Le duo américain T.H.A.L (pour "The Heathens Are Loose", "les païens sont lâches" en français dans le texte...) vient juste de sortir, pour notre plus grand plaisir, son second opus intitulé Reach for the Dragon’s Eye. Et je dois bien l’avouer, j’ai pris mon pied à écouter cet album. Toutes les chansons sont d’un excellent niveau ; de plus ce groupe de titres homogènes est boosté par quelques titres excellentissimes. Le style stoner doom du groupe, agrémenté par des touches blues et metal, fait mouche. C’est lourd, mais toujours musical sur les trente-huit minutes du disque. Une sorte de mélange hybride entre le stoner magique des Queens Of The Stone Age et le blues musclé de Jack White.

Il faut dire que Kevin Hartnell et John Walker utilisent l’espace de manière efficace. On a même peine à croire qu’ils ne sont que deux. Leurs compétences musicales respectives ne peuvent à aucun moment être remises en cause. Kevin excelle à la batterie et ne laisse personne indifférent à la guitare. John "Vince Green" Walker lui fait bien sûr le job aux cordes, basse et guitare, mais en plus apporte un plus considérable grâce au chant. Sa voix est percutante et limpide ; elle est également parfaitement en ligne avec la musique. Ce ressenti est vrai aussi bien pour les parties chantées que pour les parties plus criées. Même l’utilisation d’onomatopées sonne juste (Soulshank). En comparaison avec Glitter, premier album du groupe sorti en 2016, ce Reach for the Dragon’s Eye est simplement sur une autre planète ; il est abordable, joueur et mille fois plus musical.

L’autre marque de fabrique du groupe c’est une guitare rythmique sursaturée. Il en ressort un son un peu sale, qui fonctionne bien avec l’ambiance générale. Ces thèmes principaux sont identifiables d’ailleurs après la minute et demi d’intro planante de Rebreather. Cet excellent titre d’ouverture donne le ton. On le voit d’entrée, la trame sera simple mais diablement efficace ; le rythme est lent, les voix claires et le refrain simplement parfait. Le mixage et la production sont à la hauteur. Les couches musicales successives se complémentent sans jamais s’opposer. La fin plus calme du titre ouvre sur le court, puissant et brutal Under Earth. Moins de trois minutes pour résumer l’album et pour souligner les influences probables de Kyuss. Son saturé, batterie et basse lourdes, ce titre ne vous laisse pas le temps de vous poser de questions, il vous passe dessus comme une avalanche.

Her Gods Demand War est le premier titre qui apporte cette touche plus blues, presque ethnique. Groove sans renier ses origines metal et stoner, le titre est en plus soutenu par une ligne vocale féminine (Sophie Steff) synchro avec le reste. C’est un titre tout en déhanché, avec une superbe musicalité. Thoughtform sonne très QOTSA, jusque dans la voix de John qui se rapproche étrangement de celle de Josh Homme. La rythmique joueuse de la seconde moitié du titre donne une pointe de légèreté pas désagréable. Soulshank est dans la lignée de Her Gods Demand War, mais en plus lourd. Le titre commence comme s'il devait être seulement musical, puis s’oriente à la minute quinze vers un titre stoner de la meilleure veine. C’est puissant, tout en restant limpide et dans une trame bien définie. Le refrain ici aussi est d’une rare efficacité. Death of the Sun est plus classique et très proche du travail the Queens Of The Stone Age. Les guitares et la basse prennent pour une fois plus clairement le devant de la scène. Le titre est jouissif par sa simplicité. Punish me fait penser au travail de Therapy ?. C’est le tire avec le rythme le plus élevé de l’album. Il laisse à lui seul penser que le groupe pourrait s’aventurer sur d’autres terres musicales sans aucun problème. Son côté hard-rock ne laisse pas indifférent et les riffs de guitare sonnent juste. Un titre qui pourrait être construit pour une écoute radio. L’album se clôt sur, peut-être, mon titre préféré. Vous savez, ce genre de titre que vous pouvez réécouter en boucle. Reach for the Dragon’s Eye est lent, sombre, musical et a l’élément qui tue : un refrain gimmick magique, qui vous tourne dans la tête et qui vous fait chanter au milieu de nulle part. Une merveille de morceau ; musical, rythmé et avec une parfaite harmonie entre voix et instrument.

Ce second album de T.H.A.L est donc une réussite qui mérite largement son petit coup de coeur. Les amateurs de stoner et de doom, devront obligatoirement s’y pencher. Mais il serait vraiment dommage que l’album ne trouve pas une oreille attentive auprès d’autres auditeurs. Dans cet album, le groupe arrive à apporter quelque chose de nouveau, de frais au style. La relative simplicité de la construction des titres y est certainement pour beaucoup. Mais je crois surtout que la réussite vient avant tout de l’excellent travail de composition et de la cohésion entre deux très bons multi-instrumentalistes. A découvrir au plus vite !

Tracklist de Reach For The Dragon’s Eye :

01. Rebreather
02. Under Earth
03. Her Gods Demand War
04. Thoughtform
05. Soulshank
06. Death of the Sun
07. Punish
08. Reach for the Dragon’s Eye