1992. Stupéfaction dans le petit monde du Thrash : l’excellent batteur de Slayer, Dave Lombardo, quitte la formation
américaine. Une page se tourne, en même temps que la période la plus prolifique et
la plus inspirée du groupe… Trois ans plus tard parait Power Of Inner
Strength, premier album de Grip Inc., le groupe formé par ce même
Dave Lombardo. Pas mal de fans du batteur l'attendaient, ce disque...
On a
souvent résumé Grip Inc. comme étant le projet de Dave
Lombardo. En un sens c’est évidemment pas faux mais c’est très
réducteur. Car ça passe sous silence l’autre fondateur du groupe, le talentueux
Waldemar Sorychta, guitariste et producteur de renom (Lacuna Coil, Tiamat, Moonspell, Samael, Sentenced et j'en passe...). Et il ne faudrait pas oublier que
c’est lui qui signe (à une exception près) toutes les musiques du groupe, sur ce
premier album mais également sur les trois suivants. Lombardo co-signe
seulement trois des titres de ce premier album ainsi que l’instrumental
d’introduction. L’association Sorychta / Lombardo, on en avait
eu un aperçu plus que prometteur l’année précédente sur
l’album de Voodoocult avec le titre Born Bad And Sliced
qu’ils avaient composé ensemble. Et donc, pas de mauvaise surprise avec ce premier album,
le groupe propose exactement ce que ce premier morceau nous avait promis. D’autant plus
qu’ils ont choisi un chanteur, Gus Chambers, dont la voix aux relents punk
n’est pas sans rappeler celle de Phillip Boa, l’instigateur du projet
Voodoocult qui chantait sur cette première collaboration... Une sorte de
préquel à Grip Inc., quoi.
L’album débute
donc sur le fameux morceau instrumental composé par Lombardo. Véritable
démonstration technique au titre hispanique, sans doute un clin d’œil à
ses origines (pour rappel, Lombardo est d’origine cubaine), avec groove et
feeling, histoire de rappeler à tout le monde à qui on a affaire ici, au cas où
certains l’auraient oublié (ou ne seraient pas au courant mais ça, j’ai du
mal à y croire : ceux qui ont chopé cet album à sa sortie savaient
forcément qui était le monsieur derrière la batterie). Une des premières
choses qui frappe, c’est le son. Enorme. Avoir un producteur de talent sous la main dans son
groupe, ça aide. Sans transition, on enchaîne avec le premier morceau, Savage
Seas : riff laminoir, matraquage rythmique. Le troisième pilier de ce groupe, le
chanteur Gus Chambers (compositeur de tous les textes) décoche ses premiers
mots et immédiatement, on se dit que ça le fait ! Sa voix est puissante, agressive,
assez éloignée des stéréotypes du thrash et c’est très bien
comme ça. Elle colle parfaitement à la musique délivrée par le combo.
D’ailleurs, Lombardo, avec ce nouveau groupe, ne cherche pas à faire du
Slayer même si évidemment, pas mal de monde fera le lien à cause
de sa présence. Il s’agit ici d’un thrash enrichi d'influences diverses, nettement
plus moderne que celui que propose Slayer avec son dernier album en date à
l’époque (Divine Intervention). Les riffs ne sont pas construits sur le
même modèle, les solos ne sont pas aussi chaotiques que chez Slayer, ils
sont même ici plutôt limpides et mélodiques quand ils existent (Guilty Of
Innocence, Ostracized). Car oui, voilà une autre différence de taille : les solos
de guitare, il n’y en a pas forcément sur chaque morceau. Ils sont même
plutôt rares. Et puis, on ne peut pas ne pas remarquer quelques influences indus
disséminées ici et là (Monster Among Us, Longest
Hate).
Après, si
on tient vraiment à faire une comparaison avec Slayer, c’est sur un
titre comme Hostage To Heaven qu’on peut la faire, qui est sans doute le morceau qui
ressemble le plus à du Slayer au niveau du riff. Titre énorme au
passage, avec un Lombardo qui nous régale ! Il y aura bien un ou deux autres
passages qui vous y feront un peu penser également (sur Colors Of Death ou
Heretic War Chant par exemple), normal, ça reste du thrash. Mais à part
ça, des titres comme Savage Seas, Monster Among Us, Innate Affliction ou
Ostracized, on n’en trouve pas chez Slayer. Grip
Inc., dès ce premier album, possède sa propre personnalité. Tout
n’est pas joué à fond les ballons, on trouve notamment pas mal de morceaux bien
lourds (Ostracized, Monster Among Us, Cleanse The Seed). Comme les titres sont
essentiellement rythmiques, c’est le festival du riff percutant. Mais la guitare ne bouffe pas
tout l’espace : percussions et basse sont bien présentes et parfaitement audibles dans le
mix (Innate Affliction, Longest Hate). Un vrai bonheur ! Au final, on a un album de
thrash moderne, dynamique, groovy, qui nous confirme tout le bien que l’on pensait de
Dave Lombardo et qui nous révèle les talents de compositeur et
guitariste de Waldemar Sorychta et de chanteur de Gus Chambers (sans
oublier le bassiste Jason Viebrooks qui a eu un rôle plus discret dans la
composition de cet album mais dont la basse se fait largement entendre, comme précisé
plus haut).
Pour un premier album, c’est la réussite totale. Dix titres
décapants (et une intro originale), une production soignée, une interprétation
sans faille… Grip Inc., un groupe qu’il allait falloir suivre de
près, c’était déjà une évidence. Et pas seulement parce
qu’un certain Dave Lombardo se trouvait derrière les fûts.
Le groupe sera l'auteur de trois autres réalisations, très recommandables
également.
Tracklist de Power Of Inner Strength
:
01. Toque De Muerto 02. Savage Seas
(Retribution) 03. Hostage To Heaven 04. Monster Among
Us 05. Guilty Of Innocence 06. Innate Affliction 07.
Colors Of Death 08. Ostracized 09. Cleanse The Seed 10.
Heretic Warchant 11. Longest Hate
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