Patrick Rondat

Interview date

16 Avril 2008

Interviewer

Yann G

I N T E R V I E W

A l'occasion de la sortie du déjà très controversé nouvel album de guitare/piano de Patrick Rondat, en duo avec Hervé N' Kaoua, Aux Portes Du Métal ne pouvait manquer l'occasion de discuter de ce nouvel opus avec notre guitar-hero national ! Un grand merci à Réplica et à Roger Wessier et bien sur, à Patrick pour le temps qu'il nous a accordé.

Merci Patrick de bien vouloir nous accorder cette interview pour le webzine métal http://www.auxportesdumetal.com
Tout d'abord, peux-tu stp nous présenter ton nouvel album d'adaptations de pièces classiques guitare/piano enregistré avec Hervé N' Kaoua ?

C'est un projet qui a commencé il y a un petit moment déjà. L'idée est venue de la rencontre avec Hervé et l'idée était d'intégrer la guitare électrique non pas dans un projet néo-classique ou dans une adaptation, enfin même si c'est une adaptation. L'idée, c'était de vraiment l'intégrer dans un concept réellement classique dans le jeu, dans le son, dans une approche un petit peu différente. Bien souvent, on a tendance à vouloir des grosses formations, des orchestres, des choses comme ça, ce qui est évidemment intéressant pour un artiste mais moi j'ai voulu un petit peu aller dans l'autre sens, aller vers une chose plus intimiste, plus proche de 2 musiciens simplement qui jouent ensemble. Ca a été enregistré live et on a cette sensation de 2 univers, de 2 mondes qui se rencontrent. C'est comme si tu avais un pianiste et un guitariste, ils s'assoient et ils jouent des pièces classiques. C'est un peu l'image que je voulais donner.

Ce projet te tenait à coeur depuis des années il me semble ?

Oui, ça fait au moins 3 ans que j'ai ça en tête mais bon, le temps de trouver les morceaux, le temps de répéter, le temps de travailler parce que c'est un boulot énorme musicalement, pas forcément uniquement technique mais dans l'approche musicale, dans le concept, dans le son, dans plein de choses. Je ne pouvais pas rester dans ma façon d'être habituelle, il fallait que je m'adapte. Hervé est un musicien classique uniquement, ce n'est pas un pianiste de jazz ou de rock, c'est vraiment un musicien classique. Donc lui avait une certaine exigence de certains trucs qu'il fallait respecter, non pas qu'il soit spécialement directif, c'est juste parce que je lui avais demandé qu'on aille au plus près possible de l'interprétation classique en gardant évidemment notre sonorité. Donc un compromis entre les 2.

Comment as-tu rencontré Hervé ?

J'ai fait une masterclass à Talence dans une école qui s'appelle "Arena Rock & Chansons". Ils nous ont fait venir séparément pour des masterclass et c'est en nous voyant tous les 2 faire une masterclass que Patrice, le directeur, a eu l'idée de nous faire rencontrer pour un évènement commun. On a donc fait une masterclass chacun séparément et puis à la fin, on a joué 2-3 pièces ensemble suite à une répèt' qu'on a eu l'après-midi. On se connaissait pas du tout auparavant. Vu le contact, vu la façon dont ça s'est passé aussi bien humainement que musicalement, je me suis dit que c'était intéressant pour moi pour avancer. Et même pour Hervé, je pense que c'est important pour un musicien d'arriver avec des choses un peu différentes, un peu nouvelles. Par exemple, cet album là, ce projet d'album tel qu'il est là dans la réalisation est un truc qui, à mon avis, n'a pas été fait. Y a déjà des gens qui ont joué des pièces classiques, des pièces qui ont été jouées par Uli Jon Roth avec des orchestres mais ce concept vraiment musique de chambre guitare électrique/piano n'a pas été fait. C'est pas souvent aussi bien pour un musicien que pour des auditeurs d'avoir des choses un petit peu nouvelles. Je trouvais la démarche intéressante de pas répéter systématiquement tout ce que je fais d'habitude. Evidemment j'envisage de refaire un album avec le groupe, ce n'est pas un tournant mais, à mon avis, c'est important dans une carrière d'avoir des éléments différents, ça fait partie des choses qui me tiennent à coeur et qui m'ont fait avancer musicalement.

Sur quelques forums, certains auditeurs comparent ton album avec l'album guitare/clavier de Jordan Rudess/John Petrucci, que penses-tu de cette comparaison ?

A part le côté guitare/clavier, la comparaison s'arrête là. Sur mon album, ce ne sont pas des compos, il s'agit de pièces classiques. Des pièces piano/guitare, j'en ai écoutées même avant Rudess et Petrucci, notamment avec Al Di Meola et Chick Corea. Même sur mon premier album solo, il y avait déjà des passages acoustique/piano comme "Paysages". J'ai déjà eu ce genre d'expérience mais le concept tel qu'il est est, à mon avis, différent. Là, on se retrouve confronté à une approche vraiment classique où il y a des variations de tempo, pas de métronome, il faut jouer avec des levées, pour les niveaux et pour le volume il y a beaucoup de nuances d'attaque. Ce n'est vraiment pas facile. Non pas que la comparaison avec eux me dérange, au contraire, c'est plutôt flatteur, c'est juste différent dans l'approche musicale à mon avis.

Comment avez-vous bossé avec Hervé pour adapter ces pièces ?

Hervé n'a rien adapté du tout dans le sens où il a joué la pièce de piano tel que. Le travail d'adaptation était principalement pour moi, c'est à dire de transcrire les parties de violon sur l'instrument, de trouver le son qui peut le plus possible s'accorder avec le piano. Ensuite, répéter avec lui car c'est vraiment une autre approche. Les gens, quand ils font des albums dans le rock ou dans le métal, utilisent souvent des sequencers ou des métronomes. Là, on est vraiment dans un contexte classique, l'interprétation dans le langage musical, dans le geste, ne serait-ce que le départ d'un morceau. C'est uniquement une gestuelle classique, on n'a pas un décompte de métronome, on n'a pas un batteur qui compte. C'est une autre approche dans plein de domaines. J'ai d'abord sélectionné les morceaux que je pouvais bien retranscrire à la guitare (ou que je pense "bien"). Après, évidemment, je demandais à Hervé son avis. On a donc sélectionné les pièces ensemble puis on a commencé à faire quelques répèts dès que j'avais bossé des pièces, voir ce qui allait, ce qui n'allait pas, ce qu'il fallait que je travaille, que je développe. Parfois j'ai été obligé de modifier les doigtés, les positions sur l'instrument, après j'ai modifié le son. Ca a donc été une démarche assez longue d'expérimentation.

Quelle est ta pièce préférée sur l'album et pourquoi ?

C'est difficile à dire. J'ai un petit penchant pour le Prélude et allegro de Kresler. C'est une pièce que j'avais déjà voulu bosser il y a quelques années et je m'étais un petit peu fait mal aux dents dessus. Je trouve qu'elle a tout : elle est à la fois baroque, moderne, lyrique par moment, technique, assez difficile à jouer. Je trouve que c'est une pièce vraiment intéressante. A côté de ça, il y a aussi l'Hiver de Vivaldi qui est une pièce magnifique, les sonates de Beethov... Je suis vraiment content des pièces qu'on a sélectionnées. Si je devais donc en choisir une, je dirais donc le Prélude et allegro de Kresler même si, au niveau des parties de piano, ça n'est pas la plus drôle.

Techniquement, as-tu rencontré des difficultés à faire ces adaptations ?

La difficulté n'est pas forcément là où on l'attend. Souvent, les guitaristes de métal qui s'attaquent à des pièces classiques comme j'ai déjà fait, s'attaquent à des pièces où il y a beaucoup de vitesse et de technique. Dans ces morceaux là, ça n'a pas été la principale difficulté. La difficulté a été la technique au sens classique du terme, c'est à dire ne pas uniquement jouer les très rapides mais respecter tout ce qui est écrit : la musique vraiment, la musicalité et puis les nuances... Ce n'est pas du tout comme jouer une pièce de Vivaldi sur un sequencer, ça n'a rien à voir. Le fait de jouer avec un musicien classique, avec un mec qui a l'oreille absolue, n'a rien à voir avec mon Presto sur Amphibia, non pas que ça ne soit pas bien. Mais musicalement, le défi n'est pas le même. Le travail technique ne m'a pas posé de problèmes mis à part sur quelques petites parties au niveau des doigts ou de la vitesse, c'est au niveau de l'exécution, dans le poids de chaque note qui doit être détachée. Chaque note doit être claire et c'est ça qui est difficile. Quand tu as une armée de doubles grosses caisses, des délais, des synthés, je ne dis pas que tu peux laisser des trucs mal joués mais là, c'est beaucoup plus difficile, ça requiert une vraie précision sur tout. Même si des choses sur cet album peuvent paraître simple comme la Sonate N°2 de Beethov qui est pourtant lente, quand tu dois la jouer avec toutes les notes qui sonnent, avec un son assez brut, c'est difficile. Donc techniquement ça a été difficile mais pas au sens habituel où on l'entend sur la vitesse.

J'ai l'impression que ta technique de l'aller-retour parvient vraiment à combler l'absence d'une grosse section rythmique. Es-tu d'accord avec ça ?

C'est lié à l'aller-retour. Quand tu joues avec un groupe, l'aller-retour donne en effet un côté rythmique au jeu. Quand tu as une basse/batterie, ça n'est pas forcément nécessaire. Là, c'est évident que le rythme c'est comme en classique, c'est l'articulation aussi bien du piano que de la guitare et la précision rythmique de chacun qui font la rythmique. Et ça, ça fait partie des choses techniques difficiles à réaliser. C'est clair qu'il y a des passages que je n'aurais pas pu jouer si je n'avais pas cette technique de l'aller-retour. Il y a des arpèges par moment qui doivent être joués de manière hyper détachée et hyper rythmique et il n'y a pas tellement d'autres solutions pour obtenir ce genre de détail.

C'est assez impressionnant, parfois on se retrouve à taper du pied sur du Vivaldi ou sur du Beethoven.

Oui, oui... C'est ça qui est difficile en fait. Tu t'aperçois d'avoir un vrai truc rythmique sans instrument rythmique uniquement par des instruments mélodiques, sans métronome, avec des passages qui sont parfois légèrement plus lents, parfois légèrement plus rapides parce que c'est écrit comme ça. C'est ce qu'on appelle l'articulation, c'est à dire que chaque phrase soit articulée comme quand tu parles. Quand tu joues, tout doit être hyper articulé. Ca a été un travail énorme mais qui m'apporte aussi bien maintenant quand je joue mes propres morceaux.

Envisagez-vous de faire une tournée française avec Hervé pour promouvoir cet album ?

Oui, ça me paraît évident. L'idée à l'origine c'était du live avant tout. C'est la première fois malgré tout que tu as vraiment quelqu'un du monde classique et quelqu'un du monde rock avec chacun son univers qui vont jouer ensemble des pièces classiques. En plus, à 2 pour une tournée, c'est plutôt facile à gérer sur scène, pas pour nous musicalement mais d'un point de vue technique. Sur les dates, on joue en acoustique pur, je suis amplifié mais sans sono, sans retour, on est vraiment dans une proximité de son. C'est une démarche vraiment intéressante et assez nouvelle. On envisage de tourner à partir de la rentrée, à partir de Septembre, avec une date parisienne suivie d'une tournée française. A mon avis, des dates, il va y en avoir. Il y a même des gens de conservatoires qui seront intéressés. On parle beaucoup de mélanger les musiques actuelles avec le classique, là, on est une espèce de pont entre les deux qui peut être intéressant, à mon avis, pour tout le monde.

La promo de l'album jusqu'à aujourd'hui (le 16 Avril) a été totalement inexistante. Quelle en est la raison ?

Il y a eu la complexité de sortir un album en ce moment, la complexité de trouver une maison de disques, et un petit clash de planning dans le sens où la promo va arriver un peu plus tard que la sortie. On va avoir la promo avant l'été et la tournée en Septembre-Octobre. Vers le 21 Mai, on a de la promo prévue avec pas mal de presse spécialisée, on doit faire France Inter, on doit faire des choses... Ca arrive juste avec un petit décalage. Guitar-Part, Guitariste, les trucs de métal vont faire des choses... C'est juste que ça a mis du temps pour se mettre en place.

Le fait qu'il soit classé chez les disquaires dans le bac "Métal" n'est-il pas un peu restrictif ? Le public d'Hervé ne risque-t-il pas de passer à côté de l'album en raison de cette classification ?

Il y a plusieurs raisons à ça. Déjà, quand tu fais un album et que tu souhaites être classée dans le classique, il y a 2 solutions. La première consiste à prendre un compositeur, tu ne fais que des sonates de Beethov et là tu es dans le bac Beethov. L'autre solution, c'est d'avoir des interprètes connus et même Hervé en classique n'a pas suffisamment de notoriété pour avoir un bac à son nom. On est donc pas classable en classique aujourd'hui. Le seul truc qui pourrait nous permettre de passer dans ce bac là serait qu'on ait de la promo, des articles dans des magazines classiques, des émissions de radio (Radio Classique)... On est en train de bosser là dessus. Pour l'instant, il n'y a pas eu suffisamment de promo pour que les gens du classique aient eu vent de cette histoire. On a aucune idée de la manière dont la presse classique va réagir, on peut aussi bien se faire massacrer que recevoir un super accueil. Mon nom dans le métal fait que l'album est là pour l'instant mais il est évident que j'aurais préféré qu'il soit ailleurs également.

Michel Petrucciani a joué sur "On The Edge". S'il avait été là aujourd'hui, aurais-tu aimé monter ce projet avec lui ?

Non parce que je voulais vraiment quelqu'un qui fasse uniquement du classique. Tu parlais de Jordan Rudess, lui a fait du classique, Manu, le claviériste dans mon groupe, a fait du classique... mais je voulais quelqu'un qui ne soit que là dedans. Quelqu'un d'autre, si je lui mets un coup de vibrato, quelque part ça ne va pas le déranger. Je voulais quelqu'un que j'arrive à déranger en faisant des choses qui sont pas dans l'esprit et je voulais quelqu'un qui, dans l'interprétation, arrive à me faire chier assez pour que ça soit le plus près du classique possible. En plus, par rapport à ce que je te disais tout à l'heure sur le fait d'aller jouer dans des conservatoires, lui, en ce moment, donne des cours au conservatoire de Paris, il participe aux jurys un peu partout, il a une médaille d'or à Bordeaux etc... Il a les diplômes et la crédibilité ce qui fait que si un jour on doit jouer dans un conservatoire, on ira pas dire "C'est un mec qui fait du rock mais qui a fait du classique". Il a un cursus qui fait que l'histoire est crédible et ça donne dans le son quelque chose de différent malgré tout. Car que ce soit Manu dans mon groupe, Rudess, ils sont monstrueux mais tu sens dans leur jeu qu'ils n'ont pas fait que du classique. Le son et l'attitude qu'a Hervé sur scène amènent une ambiance qui est directement classique. L'idée même tenait à travers ça.

Comment penses-tu que tes fans période "Rape Of The Earth" ou "Amphibia" vont réagir ?

Pour l'instant, ça se passe plutôt pas mal, je n'ai pas trop d'échos voire pas d'échos négatifs mais bon, de toute manière, il y en aura, ce qui est normal de toute façon. Il y a des gens que ça va décevoir sans doute. En même temps, on ne peut pas me demander de faire toujours pareil. Déjà, dans mes albums, aucun ne se ressemble. Il y a une lignée évidemment mais tu peux pas dire que mes albums se ressemblent. Au niveau du son comme des compos, il y a toujours des choses différentes. Et entre des albums "normaux" de Patrick Rondat, c'est important pour moi qu'il y ait des sursauts ailleurs comme il y a eu avec Jarre, comme il y a eu avec Elegy. Je suis attaché au fait d'avoir une discographie assez large. Par exemple, sur ma page MySpace, j'ai mis "World Of Silence" qui est un morceau acoustique de "Rape Of The Earth", le Presto, un morceau avec Hervé, un morceau avec Elegy, je trouve que ça ratisse large. Et en même temps c'est moi tout le temps. Je suis content du résultat de ce nouvel album, je l'ai fait sincèrement. Ca n'est pas parfait, il y a des petits trucs au niveau du son de guitare que je changerais maintenant mais qui étaient liés à des problèmes techniques de matos, notamment des bricoles sur la pédale volume. Il y a d'autres petites bricoles pas parfaites mais c'est aussi normal parce qu'il faut que j'avance dans ce domaine là. En tous les cas, je suis très fier de l'avoir fait et j'espère ne pas trop décevoir les gens. Mais je ne peux pas m'empêcher de faire un truc juste par peur de décevoir une personne et je ne peux pas refaire des "Rape Of The Earth" le restant de mes jours, d'abord parce que je n'y arriverai pas. Même si c'est un album dont je suis très fier, c'est une période de ma vie et c'est différent maintenant, voilà.

A propos du son, es-tu au courant de la polémique née sur les forums de guitariste.com suite à la mise en ligne d'une Sonate sur ton MySpace une sortie avant la sortie officielle de l'album ?

Non, j'évite d'aller sur les forums. Quand tu fais un album, il est fait, quoiqu'on en dise et quoiqu'on en pense, je ne peux pas revenir en arrière. Je n'ai pas envie de me faire du mal, de me semer des doutes là où il ne doit pas y en avoir. Sur le son, comme je te disais, il y a certainement des choses sur lesquelles je peux être d'accord avec certaines critiques, j'en fais déjà de mon côté.
Mais bien souvent, les gens se placent en auditeurs, ce qui est normal. Mais je te garantis que mélanger un piano avec une guitare électrique, ça n'est vraiment pas facile à faire. En plus, on a expérimenté un truc qui n'était pas évident. Le premier et le principal souci que j'ai est lié à la pédale volume, je suis obligé de jouer à la pédale volume parce qu'il y a tellement de nuances. Le problème de la plupart des pédales volume est que quand tu baisses, elles ont tendance à te moucher un peu d'aigu. Et donc sur certaines pièces sur lesquelles je joue avec la pédale volume, j'obtiens un son qui est un peu trop rond par rapport à ce que je devrais avoir. Il y a des moments où le son peut être un peu fermé sur certaines parties. Si c'est ça la critique, c'est vrai. Depuis, j'ai trouvé une nouvelle pédale volume et ça limite le problème. En même temps, ce qui était intéressant, c'était que ça ne donnait pas l'image de quelqu'un qui tourne un potard de volume, c'est à dire que je ne voulais pas donner l'idée qu'on a vite fait l'album, qu'on a tout joué à fond et qu'on a baissé par la suite, un peu comme on fait dans le métal. Là, non, pas du tout, on a quasiment fait toutes les nuances de volume en live.
Les gens ne comprennent pas car ils se disent que c'est différent du son que j'ai d'habitude mais si je mets le son que j'ai sur n'importe lequel de mes albums avec le piano, ça devient atroce, ça ne va pas du tout. De ma fenêtre, je trouve ça pas parfait mais je trouve ça plutôt pas mal.

Certaines personnes qui ont écouté l'album trouvent que le son de guitare est un petit peu en retrait par rapport au piano d'Hervé très en avant. Qu'en penses-tu ?

On me l'a déjà dit mais je n'y peux rien. Ce sont les pièces qui sont écrites comme ça. Je dois être derrière sur des passages, je dois être devant sur d'autres. Mais il y a des passages sur lesques je suis carrément devant. Les gens gardent le côté rock n' roll. Quand j'ai dû retranscrire certaines pièces de violon, j'ai dû utiliser les partitions, je n'arrivais pas à retranscrire à l'oreille parce que le violon était trop derrière le piano. C'est écrit comme ça, je n'y peux rien, là, il faudrait contacter Beethoven ... (Rires)

Envisages-tu un successeur à "An Ephemeral World" ?

Oui. Il risque même d'y avoir un successeur aux 2. Avec Hervé, on va tourner, on va rôder le truc, mais je pense sincèrement en refaire un autre avec d'autres sonates peut-être. Et bien sûr, j'envisage de faire un nouvel album avec le groupe.

Une idée de date de sortie ?

Non. Je n'ai pas commencé. J'ai des stocks d'idées mais je vais commencer à composer cet été pour le prochain album. J'aimerais bien l'enregistrer l'année prochaine.

Au niveau de tes projets solo, où en es-tu avec le Consortium Project et Elegy ?

Pour l'instant, ils m'ont proposé de faire le Consortium avec une tournée mais je n'ai pas voulu le faire. Entre le nombre de masterclass que j'ai et mes projets à défendre, je ne veux pas trop m'éparpiller.

Et avec Jean-Michel Jarre ?

Lui est sur une tournée très électro pour les 30 ans d'Oxygen, donc uniquement les 2 Oxygen. Sur scène, ils sont uniquement 3 avec les synthés. Il n'y a pas de date prévue dans l'immédiat avec l'orchestration complète mais je suis certain que ça se refera. Il est en ce moment dans le trip avec les vieux synthés mais je pense qu'on se recroisera sur une scène prochainement.

De nombreux excellents guitaristes français sont chroniqués et interviewés dans nos pages : Christophe Godin, Pascal Vigné, Manu Livertout, Kermheat, Victor Lafuente... Que penses-tu de tous ces musiciens et plus généralement de la scène guitaristique française ?

Tous ceux que tu viens de citer, je les connais bien. Pascal Vigné, Manu ou Kermheat sont des gens que je croise quasiment tous les mois au MAI, on se voit très souvent, on écoute de la musique ensemble, ce sont des gens pour qui j'ai énormément d'estime musicale. Pareil pour Godin, Christophe est un mec que j'apprécie particulièrement, qui a énormément de talent, on s'est souvent croisé, on a souvent fait des boeufs ensemble. Je trouve que ce sont des gens qui défendent vraiment l'instrument avec talent et avec une vraie personnalité. C'est plutôt bon signe, la guitare en France se porte bien, on a vraiment des gens d'un excellent niveau. Je suis très content d'avoir tous ces gens quotidiennement ou assez souvent dans mon entourage.

Pourquoi n'organisez-vous pas tous ensemble une grosse tournée instrumentale style G3 ou G8 ?

Je ne suis pas forcément pour faire un G8 parce que c'est difficile à gérer et après ça devient vite le bordel en terme de backline, de sondes... Mais disons que faire un G3 ou un G4, ça parait faisable. Souvent, le souci malgré tout est qu'on a un public qui est assez proche. Ce n'est pas parce qu'on sera plus nombreux sur scène qu'on aura plus de monde. D'un point de vue économique, ça fait beaucoup de frais à gérer. De toute façon, je serais intéressé par un tel projet. On en a parlé mais c'est pas évident, il faut trouver un moyen de le gérer.

2 de tes albums (Rape Of The Earth & Amphibia) sont chroniqués dans la catégorie "Back To The Past" sur notre webzine, section dans laquelle ne figurent que des albums de métal de légende. Ca te fait quoi de te retrouver aux côtés d'AC/DC, d'Iron Maiden, de Motorhead, de Devin Townsend, de Europe, de Guns N' Roses, d'Accept, de Dream Theater, de Pain Of Salvation ... ?

C'est un honneur d'être au côté des gens que tu viens de citer. Et ça prouve que ma musique n'est pas si ephémère que ça. Quand tu fais des albums dans lesquels il y a du travail et de la passion, ils passent la barrière du temps et ça reste pour moi le truc important. Tu as des gens aujourd'hui qui écoutent "Amphibia" et pourtant "Amphibia" a 12 ans d'âge. L'année prochaine, ça fera 20 ans que j'ai fait mon premier album et je suis toujours là. Je trouve ça bien que votre site ne s'arrête pas aux nouveautés. Personellement, je serais partisan de ne plus mettre de date sur les disques, je ne vois pas tellement l'intérêt de mettre une date sur un album : s'il est bien, il est bien ; s'il est pas bien, il est pas bien. Et s'il est bien, il est censé le rester. Je trouve ça bien que vous mettiez l'accent sur des albums qui ont amené des choses au paysage musical et qui n'ont pas vieilli.

Merci Patrick pour le temps que tu as bien voulu nous accorder.