Artiste/Groupe:

Pain Of Salvation

CD:

In The Passing Light Of Day

Date de sortie:

Janvier 2017

Label:

Inside Out

Style:

Metal Progressif

Chroniqueur:

Didier

Note:

17.5/20

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Chroniquer un album de Pain Of Salvation n’est jamais tâche facile. Surtout entre la dinde et le chapon, en période de fêtes de fin d’année. D’abord ce sont souvent des objets subtils et complexes, qui demandent un certain état d’esprit. C’est aussi souvent des albums « artichauts » qui se découvrent et s’apprécient, écoute après écoute, pour enfin, mettre leur cœur à nu. Nous avons découvert un premier morceau, Meaningless, au clip un peu dérangeant et morbide, qui annonçait la couleur. Certains ont annoncé un Entropia-bis, le retour du PoS des premiers jours. Le second clip qui est sorti sur la toile pour le morceau Reasons semble conforter les fans dans cette idée. Mais à l’écoute de la promo, qu’en est-il vraiment ?

Nous avions quitté Pain Of Salvation sur les deux albums Road Salt One et Road Salt Two, enchainés avec un Falling Home puis, cette année un Remedy Lane Revisited. Les deux premiers semblaient indiquer un changement de cap vers quelque chose de plus minimaliste, épuré, vintage... Bref, assez loin du metal prog furieux et changeant que les premiers albums avaient révélé. Falling Home n’avait que conforté tout ça puisqu’il s’agissait d’un réorchestration de morceaux existants en version acoustique ou quasi-acoustique, clairement bio mais fort réussi, à condition d’accepter les nouvelles directions. L’album revisité est une tuerie qui aura certainement conforté ceux non convaincus par le changement de cap, que les anciens albums étaient énormes. C'était aussi un espoir d'un retour au source. A noter aussi qu’avec ces changements de direction artistique, le line-up a aussi bien évolué et que le Pain Of Salvation du XXIème siècle est composé de Daniel Goldenlöw (guitare, chant) bien sûr, la tête pensante du groupe et seul membre du PoS d’origine, de Gustaf Hielm à la basse, de Léo Margarit (le petit français du Sud qui a fait son trou au Nord) derrière les fûts, de Daniel Karlsson (dit D2 pour ne pas confondre avec Daniel G) aux claviers et enfin de Ragnar Zolberg à la guitare et au chant. Il est important pour la suite de savoir que Ragnar est un talentueux musicien islandais, qui officiait et officie toujours (le projet semble toujours actif) comme chanteur, guitariste et compositeur du groupe islandais Sign et qu’il a une sacrée voix, très haut perchée.

C’est important car, après quelques recherches, il s’avère que le premier morceau publiquement dévoilé de ce In The Passing Light of Day, Meaningless, et son clip étrangement morbide (alors que les paroles sont plutôt branchées sexe si j’ai bien capté), est en fait une reprise d’un morceau de Sign (Rocker’s Don’t Bathe) écrit donc par Ragnar. Les versions sont très proches, Daniel chantant la version de PoS, avec Ragnar l’accompagnant dans la voix très aiguë (féminine) du refrain. Je vous laisse découvrir le clip étrange. C’est déjà un changement de taille dans la musique de PoS qui était jusqu’alors surtout composée par Daniel. Non seulement c’est composé par Ragnar, mais en plus c’est une reprise. Tout fout le camp, ma bonne dame…


Je ne suis pas certain de savoir quel instrument joue le thème principal du morceau, c’est une sorte de son de cornemuse trafiqué au synthé. Ca surprend au départ, mais finit par vous obséder le ciboulot après quelques écoutes. Ce morceau est positionné en troisième position sur l’album. Avant cela, nous trouvons un long morceau qui ouvre l’album, On a Tuesday, avec plus de dix minutes au compteur. Ce n’est d’ailleurs même pas le plus long morceau, puisque le dernier, qui donne le nom à l’album, dure plus de quinze minutes, mais on y reviendra. On a Tuesday est un morceau bouillonnant, du PoS, metal, avec des signatures de temps époustouflantes (chapeau bas à Léo pour son boulot sur tout l’album). Le morceau alterne un couplet calme et chuchoté avec un refrain énervé, avec Ragnar à la contre voix. Ce contraste va plaire aux fans de la première heure. Côté parole, je pense que Daniel revient sur son long séjour traumatisant à l’hôpital en 2014. Il est passé près de la mort, ça a laissé des traces et visiblement inspiré une bonne partie des compositions de cet album. Sur le petit break, à mi-morceau, j’avoue ne plus savoir qui chante la petite voix hyper aiguë : Ragnar ou Daniel ? Les deux en sont capables. Mon seul petit reproche, c’est l’utilisation de bruits bizarres électroniques, sorte de signal extrêmement compressé, sur le final. A fort volume, c’est désagréable.
Tongue Of Gold, qui suit, est encore un morceau assez virulent, heavy. Léo y assure une grosse frappe assez linéaire alors qu’autour, les choses partent un peu dans tous les sens. Il maintient la cohérence du morceau. Sur certains passages ça peut faire penser à du Korn, étrangement, avec le chant de Daniel. Là encore, le thème reste son séjour à l’hôpital qui semble le rendre fou.

Les choses se calment pour Silent Gold qui démarre avec un joli piano, on dirait presque du Coldplay. C’est une magnifique ballade, avec des chœurs qui se joignent à Daniel sur le second couplet et une basse qui sonne fretless. Restez calmes les furieux, pas d’inquiétude, car voilà Full Throttle Tribe, qui pour moi est LE morceau de cet album. Les signatures de temps sont dingues (Léo est fou !), les rythmiques lourdes, le chant magnifique, le refrain ultra accrocheur, les chœurs superbes, le final apocalyptique sur fond de bruit d’enfants qui jouent. On a l’impression d’être allongé sur ce lit d’hôpital en train de complètement perdre les pédales. Saisissant !

Le morceau suivant, Reasons, est le second que Pain Of Salvation a filtré sous forme de vidéo, et c’est probablement le plus surprenant de tout l’album. Si certains avaient des doutes sur la capacité du groupe à se renouveler et à surprendre son auditoire, voilà qui devrait les faire revoir leur avis. Le phrasé du refrain est incroyable, tous les membres du groupe y participent. Le contraste entre les riffs puissants, voire lourdingues de l’intro et des ponts, avec le faux calme du couplet est génial. Les chœurs posent des questions à Daniel qui leur répond. Le refrain est quasiment a cappella. Un grand moment qui finit en délire.


Angel Of Broken Things est un morceau mid-tempo, le seul sur lequel on trouve de vrais solos de guitare, probablement de Daniel puis de Ragnar ou l’inverse, mais certainement deux solos différents. Les arpèges de guitares, sur fond de samples, puis l’arrivée de la batterie de Léo avec ses étranges contre-temps est super bien trouvée. Le chant de Daniel retranscrit la souffrance subie, certainement l’envie d’en finir pour arrêter de souffrir. Heureusement qu’arrive The Taming Of A Beast, qui semble indiquer enfin le début de la guérison, parce qu’on commencerait presque à tomber malade nous aussi ! Les riffs du morceau sont pêchus, les voix magnifiques et le final subtilement dissonant.

If This is The End est un morceau bizarre qui démarre en acoustique, avec Daniel qui se pose des questions existentielles. Daniel et le morceau s’énervent au bout de presque trois minutes, avec un riff ravageur, puis se calment à nouveau avec un passage d’accordéon. Daniel semble devenir complètement dingue à la fin, peut-être sous l’effet des drogues que son corps a ingurgité pendant des semaines. Ca fait frissonner !

Ouf, la dernière compo nous permet de souffler un peu. The Passing Light Of Day est le morceau de plus d’un quart d’heure déjà mentionné. C’est, dans un premier temps, une ode d’un homme à sa femme et meilleure amie. Daniel est juste accompagné d’une guitare, et il est vraiment émouvant, il se livre. Sur le refrain, sa voix est doublée par une voix plus aiguë, celle de Ragnar certainement. Vers le milieu du morceau, on a droit à un petit solo de guitare acoustique à la slide avant que la batterie ne démarre et le morceau s’énerve. Les guitares s’électrifient, se saturent, Daniel s’emporte un peu. Finalement il se calme avec le morceau qui termine l'album tout en douceur.

Bon, je l’avoue, oui, cet album m’a scotché, une fois de plus ! Je vais devoir commencer l’année par un coup de cœur. Désolé les mecs mais 2017 ne pouvait pas mieux commencer pour moi (2016 avait déjà fini en apothéose avec un excellent dernier album de Marillion). Les vieux fans de PoS devraient y trouver leur compte. Les nouveaux aussi. Ceux qui cherchent des groupes qui sortent des sentiers battus peuvent se pencher sur le cas Pain Of Salvation et commencer avec cet album s’ils ne connaissent pas déjà le phénomène. Ils ne seront pas déçus. La voix de Ragnar est un réel plus dans le groupe, elle est complémentaire de celle de Daniel et donne lieu à de magnifiques lignes de chant et des harmonies saisissantes. Difficile de ne pas succomber au double charme de ces deux-là. Cet album pourrait bien être un Remedy Lane Part 2, Daniel l’explique dans une interview.

Tout comme Remedy Lane, c'est un concept album, un album autobiographique. Mais il voulait qu’il ait son existence propre et donc un titre propre. Et dans cette interview c’est certainement Daniel qui parle le mieux de ce disque qu'il décrit comme "un album vrai et sans l’ombre d’un compromis, de pure brutalité, teinté de fragilité et de profonde intimité". Le programme vous tente ?


Tracklist de In The Passing Light Of Day
:

01. On A Tuesday
02. Tongue Of God
03. Meaningless
04. Silent Gold
05. Full Throttle Tribe
06. Reasons
07. Angels Of Broken Things
08. The Taming Of A Beast
09. If This Is The End
10. The Passing Light Of Day