The Ocean

Artiste/Groupe

The Ocean

CD

Heliocentric

Date de sortie

Mai 2010

Style

inclassable

Chroniqueur

amber_of_death

Note amber_of_death

15/20

Site Officiel Artiste

Myspace Artiste

Acheter sur Amazon.fr

C H R O N I Q U E

Il existe des groupes qui marquent une personne dès la première écoute. C'est l'effet qu'a eu The Ocean sur moi en première partie d'Opeth à Bruxelles. La magie du téléchargement m'a fait ensuite découvrir Precambrian, album absolument gigantesque, mélange de violence, de beauté, de technique... Les critiques dithyrambiques étaient largement méritées, tant l'opus est intense. C'est simple, l'oeuvre a supplanté Burn my eyes de Machine Head à la tête de mon classement personnel.

The Ocean est un collectif de différents musiciens, une sorte d'auberge espagnole du metal. Sauf que celle-ci est Allemande. Le pilier en est Robin Staps, principal compositeur. C'est lui qui a installé le groupe dans une espèce de hangar où il peut réunir tout son petit monde, bâtiment dont la taille impressionnante a donné le nom de sa création.

Les différents changements de line-up - le plus important pour Heliocentric étant l'arrivée d'un nouveau chanteur, Loïc Rossetti - n'ont pas entamé le potentiel hyper créatif et la ligne de conduite du collectif à ses débuts. On y trouve des guitaristes, des chanteurs, ainsi qu'une pléiade de musiciens de sessions de tous bords (violoncelle, clarinette, tambourin, saxophone, glockenspiel, piano). Musicalement parlant, The Ocean est un mélange de Neurosis pour le côté sombre, Tool pour la technique et les montées en puissance, de musique classique, de Dillinger Escape Plan pour la furie et de métal progressif (difficile d'y voir un groupe), la fusion du sludge, du hardcore, d'instruments à corde et d'une pincée de Mastodon. Le tout en mieux. Jusqu'ici, avec Fluxion, Aeolian et Precambrian, le groupe a fait un sans-faute.

Alors quand Robin Staps annonce pour 2010 pas moins de deux albums, autant dire que cela crée chez moi la même sensation qu'un taulard devant sa femme après dix ans d'attente (je sais, fallait que ça sorte). Mais il prévient tout de suite que le premier volet, Heliocentric, sera différent, plus posé que Precambrian. Décrire une telle musique si intense tient de la gageur autant que de l'impossible. Qu'à cela ne tienne, je fonce.

Je passe rapidement sur le concept un brin pompeux, habituel chez The Ocean, basé cette fois-ci sur l'histoire de la montée en puissance de l'héliocentrisme et de ses effets sur les croyances chrétiennes dans les temps médievaux jusqu'à Darwin. Même en tant que fan acharné, ce côté branlette intellectuelle me laisse perplexe. Concentrons nous sur la musique.

Cela commence de manière traditionnelle, l'introduction bizarroïde, faite de samples et de guitares prêtes à bondir (Shamayim). L'enchainement se fait rapidement avec Firmament. Ce qui marque d'entrée, c'est la voix de Loïc Rossetti, qui privilégie le chant clair au chant hurlé. Les puristes crieront bien sûr à la trahison. Et pourtant, elle n'est pas si mal cette voix et cela change de Precambrian dont le seul défaut, à mon goût, reste l'omniprésence d'une voix hardcore. Le morceau est d'ailleurs dans la même veine que ce dernier, tout en mid-tempo puis en accéleration, le break en douceur est magnifique (ahhh les roulements de batterie) pour une fin marquée par une excellente lourdeur hardcore. Sublime. The first commandment of luminaries démontre par la suite ce que disait Robin Staps. Oui, The Ocean a diminué en intensité, à peine en qualité. Après une entrée en matière dantesque, le chant se fait plus chaleureux avec l'arrivée des instruments à cordes pour des passages aériens et jazzy en finesse avant une fin tout en muscles.

A la lecture de certains confrères, Ptolemy was wrong constitue le premier écueil de l'album. Le tempo est lent, le chant clair est appuyé, doublé d'un duo piano/violon du plus bel effet. Certes, le côté théâtral très marqué peut confiner à l'écoeurement. On peut aussi y voir l'envie de faire un tube, cet aspect commercial qui fait hérisser les poils des bras de tout métalleux qui se respecte. Mais un métalleux étant aussi une petite chose fragile sous un air de brute, je ne reste pas insensible, malgré une certaine longueur.

Mais les guitares reviennent rapidement sur Metaphysics of the hangman. Et même l'alternance des chants. C'est pourtant là que j'adhère moins. En effet, le morceau parait bien conventionnel (couplet/refrain/couplet/refrain inhabituel). Ce n'est pas mauvais mais c'est trop simple pour un tel groupe. On croirait entendre du Staind (beurk) par moments.

Catharsis of a heretic tient plus de la transition pop basée sur du cuivre et des samples. Le chant clair se fait franchement énervant, maniéré comme un chanteur de variété americaine. Sans intérêt.

Swallowed by the earth est un titre qui fait primer l'efficacité sur l'originalité. Le chant est rentre-dedans, les guitares sont un mix entre agressivité et retenue, le break de basse est le calme avant la tempête. Mais The Ocean est capable de mieux. C'est bon mais la tension de l'album retombe.

Epiphany me fait penser à The fragile de Nine Inch Nails, en moins bon. Très proche dans son interprétation d'un Ptolemy was wrong, The Ocean continue de nous asséner une musique trop lisse, beaucoup moins alambiquée qu'auparavant. La déception de l'album.

Heureusement, les deux derniers morceaux relèvent la tête, The origin of species et The origin of god sont intimement liés, comme l'indiquent leurs noms. Plus ambitieux surtout, avec un retour à la violence et aux bearks aériens, particulièrement The origin of god et son solo de saxo d'une originalité à couper le souffle, contrebalançant la vacuité des textes.

Au final, entre les tenants d'un album touchant au génie et les partisans d'un ratage complet, je choisis la voie du milieu. The Ocean a certainement voulu toucher un public plus large, ce que ne permettaient pas Fluxion et Precambrian. Certaines parties donnent l'impression d'être baclées ou volontairement simplistes alors que d'autres continuent d'alimenter l'insolente facilité du groupe à produire des morceaux d'anthologie. Mais succéder à un chef-d'oeuvre tenait de l'exploit. Le pari n'est en cela pas totalement réussi, le milieu de l'album s'essoufflant. Robin Staps a promis un retour à la normale pour Anthropocentric, qui doit sortir en novembre prochain.

Bref, Heliocentric est un bon album, voire très bon (la preuve, je l'ai acheté, en temps de crise on ne choisit que les placements sûrs). Pour autant, The Ocean se permet de jouer avec son public et de faire ce qu'il veut sans être mauvais. La marque des grands, tout simplement.

 

Tracklist de Heliocentric :

01. Shamayim....
02. Firmament....
03. The First Commandment of the Luminaries....
04. Ptolemy Was Wrong....
05. Metaphysics of the Hangman....
06. Catharsis of a Heretic....
07. Swallowed by the Earth....
08. Epiphany....
09. The Origin of Species....
10. The Origin of God....