Quand on aime Armored Saint, il ne faut pas être trop pressé. En effet, Punching The Sky est le huitième album des Américains dont les débuts remontent à 1982... on a connu plus prolifique ! On leur pardonne, le principal est qu'ils sont toujours là, avec un line-up inchangé depuis leur excellent Symbol Of Salvation paru en 1991, motivés par la seule envie de faire de la bonne musique quand l'envie et l'inspiration sont de la partie (l'aspect "carriériste" de leur aventure ayant été abandonné depuis un bon moment déjà). Et on leur pardonnera d'autant plus facilement cette attente dans la mesure où il y a une chose que l'on retient clairement à l'écoute de Punching The Sky : tel le bon vin, Armored Saint vieillit (très) bien et nous livre un de ses albums les plus solides.

Le quintet a de l'expérience et un son immédiatement identifiable. Ce sont d'ailleurs encore Joey Vera et Jay Ruston qui ont produit et mixé la bête et la qualité du son est comparable à celle de Win Hands Down sorti il y a cinq ans. Ca, c'est la première bonne nouvelle. La seconde, c'est qu'Armored Saint, malgré son identité indéniable, que l'on retrouve avec plaisir ici, s'amuse encore à distiller quelques petites surprises ci et là et ne s'interdit pas de jouer la carte de la variété (je ne parle pas de "variétoche" mais bien de diversité, hein). Ainsi, Punching The Sky célèbre toutes les différentes facettes que l'on a pu aimer chez le groupe depuis ses débuts tout en incluant deux ou trois petites nouveautés. Et ça commence dès la première chanson, Standing On The Shoulder Of Giants, qui démarre avec une intro celtique sur fond de cornemuse... avant de proposer une montée en puissance très progressive, avec une atmosphère bien travaillée. Le premier couplet n'arrivera d'ailleurs pas avant une bonne minute quarante-cinq. Le refrain, très mélodique et bien écrit, marque des points. Ca commence très bien. Mais pas de façon aussi directe ou percutante qu'avec le titre Win Hands Down sur l'album du même nom, c'est vrai. Patience, dès la deuxième piste, End Of The Attention Span, on retrouve un heavy plus costaud, agressif, concis et terriblement efficace. Cette compo est encore plus réussie que la précédente et prouve que le Saint n'a pas laissé son savoir-faire en matière de heavy au vestiaire ! Les guitares de Sandoval et Duncan sont toujours impeccables (les jolis solos sont de la partie), la basse de l'excellent Vera parfaitement audible (et volubile)... Et bien sûr, n'oublions pas John Bush, intouchable, sur lequel le temps qui passe ne semble pas avoir d'effet. Le chanteur a beau avoir cinquante-sept ans, sa voix reste au top. Ca fait plaisir !

Des sonorités modernes introduisent Bubble qui se révèle être un titre très efficace au moment de son refrain enlevé (faisant suite à un couplet mid-tempo bien heavy et groovy à la fois). En parlant de groove, c'est la basse qui mène la danse sur l'intro de My Jurisdiction alors que Do Wrong To None démarre avec des percussions suivies d'un riff bien puissant. Ce dernier titre s'inscrit bien dans ce qu'Armored Saint fait depuis son retour en 2000 en mélangeant parfaitement tradition et modernité. Si vous voulez des morceaux plus traditionnels qui vous rappellent le heavy parfois speedé tel que les Américains le pratiquaient dans les années 80, il faudra vous tourner vers les très réussies Missile To Gun et Never You Fret (qui contient l'un des riffs les plus chouettes de la galette et réintroduit la touche d'exotisme perçue sur la première chanson, avec de la flûte amérindienne en intro). Encore deux super compos qui figurent parmi mes préférées de l'opus. Entre-temps, on aura eu le droit à un titre plus hard rock dans l'esprit, qui ferait un très bon single, avec un super refrain bien catchy (et des chœurs assez surprenants, qu'on ne s'attendait pas forcément à entendre sur un album d'Armored Saint), ce titre s'appelle Lone Wolf et c'est un de mes coups de cœur. Il y a même une compo plus apaisée et planante, Unfair, belle ballade (absolument pas gnan-gnan) sur laquelle Bush est impérial.

Avec Punching The Sky, Armored Saint s'est fait plaisir, ça se sent, ça s'entend. Il a également pensé à tout et devrait, avec son heavy racé qui fait mouche, régaler aussi bien les aficionados des premières heures que ceux qui ont une affection particulière pour Symbol Of Salvation ou leurs productions plus récentes. L'écriture est de qualité (on ne s'ennuie pas et la plupart des compos durent entre quatre et cinq minutes), tout comme la production, ça joue très bien et l'ensemble se révèle de plus en plus attachant au fil des écoutes (la première d'entre elles laissera peut-être quelques auditeurs en attente de gros hits immédiats sur leur faim, mais il faut y revenir, la musique du quintet étant un peu plus subtile qu'elle en a l'air). Le Saint ne devrait donc pas décevoir ses fans qui, s'ils lui demandaient "Can you deliver?" (vous saisissez la référence, j'espère), se verraient sûrement répondre avec un large sourire aussi confiant que triomphal : "Yes, we can!". Bien joué, messieurs... et à bientôt, dans mon top de fin d'année !  

Tracklist de Punching The Sky :

01. Standing On The Shoulders Of Giants
02. End Of The Attention Span
03. Bubble
04. My Jurisdiction 
05. Do Wrong To None
06. Lone Wolf
07. Missile To Gun
08. Fly In The Ointment
09. Bark, No Bite
10. Unfair
11. Never You Fret