Artiste/Groupe:

Obuedian Raph

CD:

Pahilcé Koot

Date de sortie:

Avril 2020

Label:

Autoproduction

Style:

Metal Avant-Garde

Chroniqueur:

JeanMichHell

Note:

13/20

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Un album solo, au sens premier du terme, est de fait un album on ne peut plus personnel. Lorsque vous composez chaque note, choisissez chaque tempo, imaginez chaque instant de votre galette, comment ne pas aller chercher le plus profond de chaque détail ? Le multi-instrumentiste et compositeur Obuedian Raph propose son premier projet, Pahilcé Koot. Un album de vingt titres pour environ une heure de musique, rempli de détails.

Ce projet studio instrumental autoproduit est composé, enregistré et mixé par un seul homme. De la clarinette, en passant par la batterie, la basse, la guitare et les claviers en tout genre, il s’occupe de tout, et fait maison, au sens littéral du terme. En véritable passionné de musique progressive et avant-gardiste (Pryapisme, Igorrr, Mr Bungle, Pin-Up Went Down, CHON, Gentle Giant…), son album Pahilcé Koot se veut être l’écho de cette scène underground d’une créativité débordante. Je décide alors de prendre mon Mercalm et j’attaque l’écoute d’un voyage qui se veut mouvementé.

Au rayon des bonnes surprises, l’affiliation, on ressent clairement l’influence d’un groupe comme Pryapisme. Le clavier en particulier pointe le bout de sa truffe vers ce côté-là. Le chat sur la pochette ne doit pas être innocent non plus.

Il est aussi assez évident que Raph est un musicien d’exception. Il maîtrise avec une certaine virtuosité un nombre d’instruments assez incroyable. La musique pour lui c’est comme la potion chez le gros Gaulois, il a dû tomber dedans quand il était petit, et a certainement mangé des kilomètres de gammes.

Côté des compositions, là aussi c’est éclectique. Mais j’y trouve deux tendances majeures. La première, une forme de légèreté à la limite de la naïveté. Attention, pas quelque chose de cul cul la praline, mais comme si on nous donnait une dose d’insouciance et c’est plutôt agréable, surtout en ce moment. Le titre Excellent Ce Titre en a toutes les caractéristiques : une intro emplie de soleil, suivi d’un passage plus jazzy, pour conclure tout en douceur. 

La seconde tendance est plus rock and roll : sans être dans du metal lourd et abrasif, certains titres comme Horreurs Boréales, Il Effraie, Mon Poisson ou la fin de Wolfgang Amadeus Bizarre sont plus rentre-dedans. Au final, j’ai une préférence pour cette tendance, mais qu’est-ce que vous voulez, bourrin un jour, bourrin souvent.
Et il y a certains titres qui font la synthèse des deux, comme Des CD Décédés Sont Des Disques Morts ou _Tiret-Du-7_.

Cela va certainement vous paraître bateau mais chaque instrument a son rôle. Evidemment dans les autres groupes aussi, mais dans la manière de composer certains instruments ont une place de choix. Exemple : la clarinette, à mon sens, remplace le chant, à la manière de Sergueï Prokofiev dans Pierre Et Le Loup. La batterie est le gardien de la cohérence malgré une furieuse envie de contre-temps. Les percussions (piano ou le xylophone) ont aussi un rôle de créateur de mélodie, parfois plus que la guitare.

Malgré tout cela, ce projet me semble souffrir de deux défauts majeurs. Tout d’abord l’ensemble me semble un peu soft, pas assez Metal pour mes oreilles usées, et par instant je le trouve presque scolaire, malgré une volonté évidente de se sortir des carcans musicaux habituels. Certes, le choix d’agencement des titres est intéressant, les transitions ou les ruptures sont clairement orchestrées de manière minutieuse et réfléchie, mais pour moi il manque un peu de folie. D’autant que le mixage un peu trop lisse (mais avait-il d’autres choix ?) accentue cet effet. Si je reprends les références citées au-dessus, il y a toujours un côté sale, fou qui déstabilise soit par l’agression, soit par un mélange des genres qui a priori ne devaient pas se rencontrer, je ne retrouve pas assez cela dans ce premier effort. Mais Igorrr ne s’est pas construit en un jour…

Le second, et c’est encore une fois très personnel, le déficit de chant. Je ne suis pas déjà à la base un grand défenseur de l’instrumental, d’autant que je suis convaincu qu’un chant aurait pu apporter une folie plus singulière. Est-ce que Bungle ou Fantômas auraient eu le même succès sans Patton ? Pas certain…

Cet album est le fruit d’un travail remarquable d’écriture, chaque micro seconde de cette galette est pensée. J’aurais aimé un peu plus de relief, compte tenu du genre abordé. Tout ceci est un peu sage à mon goût. Bien faire c’est essentiel, mais savoir dégoupiller et mettre en folie sa musique est un des points forts de ceux qui font cette scène de l’avant-garde. L’ensemble du disque foisonne d’idées et de propositions variées, ce qui est déjà remarquable pour un premier album fait maison, et rien que pour cela ce disque mérite une oreille attentive. Vous le trouverez gratuitement sur les plateformes habituelles, alors pourquoi vous en priver ?

Tracklist de Pahilcé Koot :           

01. Paysage Imaginaire Musical & Sonore
02. Chacovre VS Cochon Dingue
03. Mega Turbo 3000
04. Des CD Décédés Sont Des Disques Morts
05. Malagmatum Inmorando
06. Travail, Famille, Batterie
07. _Tiret-Du-7_
08. Quiche Portative A 2 Vitesses
09. Fou Artistique
10. D'un Coup De Guinguette Magique
11. The Son Of Euthoorysm
12. Horreurs Boréales
13. Balade Banale D'une Banane Banale
14. Excellent Ce Titre !
15. Il Effraie, Mon Poisson
16. La Grande Barrière De Chorale
17. Jeanne Dark
18. On N'a Pas Tous Les Jours 20 Temps
19. Wolfgang Amadeus Bizarre
20. Terminado La Rigolada 

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