Groupe:

Steven Wilson

Date:

06 Février 2018

Lieu:

Lyon

Chroniqueur:

dominique

Comment trouver une meilleure excuse qu’un concert pour braver les bouchons, le froid et la neige en se rendant à Lyon ? Cela faisait un certain temps que je ne n’avais pas revu Steven Wilson en concert et, malgré des impressions mitigées de son dernier album en date (To the Bone), j’avais réservé la date depuis un certain temps. C’est donc armé d’envie et de craintes que je me suis rendu au Transbordeur de Lyon. 2h30 (pleines) de concert après, je dois avouer que c’est largement l’envie qui a gagné la bataille. Le seul point noir de la soirée étant peut-être à signaler du côté d’un public un peu grincheux et légèrement amorphe (des places assises dans une salle de concert… on aura tout vu !).

Ce côté amorphe a, d’entrée de jeu, été pointé par Steven himself. En effet, surpris par la mise en route abrupte du concert (20h pile, un vrai watchmaker) et par l’intro vidéo destinée à se mettre dans l’ambiance, le public n’a pas vraiment porté attention à l’arrivée des artistes. Ceux-ci sont donc entrés sur scène dans le plus grand silence. Un petit couac repris avec un humour tout anglais de la part du maître des lieux. Après une bonne entrée en matière représentée par le trio du nouvel album To the Bone, Nowhere Now et Pariah (avec en prime la projection frontale de Ninet Tayeb qui accompagne Steven Wilson pour cette chanson sur le disque), Steven nous informe de la forme du concert : le groupe va faire un premier set d’environ une heure avant de faire une pause de quinze minutes. Le second set, un peu plus long, suivra avant un éventuel rappel. Nous voilà donc en place pour une soirée qui s’annonce sous les meilleurs auspices. Au total, une vingtaine de titres seront joués, dont à peu près la moitié sera extraite du nouvel album. De manière intéressante, le squelette des « anciens » titres fait la part belle aux chansons de Porcupine Tree (six titres), ne laissant que la place nécessaire à des titres devenus « incontournales en live » des albums Insurgentes, The Raven that Refuse to Sing, Hand Can Not Erase et du EP 4 ½. Le groupe, lui, reste stable. En plus du chanteur et multi instrumentaliste, Nick Beggs et Adam Holzman restent toujours fidèles respectivement à la basse et aux claviers. En plus de ce noyau dur, deux éléments semblent également avoir obtenu leur place permanente sur scène. En premier lieu, l’extraordinaire batteur Craig Blundell, qui a déjà souvent tourné avec Steven, ainsi que le non moins excellent Alex Hutching à la guitare avec sa casquette vissée à la tête.

Ce groupe talentueux va d’ailleurs avoir rapidement l’occasion de se mettre en valeur avec l’excellent Home Invasion / Regret #9 ainsi que le premier vieux titre des Porcupine Tree (The Creator Has a Mastertape). Ces titres laissent la part belle au groove, à des impros plus jazzy. Un régal ; tous les instruments mettent leur touche personnelle avec des mentions spéciales pour Adam et Alex. Après un bref échange avec le public durant lequel Steven explique que sa crainte des tueurs en série trouve sa prolongation dans tous ceux qui tuent pour leur religion (le nombre impressionnant des phobies du type expliquent certainement le côté très sombre de ses compositions), le groupe enchaine sur deux bons titres du dernier album, Refuge et People Who Eat Darkness. Le message de ce dernier est agrémenté par la projection de son clip malsain en toile de fond. Une constatation s’impose : pris individuellement, les morceaux qui composent To the Bone sont en fait très bons. La première partie se termine sur le majestueux Ancestral. Pour ceux qui aiment, c’est probablement l’un des plus grands titres à voir en live ; basse, guitares, claviers et batterie (allez voir le travail à la batterie de Craig Blundell sur ce titre sur sa page Facebook), tout y est parfait.

Après une pause qui m’a permis, à défaut de boire une bière, tout au moins de pouvoir m’approcher de la scène, le groupe reprend pour une seconde partie qui va progressivement laisser de côté les titres de To the Bone, pour des morceaux plus anciens. Le premier de ceux-ci, Arriving Somewhere bet Not Here, va mettre en place la période plus légère du concert qui est sur le point de commencer. Steven Wilson nous explique d’ailleurs que ses origines et ses orientations musicales prennent source dans son enfance. Pris entre un père plus proche du rock psychédélique style Pink Floyd et de Mike Oldfield et une mère plus pop disco type ABBA, Bee Gees et The Carpenter, il admet avoir depuis longtemps aimé la pop musique. Un amour qu’il dit mieux assumer avec le temps. Du coup, il avertit d’ailleurs que pour ceux qui, comme moi, ne sont pas fan de cette face de sa personnalité, il va y avoir une période moins agréable, mais qui aura l’avantage de ne durer que trois minutes. Le temps du passage de Permanating et ses tonalités brit pop, entre The Beatles et ABBA (définitivement pas ma tasse de thé). Vient ensuite le plus haché mais intéressant Song of I qui sera suivi par le nostalgique Lazarus. Le très typé Genesis The Same Asylum as Before fait la jonction entre la partie pop et une fin de set qui sera plus rock psychédélique. Heartattack in a Layby, Detonation, Vermillioncore et Sleep Together forment un montage cohérent. Cette construction, oscillant entre titres courts du dernier album et titres longs et musicaux plus anciens, passe bien en scène. Le temps d’une courte pause et Steven revient seul, toujours pieds nus, et avec un petit ampli portable. Guitare branchée, il donne une bonne version d’une vielle chanson de Porcupine Tree, Even Less, avant d’être rejoint sur scène par le groupe en entier pour l’excellent Harmony Korine et le triste et poignant The Raven that Refuse to Sing. Vingt-deux heures quarante-cinq, fin du concert, le groupe sort sous l’ovation du public.

D’une manière générale, si on sent que le groupe tâtonne et que certains automatismes ne sont pas encore en place (ce n’est que le quatrième concert de la tournée), il faut remarquer que les voix, elles, sont déjà bien réglées. Et même plus : par rapport aux concerts vus en 2014 et 2016, je trouve que l’ajout de Alex Huntchings en plus de Nick Becks pour les voix de fond des aigus, donne du volume et appuie parfaitement la ligne vocale de Steven Wilson. Oui, je regrette un peu qu’il n’y ait pas plus de chansons du Raven ou de ; oui il manque quelques classiques comme Index ou Routine ; mais franchement les nouveaux titres tiennent bien la route. Les voix féminines enregistrées des duos (Ninet Tayeb et Sophie Hunger) ne détonnent pas. Les nouveaux morceaux sont même plutôt une bonne surprise, à tel point que le concert m’a poussé à en avoir une écoute plus attentive. Quoi qu’il en soit, ce fut une belle soirée avec l’intime espoir que le groupe sera à nouveau de passage près de chez moi pour en profiter une nouvelle fois.

Pour finir je voudrais dire un grand merci ©Lukas Guidet pour m'avoir permis d'illuster le concert avec ses superbes photos.

 

Setlist de Steven Wilson :

To the Bone
Nowhere Now
Pariah
Home Invasion / Regret #9
The Creator Has a Mastertape
Refuge
People Who Eat Darkness
Ancestral
Arriving Somewhere but Not Here
Permanating
Song of I
Lazarus
The Same Asylum as Before
Heartattack in a Layby
Detonation
Vermillioncore
Sleep Together
Even Less
Harmony Korine
The Raven That Refused to Sing