Artiste/Groupe:

Mastodon

CD:

Emperor Of Sand

Date de sortie:

Mars 2017

Label:

Reprise Records

Style:

Sludge Progressif

Chroniqueur:

Didier

Note:

17.5/20

Site Officiel Artiste

Autre Site Artiste

Je ne suis probablement pas le plus qualifié des chroniqueurs du site pour m’occuper de ce septième album du groupe originaire d’Atlanta. En effet, je ne les ai vraiment découverts qu’assez récemment, lors de leur passage au Hellfest en 2015. Pour un groupe âgé de dix-sept ans, ça n’est pas glorieux, je l’avoue, alors depuis j’essaye de rattraper le temps perdu. Alors, du côté de la formation, c’est plutôt stable et on retrouve Troy Sanders à la basse, Brent Hinds and Bill Kelliher aux guitares et Brann Dailor à la batterie. Pour ce qui est du chant, le groupe est assez atypique car Brent, Troy et Brann alterne le job de chanteur avec même, dans de nombreux morceaux, un chant partagé, l’un assurant le couplet, l’autre le refrain. C’est pas forcément facile à comprendre sur l’album mais on s’en rend bien compte en live. J’ai eu la chance de pouvoir assister à leur prestation à Nashville, Tennessee, pour la tournée de Emperor of Sand. Brann le batteur assure dans le dernier album beaucoup de chant, et c’est assez impressionnant de le voir chanter tout en assurant ses plans de batterie complexes et atypiques. Le groupe a expliqué que ce nouvel album tourne autour du thème d’un personnage banni par un empereur, et qui se retrouve à voyager à travers un désert et à essayer d'y survivre C’est en fait une métaphore sur le cancer, et l’annonce d’un cancer en phase terminale à un patient. Le groupe a été triplement impacté par la cancer (la femme de Troy, la mère de Brann et la mère de Bill récemment décédée et à qui l'album est dédié) depuis Once More 'Round the Sun sorti en 2014. Tout ça n’est pas folichon, et si on ajoute à cela le combat de Bill pour se débarrasser de ses soucis d’alcoolisme, on comprend de suite que le ton de cet album n’est pas à la fête mais plutôt à l’introspection.

Du côté des compositions, je dois dire que l’album est assez impressionnant, avec très peu de moments faiblards (en ce qui me concerne). J’accroche un peu moins à Clandestinity et Andromeda par exemple, mais sur onze morceaux, tout cela reste bien ficelé. A la production, le groupe a décidé de refaire appel à Brendan O’Brien, qui avait déjà transcendé l’album Crack the Skye (2009), que la plupart des fans considèrent comme le chef d’œuvre du groupe. Pour le reste, on est dans le tout bon. L’album attaque avec un son très particulier de cymbales, sur l’intro de Sultan’s Curse. L’alternance des voix couplet/refrain est particulièrement réussie. Brann qui a commencé à sérieusement assurer des parties chant que depuis Crack the Skye est à la fête sur cet album. Sur les cinq premiers morceaux, c’est vraiment lui qui assure les lignes mélodiques avec un chant clair très sympa. Show Yourself est un tube radio potentiel (aux US bien sûr), trop facile pour eux.

J’aime aussi beaucoup sa façon de chanter sur Previous Stone, le refrain et le couplet. Là encore ses plans de batterie sont impressionnants et pour l’avoir entendu en live on se demande comment il arrive à assurer chant et batterie de ce niveau : c’est simple, il n’arrête pas ! L’apothéose au niveau du chant de Brann est certainement celui de Steambreather. Assez haut, pas mal de reverb, il assure grave et le riff mid-tempo lourd de basse/guitare fait de ce morceau une véritable tuerie. Les guitares viennent nous chatouiller les tympans à plusieurs reprises. C’est un des meilleurs moments de l’album. Sur Roots Remains, Brann assure le chant aigu du refrain, alors que Brent assure la voix plus rugueuse. Il assure le chant sur un superbe break, accompagné de cloches. Le solo qui suit est excellent, le final de piano assez solennel. C’est bien fait tout ça, dites-moi. C’est marrant, quand j’entends le chant du premier couplet de Word to the Wise, je pense au dernier album de 7Weeks, A Farewell to Dawn. Je n’avais jamais réalisé cette influence auparavant. J’aime encore bien ce morceau, plus alambiqué du côté des guitares, avec encore un refrain chanté par Brann alors que Troy assure le couplet d’une voix plus agressive. Ancient Kingdom qui suit est un de mes morceaux préférés, avec un joli boulot des guitares et un jeu énorme de la batterie. Le refrain défonce tout, là encore les cloches sont à la fête (et d’habitude ça me gonfle) et c’est Troy qui le chante. On remarque un étrange passage de claviers psychédéliques sur Clandestinity. Il y a un chanteur invité sur Andromeda, en la personne de Kevin Sharp (Brutal Truth), le morceau contraste refrain en chant clair très accrocheur avec un couplet plus agressif, un exercice que le groupe maitrise totalement sur presque tout l’album. Un autre invité apparait sur Scorpion Breath, puisqu'on trouve le chanteur de Neurosis, Scott Kelly. On retrouve plutôt car il avait déjà prêté sa voix à certains morceaux du groupe depuis l’album Leviathan. L’album se termine par un excellent morceau, plus posé, Jaguar Gold, qui démarre en guitare acoustique, voix planante, avant de petit à petit se réveiller et s’accélérer. On y trouve beaucoup d’harmonies vocales, qui me font penser à du Opeth. Le solo de guitare final est classieux et l’éclat de rire terminal, glaçant.

Alors, la question que vous vous posez tous, c’est certainement si cet album peut bousculer le statut de chef d’œuvre de Crack the Skye ? Alors n’étant pas un fan des premières années, je dirais que oui. Je lis même certains articles dans la presse US comme quoi Emperor of Sand serait l’équivalent pour Mastodon du Moving Pictures de RUSH. Bon, ça me touche car je suis fan de RUSH (et de Moving Pictures), bien sûr, mais aussi car je trouve que Mastodon (et pas MastodonTE, comme je l’entends souvent prononcé par les fans français) a quelque chose d’assez progressif dans sa musique qui causera sûrement au fan du trio canadien. Certains fans de la première heure auront certainement plus de mal à déboulonner leur chouchou, mais dans tous les cas, Emperor of Sand est une pièce musicale à posséder et à décortiquer de toute urgence. Le contenu est d’une richesse incroyable et chaque écoute apporte un peu plus de compréhension à la démarche. Si ce n’est pas le nouveau chef d’œuvre, ça sera pour sûr celui d’une très grande maturité. Bravo !



Tracklist de Emperor of Sand :

01. Sultan's Curse
02. Show Yourself
03. Precious Stones
04. Steambreather
05. Roots Remain
06. Word To The Wise
07. Ancient Kingdom
08. Clandestiny
09. Andromeda
10. Scorpion Breath
11. Jaguar God