Winger

Artiste/Groupe

Winger

CD

Karma

Date de sortie

Octobre 2009

Style

Hard Rock

Chroniqueurs

Hellblazer, christian

Note Hellblazer

18/20

Note christian

14/20

Site Officiel

Myspace

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C H R O N I Q U E Hellblazer

Tombé du ciel, inespéré, ce "Karma"... venant d'un groupe en état permanent de fragile survie, ses fans sont d'autant plus heureux à chaque nouvelle livraison, une de plus engrangée pour notre plus grand bonheur. Car comme aime à le clamer haut et fort Kip Winger, sa musique et son groupe font peu de cas des modes et du music business. Juste retour des choses, quand l'on se penche quelques instants sur le passé hors norme de celui qui est né comme une machine à hits en 1988, sorti de l'inconnu et plongé sous les projecteurs, hard rock tendance FM - mais de bonne facture - acquis au platine avec entre autres des pépites mondiales comme "Madalaine", "Seventeen" et "Headed For A Heartbreak". Puis rebelote en 90 avec "In the Heart of the Young" et son autre hit mondial "Miles Away".

Puis vint le grunge et derrière, les nouvelles tendances. Winger aux oubliettes.

Dommage, car c'est en ces temps instables et chaotiques que sortit le joyau d'un groupe passé entretemps au format power trio : le sublissime "Pull", alignant 10 brûlots gravés dans la roche pour l'éternité, fort heureusement pour ceux qui savent apprécier ce chef d'oeuvre... et surtout ceux qui le connaissent. Car rappelons-le, Winger fuyait déjà le star system et, désabusé, intitula même cet opus ainsi pour que ses acquereurs l'utilisent au ball-trap au cas où ils ne l'aimeraient pas (véridique), conscient du décalage entre sa musique et les tendances d'alors. Honnête et franc, le bonhomme. Suite aux méventes, le groupe annonça sa séparation. Injustice des modes, toute puissance de MTV, le même qui les avait jeté dans la lumière, les jeta dans l'oubli commercial. Mais pas celui des fans, qui guettaient dans l'ombre un hypothétique retour... 

Une infime étincelle subsiste donc. Kip, résolu à poursuivre son chemin musical, oeuvre à fleur de peau avec un excellent acoustique de reprises ("Down Incognito" en 1999) et 3 disques solo, dont le récent et excellent "From The Moon To The Sun" (2008), galette révélant la facette la plus sensible du bonhomme.

A ce stade, espérer un retour de Winger était encore utopique. Et pourtant... en 2006, 10 ans après, la reformation s'opère, et "IV" voit le jour, et avec le même line-up s'il vous plaît  Un opus mature, sec, heavy, claquant, inspiré, axé sur la vie militaire, sorti dans le contexte controversé de la 2ème guerre en Irak, durant laquelle tant d'artistes américains ont crié au monde leur honte des agissements de leur leader, Dobeuliou le maudit. Fort en caractère comme un vin du sud de l'Italie, il en avait aussi la longévité, loin d'aligner des hits évidents que l'on "essore" en 15 écoutes. Il a muri, s'est épanoui, a fait grandir Winger. Et nous a donné espoir, pour la suite, une éventuelle suite. Mais rien n'étant jamais gagné avec Kip, le doute a subsisté...

Un double Live 2007 nous a momentanément rassasié, puis plus rien. Silence radio. Reb Beach chez Whitesnake, Kip à ses soli, les autres à leurs occupations. Quid du futur de Winger ?

Et sans crier gare, fin 2009 : un 5ème album après 21 ans de carrière. Le talent se distille au compte-gouttes, chez Kip Winger & Co, mais mieux vaut tard que jamais. Et tout le bla-bla ci-dessus pour en arriver là : l'attente valait le coup, oh oui... Le talent est toujours au rendez-vous, et en dose massive, même. Le son Winger est immédiatement reconnaissable, les frissons sont garantis ! C'est reparti pour un tour.

Alors si vous voulez bien vous donner la peine : les 2 premiers titres, "Deal with the devil" et "Stone Cold Killer" enfoncent d'entrée la pédale d'accélérateur... attention à la patate, car le gang est de retour avec un TRES TRES gros son et une méchante envie d'en découdre ! Typiques de leur compos, les attaques de gratte en mur de fond laissent la voix de Kip, toujours aussi rèche et unique, mais encore plus puissante qu'avant (si si), se poser avec justesse sur les lignes mélodiques, avec ses potes en renfort. Ces 2 titres ont un petit goût de retour aux sources, mais rassurez-vous, pas de vieux chaudron au programme, Winger fait du Winger en s'appuyant sur les techniques modernes.

Le ton étant donné, place est nette pour les missiles qui arrivent derrière : "Big world Away", "Come a little Closer" et l'explosif "Pull Me Under" (rien à voir avec le théatre du rêve) vous envoient direct dans la galaxie Winger, au coeur de la nébuleuse du métal de haut vol. Tout y est : riffs plombés, refrains mortels ultra-inspirés, breaks de folie, mid/up-tempo du tonnerre, claviers ingénieux. RHAAAAAA, c'est trop bon ! C'est ce que j'appelle du retour en force. Et juste pour en être bien persuadé, la ligne de basse ronflante qui annonce "Supernova" (le hit du disque ?) augure franchement du meilleur (je l'écoute en écrivant ces lignes, j'en pleure presque), et il arrive : couplet à tomber raide, qui se déroule sur un refrain impérial, Kip se déchire les cordes vocales, notes percutantes, riffs de génie, toutes guitares dehors. Du grand art. Winger reste un groupe unique. Incroyable. Je commence à me dire qu'on est au niveau (est-ce-possible ?) de "Pull"...

Oh joie, l'élévation vers le firmament ne s'arrête pas... "Always within Me", passage quasi obligé pour nous laisser respirer après quatre boulets rouges, n'est pas un slow, mais plutôt un titre atmosphérique nappé de claviers et bien burné quand même, façon "In for the Kill".

Ca y est, on a respiré ? Allez on repart avec "Feeding Frenzy", qui enquille d'entrée avec un riff claquant ouvrant sur un refrain à la "Blue suede shoes", mais avec nettement plus de testostérone. Que du bonheur. Mon pied part tout seul, mon cou aussi, nom d'un chien je headbangue à nouveau sans m'en apercevoir ! Direct et efficace, voilà un titre qui fera mouche en live. "After all this time", le slow du disque (il en fallait bien un), joue à fond sa carte et s'éloigne complètement des clichés habituels, rappelant plutôt l'oeuvre solo de Kip ou encore les ballades des vieux crooner/bluesmen ricains, avec bien entendu un méga-son bien moderne et une guitare au son exceptionnel. On termine le festin avec "Witness" avec son départ mélancolique voix/claviers soft, qui éclate sur un bouquet de guitare altières en second slow, plus costaud et classique cette fois-ci, du moins an apparence, car avec une envolée princière en solo à tiroirs signée Reb Beach dans le plus pur style Winger, voilà une fin qui vous laisse pantois, seul dans vos frissons, les amplis encore fumants, avec une seule envie : re-com-men-cer ! Oh oui !

La super claque.

10 titres, c'est un chiffre net. Pour un album carré, fin, pêchu et terriblement inspiré. On en aurait bien repris, mais c'est mieux que rien. "Karma" est une véritable réussite, bien plus encore que "IV". Rien à jeter.

Si chaque sortie inespérée doit nous gratifier d'une telle suprise, je dis : ENCORE !

C H R O N I Q U E christian

 On y croyait plus : Kip Winger et ses acolytes nous reviennent et c'est la forme !
 Il y avait pourtant tout lieu d'être inquiet : après deux albums de bonne facture (1988 et 1990) et un beau succès commercial, la campagne de dénigrement dont Lars Ulrich s'était fait l'écho en 1992 a bien failli avoir raison du combo...Les conditions dans lesquelles "Pull" est sorti en 1993 en dit long sur le doute installé dans les esprits (cf. chro d'Hellblazer).
 Le fait est qu'après un split, une reformation en 2001, la sortie de "IV" en 2006 pouvait ressembler à un testament ultime...
 Et voilà que Winger trouve l'énergie pour composer à nouveau : "Karma" n'est pas l'album de trop mais assurément le témoignage d'une volonté farouche de durer sans mésestimer les effets d' un environnement au modernisme revisité : car les compères n'ont négligé aucun des paramètres qui caractérisent le hard d'aujourd'hui : la prod est efficace, les riffs puissants, les soli de guitare supersoniques (chapeau bas Mr. Reb Beach !), la voix de Kip maîtrisé...
 C'est du bon boulot qui rassure les fans fidèles mais inquiets jusqu'alors !
 Là où tant de groupes enfourchent le dada du retour au style des 80's sans prendre en compte l'évolution technique actuelle, Winger démontre une indéniable capacité d'adaptation et ça donne des tîtres d'anthologie : "Deal with the devil", "Supernova" ou les superbes ballades "After all this time" et "Witness".
 Le style demeure : ce n'est donc pas l'effet de surprise qui séduit, on a souvent l'impression d'avoir déjà entendu les refrains et pas forcément dans le registre metal ("Come a little closer" ressemble à la BO de James Bond...), mais plutôt le savoir-faire qu'une fois vieillissant, on appelle pompeusement l'expérience...
 Difficile d'être objectif quand on apprécie un retour sur le devant de la scène de musiciens qu'on croyait finis mais objectivement, ça fait du bien !