Artiste/Groupe:

Molybaron

CD:

Molybaron

Date de sortie:

Octobre 2017

Label:

Indé

Style:

Hard Rock

Chroniqueur:

Didier

Note:

17.5/20

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[Mode Enervé: On]
On a vraiment un problème en France avec le rock et le metal ! On a des studios, on a des groupes, excellents, nombreux, mais inconnus ou presque, qui produisent des petits bijoux dans l’indifférence totale de tous. On dit que la France n’est pas une terre de rock : foutaise ! On a des musiciens, des compositeurs, des producteurs. Ce qu’on n'a pas, c’est un public ! Vous, moi, nous quoi ! Personne dans les petites salles de concert, personne pour acheter des CD, personne pour essayer de découvrir autre chose que les éternels Trust ou Telephone. Quelle tristesse ! De voir que Gojira est plus connu à l’étranger que dans son propre pays, que les groupes se défoncent, innovent, que des disques sortent, ne passent nulle part en radio, nulle part en télé et restent complètement confidentiels malgré leur potentiel artistique indéniable. Le public metal, vous, moi, n’est pas non plus exempt de reproche. Souvent accroché à ses bons vieux groupes repères, préférant leur n-ième album sans surprise à la fraicheur des nouveaux venus et au final rarement ouverts à de la nouveauté surtout, surtout... si c’est français. Je dirais même qu’il y a un certain snobisme de la scène rock/metal française. C’est exactement comme avec le tourisme. On préfère partir à l’autre bout du monde, alors qu’on ne connait rien de son propre pays, par ailleurs destination numéro un des étrangers (ça n’est pas vraiment le cas du rock par contre...)
[Mode Enervé: Off]

Donc voilà, je vous propose de découvrir un autre groupe français (franco-irlandais pour être précis) : Molybaron. Le groupe formé en 2014 sort son premier album qui s’appelle juste Molybaron, entièrement auto produit (bravo les labels qui ne servent à rien, surtout pas à découvrir des nouveaux talents !). Le groupe est composé de Gary Kelly (chant/guitare), et c’est donc l’Irlandais de la bande, de Steven André (guitare), de Sébastien de Saint-Angel (basse) et de Raphaël Bouglon (batterie). A noter que Raphaël n’est pas le batteur sur l’album, il est arrivé après, et sur l’album c’est un batteur de session de Nashville, Chris Brush qui a enregistré les plans de batterie en suivants des enregistrements midi de boite à rythme. En parlant de galère pour trouver le bon batteur, le groupe a aussi galéré pour trouver un chanteur puisque, à la base, Gary était juste guitariste, mais lors d’une répète il s’est découvert être un excellent chanteur, qui depuis a donné une véritable signature sonore au groupe (et un accent anglais irréprochable). Voilà pour les présentations. Au niveau du son, c’est superbe. Enregistré dans le home studio de Gary (sauf pour la batterie donc) et mixé par Alexey Stetsyuk en Bielorussie. Eh oui, étonnant, mais le gars a proposé ses services, montré ce qu’il pouvait faire du son, et les Molybaron ont immédiatement adoré son boulot et parle même de retravailler avec lui pour l’album suivant. Et tout ça entièrement réalisé à distance.

Côté textes et pochette (Gary est par ailleurs graphic designer, donc il s’est aussi occupé de ça), on voit de suite qu’on est en présence de chansons qui essayent de passer des messages, ou au moins de dresser de sombres constatations sur nos dépendances aux médias, aux télés qui nous bouffent le cerveau (cf le type dans sa chaise sur la pochette qui se fait happer). Ca cause aussi de peurs, d’apocalypse, de solitude, bref c’est sombre, mais c’est beau, profond et bien écrit. Côté compo c’est du grand art. Avec dix morceaux assez différents mais tous excellents qui ratissent ultra large au niveau des influences. Chacun y retrouvera sûrement des choses de sa jeunesse, des bouts de rock des années 90 (le chant de Gary qui sonne comme du Brian Molko de Placebo, en plus bas, croisé avec Serj Tankian de System Of a Down, en plus calme). Du Led Zep, du Thin Lizzy, du Talking Heads, du Muse, du Red Hot Chili Peppers, on entend un peu de tout ça en écoutant les dix morceaux de ce premier album, mais surtout on entend une réelle originalité dans le projet musical. Et ça ça fait plaisir.

Dès les premières mesures de Fear Is Better Business Than Love, on est saisi par la basse de Sébastien et la voix de Gary. C’est du gros son côté quatre cordes, ça vrombit, ça défonce tout sous les coups de médiator. Les guitares de Gary et Steven enfoncent le clou, avec de longs sustains qui accompagnent Gary et son « taste of cyanide ». On en aurait presque le goût dans la bouche. Le son (Rickenbacker ? ou Explorer ?) de la basse est encore plus puissant (ça ne semblait pas possible) sur Moly, le morceau suivant (refrain à la Placebo), vraiment excellent. Chris, le batteur de session, a fait du très bon boulot, j’ai hâte d’entendre ce que Raphaël aura apporté. C’est aussi ce morceau qui a été choisi pour le premier clip :


Ce sont les riffs des guitares qui propulsent le morceau suivant, Let’s Die Together. Mais quand elles s’arrêtent pour laisser Gary et sa voix trafiquée, c’est encore une basse surpuissante qui porte le morceau. C’est lourd, et c’est excellent. Dance, qui suit est un superbe morceau, très original, côté tempo, assez saccadé sur le refrain, plus posé sur le couplet. Le refrain est très accrocheur, on ne ressort pas indemne d’une telle tuerie. Pour se calmer, voilà Sleep Leaves This Place, bien chanté, plein d’émotions. Ca repart de plus belle avec On The Other Side et son rythme syncopé ainsi que son couplet plus calme. J’adore le morceau The Apocalypse Shop qui aurait pu être sur un album solo de Serj Tankian, c’est original, un peu déjanté, avec un refrain imparable, et un solo de guitare inspiré.
En fait tout ça c’était déjà excellent, mais les trois derniers morceaux sont, à mon goût, encore meilleurs. D’abord Only When Darkness Falls, au refrain qu’on reprend à tue-tête tellement il est bien foutu, puis le clou de l’album, Incognito, au refrain très SOAD dans l’âme, une vraie réussite comme j’aimerais en entendre plus souvent. Quel chant de Gary ! Et le final est énormissime, je vous disais qu’il y a du System Of a Down dans ce morceau délirant. Je vous ai retrouvé la vidéo (pas parfaite) de leur passage à l’Elysée Montmartre, en première partie de The Psychedelic Furs.



Enfin le dernier morceau, Mother, est encore excellent, à la sauce Metallica (riffs) meets SOAD (chant), bien riffé, son puissant, énorme final.

Si ma description ne vous convainc toujours pas, je vous conseille d’aller jeter un œil et une oreille attentive sur leur site Bandcamp, ou vous pouvez tout écouter et acheter en numérique (au prix que vous voulez). C’est pas la classe ce groupe, mec ? Fais leur honneur bordel ! Et si ça passe près de chez toi, tu vas me faire le plaisir de lâcher tes charentaises et d’aller secouer ta carcasse en me remerciant.

Tracklist de Molybaron :

01. Fear is Better Business Than Love
02. Moly
03. Let's Die Together
04. Dance (Addicted to the Disco)
05. Sleep Leaves This Place
06. On the Other Side
07. The Apocalypse Shop
08. Only When Darkness Falls
09. Incognito
10. Mother