Artiste/Groupe:

Tony Iommi

CD:

Iommi

Date de sortie:

2000

Label:

Style:

Heavy Metal

Chroniqueur:

Orion

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Quand Tony Iommi, guitariste de Black Sabbath de son état (et accessoirement inventeur du riff heavy metal), n'enregistre pas un album de Black Sabbath, il invite plein d’amis avec lesquels il joue... du Black Sabbath.

Je m'explique. Alors que les albums du Sab' de l'époque ne passionnent plus les foules (le dernier en date, Forbidden, n'avait pas franchement marqué les esprits, loin de là) et que le live Reunion (réunion du line-up mythique Ward, Butler, Osbourne et Iommi) paru deux ans plus tôt n'a finalement abouti sur rien de concret, Iommi s'est gardé pas mal de riffs pachydermiques sous le coude pour un album solo sur lequel il a décidé d'inviter, pour chaque titre, un chanteur différent. C’est déjà une première grosse différence avec son premier album solo, Seventh Star, paru en 1986, sur lequel n’intervenait qu’un seul chanteur, Glenn Hughes. Seconde grosse différence, toujours par rapport à ce premier album solo, eh bien je l’ai dit un peu plus haut : cette fois-ci, c’est du gros riff bien lourd, c’est ce qu’on a envie d’entendre de la part de Tony Iommi

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le Iommi, il sait s’entourer quand il s’agit de produire un album solo. On retrouve donc tout au long de cet album des figures incontournables de la sphère metal  - au sens large - de l'époque : des "anciens" comme Billy Idol, Ian Astbury de The Cult ou Ozzy Osbourne (tiens, tiens…) mais aussi du sang neuf de stars montantes comme Billy Corgan des Smashing Pumpkins, Skin de Skunk Anansie, Serj Tankian de System of a Down, Dave Grohl de Foo Fighters, Henry Rollins ; certains d'entre eux comme Phil Anselmo de Pantera / Down et Peter Steele de Type O Negative sont des fans inconditionnels de Black Sabbath et on imagine bien leur joie de pouvoir enregistrer avec leur idole de toujours.
Et la présence de ces personnalités, finalement assez disparates, fait toute l’originalité de cet album. Car chaque intervenant, même s'il s'imprègne du style de Iommi, donne à son titre une couleur personnelle dans la mesure où chaque chanteur a participé à la composition du morceau sur lequel il intervient. A noter aussi la participation non négligeable à l’écriture de l'ensemble de celui qui a produit cet album, Bob Marlette.
C’est parti pour décortiquer cette œuvre unique en son genre.

On débute avec un morceau assez étonnant pour le style du monsieur, Laughing Man (chanté par Henry Rollins) qui fait presque neo-metal au niveau du riff de démarrage. Titre intéressant mais pas incontournable. Il faut dire que je n’ai jamais été trop fan d’Henry Rollins, ça n’aide pas. On voit tout de même dès ce premier titre que, si comme je le disais plus haut, chaque chanteur s’est imprégné du style de Iommi, Tony s’est lui aussi laissé imprégner par les influences du metal moderne, sur lesquelles il a greffé ses riffs Sabbathiens.
Après cette mise en bouche particulière, on revient en terrain plus connu avec du riff d'une lourdeur implacable (Meat, chanté par Skin) et un solo où l’on retrouve tout le talent du bonhomme. Superbe morceau et première excellente surprise. Première car il va y en avoir d’autres.
Goodbye Lament (featuring Dave Grohl) démarre comme un titre de... Nirvana avant que le riff heavy n'arrive et occupe toute la place. Bon morceau, avec un Dave Grohl qui s’arrache sur le refrain. A noter la participation de l’ami Brian May (Queen) sur ce titre, à la seconde guitare (il intervient également sur Flame On). Un morceau proche du metal moderne dans sa structure avec absence de solo.
Time Is Mine chanté par Phil Anselmo est sans aucun doute le morceau le plus heavy de l'album. Riff pachydermique limite inquiétant avec un Anselmo en "mode Down" au niveau du timbre de voix. Si on avait trouvé des titres comme celui-là sur le dernier Black Sabbath (13), j’aurais été ravi.
On reste dans le riff bien gras avec Patterns sur lequel intervient le déjanté Serj Tankian qui nous fait son numéro vocal, pour la seconde grosse claque de cet album après Meat. De nouveau, pas de solo digne de ce nom. On peut donc être un excellent guitariste et proposer un album solo sans démonstration qui flatte l’ego. Non, bien plus que les solos, les vrais héros de cet album ce sont les riffs de Tony, bien lourds et tous très inspirés.
Black Oblivion avec Billy Corgan (également à la basse et à la guitare en plus du chant) est encore construit sur un bon gros riff de "Mister Heavy Metal". C’est le morceau le plus long de l’album (plus de huit minutes), avec plusieurs ambiances. Encore un bon moment.
Et c’est parti pour la troisième claque du disque : Flame On avec Ian Astbury. Ou quand The Cult rencontre Black Sabbath. Le chant immédiatement identifiable d’Astbury sur les riffs plombés de Iommi, ça le fait grave ! On s’autorise aussi un petit passage très moderne aux machines, comme pour bien montrer qu'avec cet album, Tony n'est pas tourné vers le passé.
Peter Steele sur Just Say No To Love fait du Peter Steele. Bref, on n’est pas très éloigné ici de l’univers de Type O Negative puisque le groupe américain est aussi adepte des riffs bien lourds. Titre sympa, qui plaira forcément aux fans du Géant Vert (RIP...)
Who's Fooling Who, le titre sur lequel intervient Ozzy, est évidemment celui du lot qui fait le plus penser à Black Sabbath, et pour cause. Surtout que l’on retrouve Bill Ward derrière les fûts pour ce titre. Bref, les trois quarts du Black Sabbath d’origine. Et du coup, on est un peu inquiet car il ne s’agit pas du meilleur morceau de l’album. Trop convenu peut-être. Oui, inquiet car ce titre, faisant suite aux deux inédits pas franchement folichons qui complétaient le live Reunion deux ans plus tôt, pouvait légitimement nous faire émettre des réserves quant à la qualité d’un prochain Black Sabbath, s’il y en avait un (à l’époque, ça paraissait très hypothétique). Aujourd’hui, avec le recul et après la sortie d’un 13 plutôt moyen, ce Who's Fooling Who aurait finalement fait partie des meilleurs morceaux de cet album. Comme quoi, tout dépend du contexte…
Plus intéressant, pour finir, le Into the Night avec Billy Idol qui, vous le savez, n’est pas vraiment un chanteur de Heavy mais qui s'en tire avec les honneurs sur ce coup-là.

Avant la réunion inattendue de Tony Iommi, Geezer Butler et R. J. Dio, qui allaient repartir ensemble pour de nouvelles aventures sous le nom de Heaven and Hell, cet album solo de Tony Iommi est une parenthèse sympathique et rafraîchissante où le maître se frotte à la nouvelle génération et à des représentants de styles musicaux assez différents du heavy de Black Sabbath. Il est la preuve que le Metal est pluriel mais que, quelque soit la bannière que l’on suit, il y a des personnages qui font l’unanimité et qui savent rassembler toutes les mouvances du Metal moderne et passé. Tony Iommi est de ceux-ci.
Un album franchement intéressant et varié.


Tracklist de Iommi :

01. Laughing Man
02. Meat
03. Goodbye Lament
04. Time Is Mine
05. Patterns
06. Black Oblivion
07. Flame On
08. Just Say No To Love
09. Who's Fooling Who
10. Into The Night

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