Marillion + Aziz

Date

18 Janvier 2012

Lieu

Paris

Chroniqueur

Didier

L I V E R E P O R T

« Contre vents et marées », c’est l’expression consacrée quand mère Nature transforme un plan relativement simple en véritable épreuve. Le plan simple consistait à profiter d’une mission professionnelle sur Paris de trois jours pour finir le vendredi soir au Trianon et assister à un des deux concerts sold-out de Marillion. L’épreuve fût la météo plutôt défavorable qui transformera la capitale en station de sports d’hiver désorganisée. Le quartier de Pigalle avait une drôle d’allure quand j’arrive enfin sur place. Les déplacements, même piétons, sont des plus délicats, c’est l’enfer sur la route, mais aussi sur les trottoirs. Pourtant il en faut plus pour décourager le fan de Marillion, beaucoup plus même, et je découvre une longue file qui attend l’ouverture des portes dans des conditions climatiques proches de celles de l’Antarctique. C’est la délivrance quand nous pouvons enfin rentrer dans le magnifique théâtre parisien. C’est la première fois que je pénètre dans cette salle et les boiseries, les balcons font que l’ambiance y est vraiment chaude, idéale pour un concert de Marillion en tout cas. Les deux niveaux de balcons se remplissent lentement mais sûrement, les deux dates, celle-ci et celle du lendemain sont sold-out de toute façon. Dans la fosse qui commence aussi à bien se remplir, les gens discutent et parlent musique bien évidemment. Nous remarquons de suite la présence de Mark Kelly et un technicien, affairés sur un ordinateur contrôlant les claviers, et qui semble leur donner du fil à retordre. Alors que la lumière s’éteint et que Aziz, le guitariste anglais s’installe sur scène, Mark et son compère restent sur scène et continuent d’œuvrer. Ça semble déjà suspect.


Je ne connais pas Aziz Ibrahim, Anglais d’origine Pakistanaise, et on peut dire que son style est relativement original. Sorte de world music guitar hero, il n’est accompagné sur scène que par Dalbir Singh Rattan, un joueur de tabla (percussions) assis en tailleur, par terre. Aziz quant à lui, arbore des guitares semi-acoustiques de toute beauté. Une première avec des lumières bleues dans le manche, une seconde, onze cordes (?!) à laquelle, nous explique-t-il en l’accordant il manque une corde, ce qui rend l’accordage plus laborieux. Ca le fait marrer, il semble avoir beaucoup d'humour. Il nous explique qu’il est très content d’être là car il devait au départ ouvrir pour Steven Wilson, avec qui il bosse pas mal, mais qu’il n’a pas obtenu de visa pour les US donc n’a pu l’accompagner. Il rejoint donc ses potes de Marillion sur la tournée européenne (il a bossé sur les albums solos de H).

Il utilise sa guitare avec une boucle (loop) qui lui permet de jouer lui-même plusieurs couches de guitares. Ça rend assez bien sur un premier morceau acoustique assez progressif de pratiquement quinze minutes. Ca le fait marrer encore, il explique qu’à ce rythme-là, ils ne vont jouer que deux morceaux. Son percussionniste est assez impressionnant, il tire de ses quatre ou cinq petits fûts des sons incroyables, amplifiés par des micros. Aziz toujours avec beaucoup d’humour annonce un morceau sur son père qui voyait d’un mauvais œil son fils se tourner vers le rock’n’roll et ses excès. Et bing, encore quinze minutes ! Avant d’attaquer un dernier morceau sur ses amis d’enfance qui ont apparemment tous mal tournés, il présente son ami Dalbir Singh Rattan, explique que c’est le batteur que tout le monde lui envie et que les Mike Portnoy, Gavin (Harrison), et autres stars n’ont qu’à bien se tenir. Après un petit solo de tabla, et un dernier morceau, ils remercient et quittent la scène, vite nettoyée du coup. L'audience a l'air d'avoir apprécié sa prestation atypique. Sur le facebook de l'artiste, il explique que les CD sont partis en deux jours, c'est plutôt bon signe.


Setlist de Aziz :

Morassi
Middle Road
The Other Side


Là commence une attente en peu stressante, car on comprend qu’il y a un soucis technique, toujours du côté de Mark Kelly et de son ordinateur récalcitrant. Le concert devait commencer vers 20h00, avec un couvre-feu imposé par la salle à 22h30. C’est un peu débile quand même d’avoir ce genre de règle dans une salle de la capitale, mais bon. Finalement les lumière s’éteignent vers 20h45, et tout le monde pousse un "ouf" de soulagement.

Je suis bien placé à quelques mètres seulement de la scène, mais hélas derrière quelques grands (grrrrr !), devant Steve H et Pete Trawavas. Le groupe attaque par Gaza, un des petits bijoux du dernier album, Sound That Can’t be Made, qui a pas mal fait discuter et polémiquer. Le son est bon mais pas parfait (voix un peu forte, basse aussi, peu de claviers, pas assez de guitare). Dès la première seconde, on comprend que Steve H est en grande forme. Il a revêtu une sorte de combinaison blanche, avec un gros logo "peace & love" sur le ventre et il se défonce sur les lignes de chant de ce morceau épique. Il grimace, il pleure presque sur le petit break fantastique de ce morceau. La vache ! Cette petite vidéo donne une vague idée. Ca ne fait pas dix minutes qu’ils ont commencé et déjà, nous avons les premiers hérissements de poils. Faut dire que les deux Steve font la paire, ils sont passés maitres dans l’art de l’arrachage de larmes et du déclencheur de frissons, tantôt avec un passage de voix, tantôt avec un solo fabuleux. En tout cas c’est un superbe début. Marillion avait annoncé deux soirées, et deux setlists différentes. D’ailleurs beaucoup de gens autour de moi sont là pour les deux soirées, chose que malheureusement je ne pouvais faire. Après ce long morceau, Steve explique que ce n’est pas une chanson contre Israël, mais contre ce « putain de monde » qui a mené à la situation actuelle. Ils entament ensuite Ocean Cloud, qui est aussi un (très) long morceau plutôt calme et planant comportant de nombreux breaks et changements de rythme. Autant je trouve le morceau intéressant et je suis content de le voir figurer au planning de la soirée, autant je le trouve assez mal placé, car il ne permettra pas à l’ambiance de vraiment décoller. On est tous béats et admiratifs, certes, mais ça ne bouge pas beaucoup (forcément) dans la fosse. Dommage. Steve abandonne sa tunique et continue de faire son show. Quel dépense d’énergie, quel jeu de scène, il semble possédé.

Marillion

Derrière lui, caché derrière son set, Ian Mosley, casqué, yeux fermés, assure ses plan de batterie avec une précision chirurgicale. C’est aussi le cas de Pete à la basse et de Mark que je trouve toujours en retrait même si le son s’améliore au fur et à mesure. Steve R, comme à son habitude, ne bouge pas d’un millimètre, et fait jaillir de ces doigts ces mélodies et ces solos qui font la renommée de MarillionNeverland est encore un très long morceau, clairement un choix a été fait envers les morceaux épiques. Neverland est toujours d’une efficacité redoutable. Steve est toujours un chanteur fabuleux, multi-instrumentiste. Il alterne un peu de piano (peu sur ce concert j’ai trouvé), une rythmique de guitare supplémentaire ou juste un tambourin. Neverland est encore un monument d’émotion, alternant entre un Steve guitariste qui vous crucifie de somptueux solos et un Steve chanteur qui se sort les tripes. Le break où il fait son propre écho est juste un moment magique. Un autre passage qui m’a beaucoup touché, est celui de Man Of Thousand Faces. C’est un morceau plus vif, que déjà j’aime beaucoup, mais qui en live se révèle d’une efficacité redoutable.

Marillion

Marillion

Plusieurs fois Steve R et Steve H se parlent à l’oreille, Steve H le prend à la rigolade mais Steve R semble lui se rappeler le couvre-feu et le fait qu’ils sont à la bourre. Résultat des courses, la setlist prévue sera amputée de plusieurs morceaux. Quelle guigne ! J’envie ceux qui pourront voir le concert du lendemain. D’après le forum Inside The Web, le concert était bien plus long, mieux réglé, mieux équilibré côté setlist, et avec une bien meilleure ambiance. Dommage, mais faut se contenter de la chance d’avoir pu être à cette date déjà.

Marillion

Marillion

Pour le final ils attaquent Warm Wet Circles, un long morceau de l’époque Fish, que je n’avais jamais entendu par Steve (ou j'ai oublié). Si le morceau est fabuleux, son solo de guitare génial, je suis un peu déçu par la nonchalance de Steve qui expédie un peu son chant et oublie même certaines paroles. Pas très sympa pour des vieux comme moi, qui avons vu le morceau chanté en live et parfaitement par Fish.  

Voilà c’est fini, avec un petit sentiment d’inachevé. La sensation d’être allé voir la première partie d’un film dont je savais pertinemment que je ne pourrais pas voir la seconde. Une petite déception aussi par la petite ambiance et la setlist un peu molle de ce soir. Déçu aussi par les problèmes techniques idiots, qui ont raccourci le concert prévu. Quand je lis sur le forum que la setlist du second soir comportait : Sugar Mice, Kaileigh, Voice From The Past et 3 Minute Boy, j’ai un peu les boulasses. Quand je lis qu’à Milan, sans contrainte de 22h30, ils ont aussi eu droit à un second rappel avec Easter et Three Minute Boy, j’ai les méga-boulasses. Déçu enfin par quelques erreurs et oublis de paroles qui contraste avec l’image de perfection que colporte habituellement Marillion.

Dehors c’est apocalyptique, la neige a recouvert la capitale et Pigalle a pris des airs de station de ski. Il est l'heure d'attraper mon télésiège : retour à l'hôtel, en espérant que les pistes d'Orly seront dégagées demain matin.


Setlist Marillion :

Gaza
Ocean Cloud
Pour My Love
Neverland
Power
Sounds That Can't Be Made
The Sky Above The Rain
The Great Escape
Man of a Thousand Faces
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Warm Wet Circles



Marillion

Marillion

Marillion

Marillion

Marillion

Merci à Nicolas Laverroux pour ses superbes clichés.

 

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