L I V E R E P O R T

La soirée du 25 mai 2013 est de celles dont je garderai un souvenir précieux. Car se produisait ce soir-là, dans le cadre intimiste et chaleureux de La Maroquinerie, un artiste que je n'aurais loupé pour rien au monde : Zak Stevens et son groupe Circle II Circle. Ceux qui me connaissent le savent bien, je suis fan (et nostalgique) de Savatage. Et comme cette tournée célèbre l'album Edge Of Thorns, sorti par Savatage il y a tout juste vingt ans, joué en intégralité pour l'occasion, je ne pouvais décemment pas faire l'impasse. En plus, Circle II Circle se fait très rare chez nous, la dernière fois, il me semble que c'était en 2005 pour leur deuxième album (ils en ont sorti quatre autres depuis)... Cerise sur le gâteau : la première partie est assurée par les excellents Nightmare (cocorico) ! Cette tournée est également l'occasion (pour moi, en tout cas) de découvrir Eternal Flight (re-cocorico). C'est donc avec une excitation certaine que je me suis rendu à ce concert... Excitation pas forcément partagée par un grand nombre de personnes vu la minuscule assemblée de fans présente au moment où Eternal Flight entre sur scène. Sérieusement, on doit être une vingtaine dans la salle... ça fait de la peine. Mince, je sais bien que Savatage n'a jamais explosé chez nous (marque de fort mauvais goût de notre part, soit dit en passant) et que Circle II Circle n'a pas l'aura d'un grand groupe mais quand même, je ne m'attendais pas à ça... J'ai rarement vu aussi peu de monde pour un début de soirée. Et pourtant, malgré mes sérieuses craintes (concernant l'ambiance, notamment), cette soirée allait s'avérer géniale.

C'est donc en me fondant dans ce tout petit comité que je découvris les Français d'Eternal Flight. Je n'avais jamais entendu une seule chanson de ce groupe mais leur power metal rythmé et musclé passe plutôt bien sur scène. Les musiciens ont un niveau technique indéniable. Le son n'est pas forcément hyper clair, on ne distingue pas très bien la voix du chanteur ou toutes les subtilités mélodiques développées par les guitaristes, mais l'ensemble a la pêche et cette première partie passe assez vite sans provoquer l'ennui, au contraire. 

Le groupe se donne bien dans cette ambiance de concert privé et fait preuve d'un entrain qui fait plaisir à voir. Quelques personnes dans l'assistance ne cachent pas leur enthousiasme et l'ambiance, vu le contexte, est franchement bonne. Gérard, le chanteur, remerciera d'ailleurs chaleureusement le public. Au rayon des anecdotes, Bill Hudson, guitariste de Circle II Circle viendra même faire un petit tour dans la fosse, bière à la main, histoire de soutenir les Français. Sympa. Comme ça, pendant quelques instants, nous sommes passés de vingt spectateurs à... vingt-et-un !! C'est énorme !

Après cette mise en bouche sympathique, c'est au tour de Nightmare d'investir la scène de La Maroquinerie. Et là, quelle claque !! Le son est fort (mais pas forcément équilibré, on y reviendra) et l'ambiance tout bonnement excellente. Il faut dire qu'entre-temps, d'autres fans ont débarqué... rien d'affolant cependant. On doit maintenant être une bonne quarantaine (allez, disons même une cinquantaire) dans la salle. 

Cela dit, cinquante ou cinq-cent, franchement... difficile de faire la différence. Nightmare se donne à fond, comme si La Maroquinerie était pleine à craquer. Et le public présent le lui rend bien. Ces gars-là sont des pros, la scène, ils connaissent, ils maîtrisent, et en plus, ils ont un capital sympathie indéniable. 

Les Grenoblois sont fiers de leur dernière production, The Burden Of God, et ils ont bien raison, du coup c'est évidemment cet album qui se trouve privilégié dans la setlist. Le concert commence avec deux titres extraits de cet opus : The Preacher et Sunrise In Hell. Très bon démarrage, bien carré, qui met tout le monde d'accord. Si le son est puissant, on regrettera tout de même que les guitares se fassent un peu manger par la batterie qui couvre l'ensemble. D'ailleurs, quand à la fin du concert, je me retourne vers un ami, le sourire aux lèvres, pour lui dire : "Voilà, maintenant tu connais Nightmare !", celui-ci me répond : "Ouais, enfin je connais surtout la batterie de Nightmare."
C'est pas faux... Mais pas totalement vrai non plus. Il aime bien exagérer, mon pote... En fait, quand la musique se fait mid-tempo, ça passe plutôt pas mal mais il est vrai que quand le propos se fait plus agressif et rapide, il devient moins évident de tout distinguer. Alors de ce point de vue-là, ce n'est certes pas parfait, mais c'est bien tout ce qu'on pourra reprocher à ce set énergique et puissant.

Jo Amore est toujours un excellent frontman doublé d'un vocaliste hors-pair. Yves, à la basse, est très présent et sollicite régulièrement le public. Les guitaristes sont un peu plus discrets mais très efficaces. Matt fait quelques grimaces pour les photographes, quant à Franck, il a l'air plus concentré... mais pas au point d'oublier le headbanging de rigueur sur les passages costauds (et il y en a !). Quant à David, frère de Jo, il maltraite sa batterie dans les règles de l'art... Il sera d'ailleurs vanné par son frère qui expliquera qu'il est rare qu'il ne casse pas un truc sur sa batterie quand il joue. David, en toute simplicité, répondra qu'il aime bien casser les couilles aussi...

Le concert passe comme une lettre à la poste (promis, je vais faire un travail sur moi pour essayer de limiter ces expressions d'un autre siècle dans mes live reports) et, pour couronner le tout, les Grenoblois nous gratifient d'une excellente reprise de Heaven And Hell de Black Sabbath. Classe.

Le public a bien acclamé les Nightmare tout au long de leur set et ils s'est fait remercié à plusieurs reprises par un groupe visiblement content. Voilà, comme quoi, on peut être une cinquantaine et faire la fête quand même ! Très honnêtement, j'ai récemment assisté à d'autres concerts où l'ambiance était bien moins remarquable alors que nous étions bien plus nombreux...

Setlist Nightmare :

01. The Preacher
02. Sunrise In Hell
03. Eternal Winter
04. The Burden Of God
05. Children Of The Nation
06. Cosmovision
07. The Gospel Of Judas
08. Crimson Empire
09. Heaven And Hell

Et maintenant, passons à la dernière partie de cette soirée. Place à la magie. 

On savait que Circle II Circle allait nous jouer du Savatage. On savait qu'ils allaient jouer Edge Of Thorns en entier. Mais de là à imaginer qu'ils allaient directement commencer par cet album... J'avoue que je trouve le concept un brin curieux. Ils ont quand même un nouvel album sous le coude (le bon Seasons Will Fall sorti en janvier dernier) et ils commencent leur concert par treize reprises de l'ancien groupe de Zak. D'un point de vue promotionnel, on peut s'interroger quant à l'efficacité de cette démarche... Je dirais même que c'est quelque part un peu triste. Certes, Circle II Circle n'a pas l'envergure de Savatage, mais tout de même, ce groupe est loin d'être ridicule et il a quelques très bons albums (et excellentes compos) à son actif. Mais il a sans doute compris que les fans étaient plus intéressés par le glorieux passé de Zak que par son présent. Cela ressemble à un aveu d'échec et ça fait un peu de peine... mais laissons ces considérations de côté car, ce soir, mine de rien, et malgré la faible affluence (on a peut-être maintenant atteint la centaine de chevelus), c'est la fête !

Pas de surprise donc, niveau setlist, une fois la magnifique Edge Of Thorns lancée, c'est tout l'album qui suit. C'est l'occasion de se remémorer à quel point ce disque est grand. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que les musiciens présents ce soir lui rendent un bien bel hommage. A commencer par Zak, bien sûr, très en voix et qui retrouve un chant peut-être un peu plus subtil et classieux que sur certains albums récents de Circle II Circle. Les autres musiciens ne sont pas en reste et nous font le show à l'Américaine. Ils bougent, se chargent des choeurs et ont l'air hyper enthousiastes. Du coup, le public, déjà acquis à la cause du groupe, joue le jeu, applaudit, acclame, chante... Rien à redire, on passe un grand moment.

Allez, on râle quand même un peu, pour la forme ? Un tout petit peu alors... C'est bien parce que je suis français (et hop, un beau cliché en passant). Il n'y quasiment rien à redire sur le son, il est bien meilleur que celui des premières parties. Fort, clair, il met en valeur à peu près tout le monde. Le seul bémol concerne la guitare de Bill Hudson qu'on entend, mais pas tout à fait autant qu'on le souhaiterait sur les solos. Celle de son compère Christian Wentz est plus avantagée. Voilà, c'est tout. Non, il y a autre chose... Une fois la partie Savatage terminée, on attend quand même des chansons de Circle II Circle, une petite sélection de morceaux choisis pour assurer la promo du nouvel album et montrer que Zak a fait de bonnes choses après Savatage... On attend donc, et on en aura... deux. Deux ? Vraiment ? Oui. Vraiment. Mince alors. Diamond Blade et Epiphany, toutes deux extraites de Seasons Will Fall, superbement exécutées et convaicantes sur scène, constitueront donc la conclusion d'une soirée magique mais un tout petit peu frustrante. Ah, si le groupe avait pu jouer plus d'une heure et vingt minutes... Mais bon, il faut savoir apprécier ce que l'on a. Le plaisir d'écouter des morceaux de Savatage rarement (ou jamais) joués sur scène comme He Carves His Stone (malheureusement amputé de son magnifique solo final), Degrees Of Sanity, Damien, Miles Away, tous plus fantastiques les uns que les autres, ça n'a pas de prix. 

Quand la soirée s'achève, Zak a l'air heureux et surpris de l'accueil chaleureux reservé par les Parisiens (eux mêmes visiblement ravis). Il nous dit même qu'on se reverra bientôt, qu'il n'attendra pas aussi longtemps pour revenir jouer chez nous, parce que nous sommes incroyables... Qu'on aimerait le croire ! Mais soyons réalistes, vu le nombre de personnes ayant fait le déplacement ce soir, rien ne semble moins sûr. J'espère me tromper... En tout cas, j'ai passé une excellente soirée et m'accrocherai à ce souvenir. Si cela ne devait pas se reproduire, je pourrai toujours dire : "j"y étais".

Setlist Circle II Circle :

01. Edge Of Thorns
02. He Carves His Stone
03. Lights Out
04. Skraggy's Tomb
05. Labyrinths + guitar solo
06. Follow Me
07. Exit Music
08. Degrees Of Sanity
09. Conversation Piece
10. All That I Bleed
11. Damien
12. Miles Away
13. Sleep
14. Diamond Blade
15. Epiphany

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