumetal.com

Salut les gars.

Parlons tout d'abord de votre groupe, Europe existe depuis les années 80. Pensiez vous que vous seriez toujours là 30 ans plus tard ?

Oh non. Quand j'ai rencontré John Norum, il avait 14 ans et j'en avais 15 et on a formé le groupe quand on a eu environ 16 ans. Et vous savez quand on a 16 ans on considère les gens de 30 ans comme déjà vieux [rires], ceux de 40 ans comme encore plus vieux, et ceux de 50 ans comme des fossiles. Donc non bien sûr qu'on n'y pensait pas. On se sentait invincibles, on ne pensait pas à grand chose en fait, on jouait du rock and roll voilà tout. Tout ce qu'on voulait c'était partir en tournée comme Thin Lizzy ou UFO, ou encore Deep Purple. On voulait prendre la route. Et de côté là nous sommes très heureux et très chanceux.

On dirait que beaucoup de groupes des années 80 et même des années 70, sont toujours là, comment expliquez-vous cela ? Par exemple, UFO est toujours là ...

Oui c'est vrai, Phil Mogg est très productif en fait. C'est un bon parolier et un bon chanteur. Le seul problème c'est que l'industrie du disque est en crise. C'est pour cela que les gens se concentrent plutôt sur les concerts et leur organisation, il n'y a plus que ça pour gagner de l'argent. Il y a tant de groupes qui tournent. Mais la scène se porte très bien. Certains groupes datant des années 80 ne sont plus tellement crédibles, car il n'y reste plus qu'un ou deux membres fondateurs. Ce qui est sympa avec des groupes comme Europe, c'est que nous nous sommes rencontrés quand nous étions ados tous les cinq. Nous sommes aussi un groupe qui a fait son propre come-back, et pas seulement pour une tournée souvenir. Nous nous sommes réunis à nouveau pour tout recommencer, quatre nouveaux albums, c'est une nouvelle aventure, contrairement à d'autres, nous ne considérons pas notre public comme une vache à lait, vous comprenez ? Il n'y a pas beaucoup de groupes qui réussissent à faire ce que l'on fait, mais beaucoup qui essaient...

Il y a beaucoup de bons groupes originaires de Suède, on élève les enfants en leur faisant écouter du hard rock là-bas ?

Je ne sais pas, cela vient peut être de l'obscurité et de l'alcool réunis! Il y a peut-être quelque chose de particulier dans la culture suédoise, qui fait que les gens veulent exceller dans ce qu'ils font, ils veulent en mettre plein la vue aux autres, alors ils travaillent dur. Il y a sûrement quelque chose dans les gènes aussi, pour ce qui est du côté mélodique, et qui doit venir de la musique folk. Ce sont des choses difficiles à expliquer. Mais en tout cas ce n'est rien comparé aux Etats-Unis et à l'Angleterre, c'est de là bas que vient le rock.

Vous avez parlé de votre comeback, quand vous avez décidé de faire une pause en 1992, saviez-vous qu'elle durerait jusqu'en 2003 ?

Non. Nous avions joué pendant dix ans et nous avions enregistré cinq albums. On voulait faire une pause, et je voulais faire un album solo. Mais on n'a jamais dit qu'on arrêtait. Mais oui la pause a duré trop longtemps. Mais vous savez, certains d'entre nous avaient commencé à partir en tournée avec d'autres groupes, et John habitait toujours à L.A, où il était très occupé. Moi j'habitais en Irlande à l'époque, je passais mon temps à écrire. Mic et Ian sont d'ailleurs venus me voir là-bas plusieurs fois, on s'appelait toujours. On savait qu'on finirait par se réunir à un moment ou à un autre. John venait juste de terminer un album solo, il a aussi participé à un de mes albums solo.

Etes-vous toujours en contact avec Kee Marcello ?

Oui on l'a revu quelques fois, mais plus tellement ces derniers temps. Il habite à Göteborg, et les autres habitent à Stockholm. C'est assez loin. Moi je vis à Londres.

Alors ce comeback a été une renaissance pour vous?

Oui exactement. Notre amitié et nos relations n'avaient pas changé, mais musicalement nous voulions trouver un nouveau mode d'expression. Nous voulions changer notre manière de jouer et donner au groupe une nouvelle dimension, plus profonde. Parfois les choses n'appartiennent pas à un seul et même niveau. C'est important en tant que groupe de trouver différents angles d'approche et d'exprimer différents sentiments à travers notre musique et de retrouver dans ma voix, qui me permet d'exprimer différentes choses, de la douleur, et du blues... Tout ça vient de nos précédentes tournées et de nos albums, on n'aurait jamais pu composer "Bag of Bones" avant ça. Il faut avoir vécu pour écrire un album pareil. C'est ce qu'on appelle l'expérience.

Avant que nous parlions de votre tournée, je voulais reparler de votre concert au Hellfest. Je n'ai pas pu y assister malheureusement mais j'ai entendu dire qu'il fut un des meilleurs concerts de cette édition. Comment s'est passé le festival pour vous ?

Oui ça a été super. J'adorerais rejouer au Hellfest, c'était fantastique. Ca a été génial dans les coulisses aussi, nous avons croisé plein de groupes, comme Black Stone Cherry, John Sykes, et plein d'autres, C'était sympa de passer du temps avec eux. Ce concert a été fantastique parce qu'on ne savait pas à quoi s'attendre. C'était la première fois que nous participions à un tel festival. Un mois après, nous avons joué au  Bloodstock, au Royaume Uni, c'était aussi un festival metal, vraiment très heavy. Mais le Hellfest ça a été notre premier festival heavy. Nous avions participé à d'autre festivals auparavant, mais pas aussi importants que celui-là. Alors on ne savait pas trop comment ça allait se passer, mais quand on a commencé à jouer, le public des autres concerts est venu pour nous écouter, ils venaient de partout. C'était génial, on ne pensait pas que ça se passerait comme ça. Et cela nous a aussi rassuré en ce qui concerne le public français. Et on se rend compte maintenant que quand on joue à Strasbourg, Paris ou Lyon, des tas de gens viennent, et qu'il y a beaucoup d'enthousiasme en France. C'est même mieux qu'avant. Cela nous motive énormément. Donc oui, le Hellfest a été très positif pour nous...

Alors cela vous plairait d'y participer à nouveau en 2013 ?

Peut être. Nous n'avons pas encore eu de proposition à ce sujet, mais pourquoi pas.

Actuellement vous êtes en tournée pour promouvoir "Bag of Bones", comment cela se passe? Est-ce que vous avez apprécié votre soirée à Paris hier ?

Nous venons de terminer notre tournée en Italie et en Allemagne, Paris a été super. Nous aimons jouer à Paris. Les fans français nous ont toujours soutenu, et cela depuis le début. Nous allions beaucoup à Paris à l'époque, très souvent. Donc oui, ça a été un super concert.

Vous comptez partir en tournée aux Etats-Unis après ça ?

Nous l'espérons. Nous sommes toujours en quête de bonnes opportunités. Pour l'instant nous sommes en tournée en Europe, jusqu'au 21 Décembre, nous serons sur les routes jusqu'à Noël. Ensuite nous ferons une petite pause, puis nous ferons une tournée plus longue l'année prochaine, toujours en Europe pour "Bag of Bones". Et nous participerons à quelques festivals, de grands festivals. Et puis nous allons commencer à enregistrer des démos et à écrire notre dixième album qui devrait sortir en 2014.

Il y a quelques mois, vous avez sorti "Bag of Bones", tout d'abord pourquoi un tel titre ? C'est un peu mystérieux...

C'est un peu un mystère pour moi aussi ... [Rires]
Non, en fait j'étais à Londres, j'avais commencé à écrire et j'étais vraiment épuisé à cause des tournées, c'est là que je me suis dit : "je me sens comme un sac d'os", je me suis répété ça et puis j'ai commencé à en faire une chanson. Les paroles concernent surtout les émeutes qui ont lieu à Londres il y a quelques années. C'était le chaos dans la ville et j'étais là. C'était un peu effrayant pour mon jeune fils et tout le monde. Et c'est ce qui a donné : “my city lays in ruins…”. Donc oui cette chanson parle des émeutes de Londres et du fait que j'étais épuisé.

J'ai écrit une chronique pour cet album et j'ai vraiment apprécié, j'ai trouvé qu'il avait une touche de Led Zeppelin, qu'il était très vintage. Est-ce une comparaison qui vous plaît ?

Oui, je pense que pour composer cet album nous sommes allés puiser dans nos influences les plus profondes, celles de nos débuts. Parce que c'est quand tu es adolescent que tu découvres tes influences les plus importantes, celles qui t'accompagneront tout au long de ta vie. Tu les oublies un peu, tu avances dans la vie, puis elles finissent par toutes te revenir. Ca a été automatique pendant l'enregistrement de "Bag of Bones". Nous ressentions tous la même chose, même Kevin Shirley qui ne quitte pourtant jamais cet univers. Alors oui bien sûr c'est vraiment l'album ou on retrouve le plus d'influences de Deep Purple et de Led Zeppelin.

J'ai beaucoup aimé "Drink And A Smile", comment avez-vous eu l'idée de cette chanson ?

Nous avons écrit cette chanson vraiment très vite. Nous voulions avoir une chanson acoustique sur l'album, style année 70. Et j'ai composé ce riff, et Mic a eu plusieurs idées, alors nous avons tout mis en commun très vite et tout le monde à joué pour s'amuser, vraiment. Nous ne l'avons pas revue dans les détails, nous n'y avons pas beaucoup réfléchi. C'est pour ça que c'est une chanson si spontanée. Je l'aime beaucoup moi aussi. Dans les paroles à la fin il y a une référence à "Stairway to Heaven", quand je dis : “Laughter, I do remember what it’s like”. Et Robert chante quelque chose comme “Does anybody remember laughter?”.

J'ai beaucoup aimé le côté blues de cet album, ou du moins rock-blues, c'est un retour aux sources pour vous ?

Oui c'est vrai. Cela nous est venu naturellement. C'était quelque chose que nous voulions faire. Mais je pense que nous n'allons pas continuer à approfondir la chose, pour le prochain album. Nous essayons toujours de faire quelque chose d'un peu différent.

Vous avez parlé de votre collaboration avec Kevin Shirley qui produit des artistes tels que Black Country Communion. Pensez vous qu'il ait eu une grande influence sur cet album ? En quoi est-il différent des autres producteurs ?

Oui nous avions travaillé avec Kevin Elson, et d'autres encore. Kevin Shirley est plus spontané et rapide, il est plus intuitif. Tout est fait sur place, pour capturer l'énergie de l'instant. J'ai donc enregistré le chant dés que nous avons terminé la musique. Comme ça il était toujours dans son univers. Quand nous avons enregistré la musique nous avons fait quatre ou cinq prises puis nous avons choisi la meilleure. Et nous n'avons pas eu besoin de beaucoup d'arrangements. C'est donc un album très honnête, très spontané et sans retouches. Et c'est comme ça qu'il a l'habitude de travailler. Les autres producteurs comme Kevin Elson ou Beau Hill ou encore Ron Edison ont pour habitude de d'abord faire enregistrer la batterie, puis la basse, et ensuite les guitares, mais Kevin Shirley ne procède pas ainsi. Il veut capturer le maximum la musique telle qu'on la joue en groupe. Et ça nous a beaucoup plu, et je ne pense pas que nous allons réutiliser l'ancienne méthode. A partir de maintenant nous enregistrerons toujours de cette façon.

Il y a une autre chanson que j'aime beaucoup, intitulée "You’re Not Supposed To Sing The Blues" et j'aimerais savoir si elle est basée sur une histoire vraie ?

Peut être. Peut être aussi qu'elle raconte ce que nous avons vécu au fil des années. Nous nous sommes surpris nous mêmes en composant un tel album. Je veux dire avec autant de profondeur. Je ne nous en pensais pas capable avant d'entendre cette chanson. Bien sûr, il faut parler de l'endroit d'où nous venons. Vous savez, ce n'est pas le Mississippi. Mais ça fonctionne quand même.

Vous avez mentionné la crise de l'industrie du disque. Votre dernier album a t il du succès ? Avez-vous eu de bonnes critiques ?

C'est l'un des meilleurs. En tout cas selon les critiques et au vu du nombre de fans qui s'intéressent de nouveau à Europe. Cela nous permet d'élargir notre public, cela vient surement du fait que l'on associe le blues rock au rock classique et que cela attire des fans plus jeunes. C'est vraiment super.

C'est sûrement difficile de vendre des albums en ce moment, surtout quand on repense aux millions de copies de "The Final Countdown" que vous avez vendues. Ce n'est pas frustrant pour vous que tout le monde y fasse toujours référence. Est ce que cela vous arrive de souhaiter n'avoir jamais écrit cette chanson ?

Non, vraiment jamais. On n'en serait pas là aujourd'hui. Grâce à cette chanson nous sommes partis en tournée aux USA, au Royaume Uni, en France, en Allemagne, des pays importants pour la musique. Cela nous a ouvert de nombreuses portes. Pour nous c'est juste un titre sur un de nos albums, on ne considère pas cette chanson autrement.

Est-ce que vous aimez toujours autant vous produire sur scène ?

Oui, oui c'est super d'être sur scène.

Y-a-t-il un projet d'un des membres d'Europe dont vous souhaitez nous parler?

Oui, John Norum va enregistrer un album solo, il sortira l'année prochaine, entre deux albums d'Europe.

Nous vous remercions beaucoup et vous souhaitons un très bon concert à Lyon ce soir.

Merci !


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