Le voili, le voilou. L'album le plus vendu dans le monde du Metal (et pas que – il paraît que c’est le CD le plus vendu de ces vingt dernières années), l'album qui a fait connaître le nom de Metallica à l'ensemble de la planète (même en France, incroyable !), l’album que l’on adore ou que l’on déteste. L’album de la trahison ou de l’évolution. Ce qui est sûr, c’est qu’il n’est pas passé inaperçu.

Trois ans après un And Justice for All qui, sans avoir déçu, avait laissé tout de même un petit sentiment de moins bien parmi les fans de la première heure, voilà que débarque cet album sobrement intitulé Metallica et sobrement illustré (il sera d'ailleurs rebaptisé rapidement "le Black Album" en raison de sa pochette). Et avec cet album, c'est un Metallica transformé qui nous apparaît.
Transformé, c'est le moins que l’on puisse dire. Il faut se resituer dans l’époque et se rappeler que les fans du groupe (il y avait moi dans le tas), qui attendaient cet album de pied ferme en cet été 1991 (trois ans d'attente quand même !) ont eu une sacrée surprise. Eh oui, à cette époque, on ne pouvait pas écouter des extraits voire tout un album sur internet avant sa sortie. Et donc, à la première écoute, j'avoue, je n'ai pas bien compris ce qui se passait (et je ne fus pas le seul dans ce cas-là). Metallica, les inventeurs du Thrash, n'en jouaient plus. Le premier morceau, Enter Sandman et son riff entêtant donne la nouvelle direction musicale du combo. Terminés les débuts d’album en speederie intense (Hit The Lights, Fight Fire With Fire, Battery et même Blackened). Metallica prend un virage heavy que l'on n'avait pas vu venir (encore que, avec le recul, des titres comme Harvester of Sorrow ou même The Thing That Should Not Be nous y préparaient). Metallica sur le terrain de Black Sabbath. Oui, lourdeur est le maître mot de ce Black Album. Sad But True, Wherever I May Roam, Don’t Tread On Me, The God That Failed sont d’une lourdeur implacable. Mais se révèlent aussi être de très bons morceaux de Metal, très bien écrits. Et c'est là que Metallica a fait fort. Car si l'album ne m'a pas franchement plu lors de sa première écoute, une fois la surprise passée (et après s’être définitivement fait à l’idée que ce n’était pas un album de Thrash), on découvrait des morceaux vraiment excellents et d’une puissance phénoménale. Des morceaux qui, en live, sont tout simplement énormes.
Metallica sort ni plus ni moins qu’un grand album de Heavy Metal. Les morceaux sont construits sur des riffs costauds. Les solos de Kirk Hammett sont toujours aussi inspirés. On découvre un James Hetfield qui a appris à poser sa voix, à la moduler. Les rythmiques sont solides, ça reste bien agressif (Through The Never, Of Wolf and Man, Holier Than Thou, The Struggle Within). Metallica reste Metallica. Oui, ce n’est pas parce que les Mets ont fait appel à Bob Rock (Mötley Crüe, The Cult, Bon Jovi, Aerosmith) pour produire l’album que la musique du groupe lorgne vers le Hard FM ou le Glam, on en est très loin. Le groupe ne s’est pas vendu, quoi que certains aient pu en penser. Tiens, le son, puisqu’on parle de la production, est quand même un cran au-dessus de celui de Justice for All, même s’il est encore un peu trop sec à mon goût. La batterie de Lars Ulrich est très en avant mais claque un peu trop. Par contre, le son des grattes est bien plus gras. Et cette fois-ci, on entend la basse de Jason Newsted, aux abonnés absents sur l’album précédent. Jason qui, pour la seconde fois seulement (et pour l’avant-dernière fois), est crédité sur la composition d’un morceau (My Friend Of Misery).
En fait, le point sur lequel le groupe va être principalement critiqué par les fans de la première heure, c’est à propos des ballades… enfin surtout, de la ballade Nothing Else Matters. Car Metallica en a déjà fait, des ballades. The Unforgiven reste tout de même assez pêchue dans l’ensemble, même si elle ne possède pas une partie speed comme les précédentes. Mais Nothing Else Matters… Violons, guitares acoustiques, James tout en douceur… le drame ! De plus, le morceau va faire un carton en single, comme quelques autres (Enter Sandman et The Unforgiven notamment) et malheureusement, dans le monde du Metal, le succès commercial est synonyme de trahison. C’en est trop pour une partie du public de Metallica.
Indéniablement, avec cet album éponyme, en ne proposant pas ce qu’attendait son public, Metallica a perdu un certain nombre de ses fans. Mais ils en ont gagné tellement en échange qu’à mon avis, ils s’en sont un peu foutus.

Si cet album a eu une influence sur la scène Metal ? Pas qu'un peu. Faites une liste de tous les groupes de Thrash qui ont sorti, après ce Black Album, un album plus heavy, moins marqué par des rythmiques rapides. On parlera d’ailleurs du "syndrome Black Album" pour ces groupes.
Metallica, les ténors du Thrash Metal devenaient d’un seul coup les ténors de la scène Metal dans son ensemble. La tournée monstrueuse qui allait suivre allait placer Metallica en tête des plus grosses machines du Metal en live. Tournée immortalisée par le triple album, Liveshit, Binge and Purge. Live sur lequel on se rend bien compte de l’efficacité des morceaux de cet album sur scène.

Le "Black Album" marque une rupture évidente avec les premiers albums du groupe. Le Thrash ne ressurgira qu’avec Death Magnetic en 2008. Les deux albums suivants (Load et Reload) resteront dans ce créneau musical mais sans posséder le côté génial des compositions de celui-ci. Toutefois, Metallica ne tournera jamais le dos à son passé en live car le groupe sait que son public vient aussi pour entendre les vieux morceaux. Le savant mélange des titres thrash avec les morceaux heavy du Black Album, c’est la recette miracle de Metallica en concert. C’est d’ailleurs ce qui permettra au groupe de continuer de proposer des tournées énormes et des concerts déments avec pourtant des albums très moyens.
Alors, vous ne faites pas encore partie des trente millions de personnes qui possèdent déjà cet album ?

Tracklist de Metallica :

01. Enter Sandman
02. Sad But True
03. Holier Than Thou
04. The Unforgiven
05. Wherever I May Roam
06. Don't Tread On Me
07. Through The Never
08. Nothing Else Matters
09. Of Wolf And Man
10. The God That Failed
11. My Friend Of Misery
12. The Struggle Within