Artiste/Groupe:

Blind Guardian Twilight Orchestra

CD:

Legacy Of The Dark Lands

Date de sortie:

Novembre 2019

Label:

Nuclear Blast

Style:

Musique Symphonique

Chroniqueur:

Florentc

Note:

18/20

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L'arlésienne. Voilà comment pourrait être surnommé ce Legacy Of The Dark Lands. Eh oui, le voilà enfin l'album orchestral de Blind Guardian ! Maintes fois annoncé et maintes fois repoussé, il ferait presque passer Chinese Democracy des Guns'N'Roses pour un enfant prématuré ! Concrètement, le groupe travaille sur ce projet depuis une vingtaine d'années, avant l'enregistrement de Nightfall In Middle EarthD'interview en interview, je guettais LA question qui allait être posée sur ce fameux projet. Mais à chaque réponse la déception : le projet était repoussé. Enfin bref, le voici enfin. Mais gare à ceux qui ne connaissent pas encore ce concept : il s'agit d'un projet purement orchestral, avec l'orchestre philarmonique (le Filmharmonic de Prague) seulement accompagné de chœurs et de la voix de Hansi Kürsch. Point d'instruments de metal, donc. C'est pour cette raison que pour l'occasion, le groupe a été rebaptisé en Blind Guardian Twilight Orchestra, seuls Hansi Kürsch et André Olbrich ayant participé à l'écriture de cette œuvre. Nous parlions juste avant de Nightfall In Middle Earth (mon album préféré du groupe, au passage), et ce Legacy Of The Dark Lands possède pas mal d'analogies avec ce dernier. En effet, les deux racontent une histoire basée sur la fantasy / fantastique, avec un bon nombre d'interludes et narrations. D'ailleurs, pour la petite histoire, ce sont les mêmes acteurs qui interviennent sur les deux albums. C'est prometteur ! L'histoire est ici une suite directe de l'œuvre littéraire The Dark Lands de Markus Heitz. Ce dernier et le groupe ont travaillé ensemble afin de donner vie à cet album en proposant une cohérence d'ensemble, entre les écrits et la musique par dessus.

Une petite introduction et une narration entament cette œuvre ô combien cinématographique, avant que débute le premier "vrai" morceau : War Feeds War. D'emblée, on pense à un film sombre, et le fantôme de Danny Elfman n'est pas bien loin. L'orchestre est impressionnant et fourmille de détails. Chaque instrument est parfaitement mis en lumière et a son importance au sein de la composition. Et Hansi dans tout ça ? Il semble possédé et chante avec une conviction dingue. Clairement, on sent qu'il n'est pas là pour cachetonner mais en raison d'une passion indéfectible ! Si l'ensemble se veut assez sombre, on retrouve tout de même des éclaircies comme sur Dark Cloud's Rising. Un morceau qui peut faire penser au Seigneur Des Anneaux (quel hasard !) par son côté bucolique. Tout le long de l'album on va côtoyer le bon et le très bon, comme sur The Great Ordeal, sûrement la plus grande réussite du disque ! Superbe, l'ambiance dégagée par ce morceau est unique et l'absence de metal ne se fait absolument pas sentir. Il y a tellement de puissance qui se dégage de l'orchestre (aaaahhh ces cuivres...) et de la voix du père Hansi... ils se suffisent à eux-mêmes. Une pépite.

In The Red Dwarf's Tower est un autre exemple de composition superbe. Titre ultra théâtral, on sent Hansi s'amuser comme un enfant à jouer avec les chœurs (les "SOLOMON SOLOMON SOLOMON!" scandés sont tellement cinématographiques) et l'orchestre (le hautbois, le triangle, la clarinette, clairement on perçoit une inspiration du Pierre Et Le Loup de Prokofiev là-dedans). Il module sa voix comme il ne l'a jamais fait auparavant (écoutez simplement Point Of No Return pour vous en convaincre), et avec une aisance déconcertante. Jamais il n'aura été si théâtral. Bien évidemment, si l'album se veut être une bande originale de ce qui pourrait être un film, comme indiqué un poil plus haut, l'inspiration des compositeurs classiques est bien présente. La fin de Treason pourra ainsi faire penser aux travaux orchestraux de Benjamin Britten (notamment le sublime The Young Person's Guide To The Orchestra). Autre inspiration évidente : les compositeurs de musique de films. Les références les plus criantes sont Danny Elfman cité plus haut, Howard Shore et Maurice Jarre (certains passages de Point Of No Return ont des allures de Lawrence D'Arabie je trouve). Parmi toutes les compositions, une vous semblera familière. Eh oui, Harvester Of Souls n'est autre que le titre At The Edge Of Time présent sur Beyond The Red Mirror... en version orchestrale forcément ! 

Cette chronique aura vraiment été compliquée à réaliser. L'œuvre est tellement à part et tellement dense qu'il est difficile de donner une note et trouver des écrits qui puissent rendre hommage à tout ce boulot réalisé. Le travail est COLOSSAL et on comprend aisément que le groupe ait pris son temps pour tout finaliser tant cette entreprise est complexe à mettre en place. Rarement un orchestre aura autant été si bien utilisé (fort heureusement d'ailleurs étant donné qu'il est quasiment seul à bord !) et la palme revient bien entendu à Hansi Kürsch qui marque encore de son empreinte le monde du metal. Mais quelle voix ! Quelle puissance ! Quelle finesse ! Arriver à un tel résultat sans le groupe derrière a dû être un travail monstrueux ; mais écoute après écoute, il paraît évident que le mariage est on ne peut plus réussi. Malgré toutes ses qualités évidentes, ce Legacy Of The Dark Lands est difficile à aborder et à appréhender. Le fait de ne pas avoir de base metal pourra poser problème à certains fans et c'est parfaitement compréhensible. On peut se perdre et trouver ça ennuyeux (pour ceux n'écoutant ni musique classique ni bandes originales de films), il est sûr que certains passeront leur chemin (ce qui est fort dommage vu la qualité de l'œuvre et le travail). Et je vous avoue que malgré toutes ces qualités, je me dis que le même album avec la guitare, la basse et la batterie en plus, ç'aurait fière allure, et ça manque un peu... mais cela rendrait cet opus moins unique qu'il ne l'est dans cette configuration.

Je voulais revenir également sur les interludes. S'ils sont indispensables à la cohérence de l'ensemble et permettent une immersion aux petits oignons, à la longue il paraît évident que la plupart des gens écouteront l'album en les zappant. Le groupe le sait et ne s'est pas trompé en proposant tout bonnement en CD bonus l'album sans interludes (soit douze titres au lieu de vingt-quatre, tout de même). Et ça passe tout seul dans cette configuration... donc ce qui peut paraître comme un défaut ne l'est plus. Que dire de plus ? Ce Legacy Of The Dark Lands est un must, à écouter au casque à de nombreuses reprises pour en cerner tous les atouts. Clairement, l'apogée de ce qu'ont pu entreprendre Hansi Kürsch et André Olbrich durant toute leur carrière. Ils peuvent être fiers et regarder devant eux dorénavant. L'esprit sûrement libéré d'avoir accouché d'un tel bébé, on a maintenant hâte de découvrir de quoi sera fait le prochain "vrai" album du groupe. 

Tracklist de Legacy Of The Dark Lands :

01. 1618 Overture
02. The Gathering
03. War Feeds War
04. Comets And Prophecies
05. Dark Cloud’s Rising
06. The Ritual
07. In The Underworld
08. A Secret Society
09. The Great Ordeal
10. Bez
11. In The Red Dwarf’s Tower
12. Into The Battle
13. Treason
14. Between The Realms
15. Point Of No Return
16. The White Horseman
17. Nephilim
18. Trial And Coronation
19. Harvester Of Souls
20. Conquest Is Over
21. This Storm
22. The Great Assault
23. Beyond The Wall
24. A New Beginning
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