Norbert Krief

Artiste/Groupe

Norbert Krief

CD

Nono

Date de sortie

Juin 2011

Style

Rock

Chroniqueur

Didier

Note Didier

18/20

Site Officiel Artiste

Myspace Artiste

C H R O N I Q U E

En France, Norbert Krief, tout bon hardos qui se respecte ne peut pas ne pas connaître. On l’a découvert guitariste de Trust, dans les années quatre-vingt, puis quand Trust a mis la clef sous la porte, on l’a vu apparaître comme guitariste de Johnny et participer à de nombreux albums, curieusement souvent dans le monde de la variété française (Pagny Fiori, …). Pourtant, le bougre avait un sacré coup de patte et une réputation de redoutable riffeur. Rien que Antisocial, le morceau mythique du deuxième album de Trust, devenu véritable hymne depuis, est à lui seul une preuve de l’efficacité de Nono. Le fait que Fender lui confie une signature, puis plus récemment Gretsch, n’est pas le fruit du hasard, Nono est déjà un guitariste de légende. Pourtant, la reformation de Trust en 2006, puis l’album 13 à Table, avaient laissé un petit arrière goût amer chez les fans (c’est quoi ce DJ ? C’est quoi ces samples ? Ce son pourave ?), et la récente polémique sur l’annulation de Trust au Hellfest n’avait fait qu’accentuer le malaise. Mais voilà, Nono s’était bien mis en tête de sortir son premier album solo à 55 ans, et bossait très activement dessus depuis l’automne 2010, après avoir monté un groupe, recruté pour l’album, mais aussi pour repartir sur la route, un vœu cher à l’artiste apparemment. Plus de détails sur cette phase sont donnés par Nono dans l'interview réalisée le 27 Mai lors de son passage sur la Côte d’Azur. Mais au final, le 6 juin, c’est la date fatidique choisie pour la sortie de Nono, le premier album solo de Norbert Krief, en personne.

Pour ne pas faire traîner le suspense, et pour ceux qui voudraient aller acheter cet album aujourd’hui même, pour faire le pitch, je vais dire que c’est une sacrée découverte, classée numéro un de mes albums 2011, pour l’instant. C’est d’abord une énorme surprise, car c’est un album de Rock’n’Roll, musclé certes, mais pas de hard rock, et que certains pourraient en être tout déboussolés. Surprise, donc, de découvrir un Nono rocker, super à l’aise dans ses baskets, proposant des compos rafraîchissantes, pleines d’influences rock’n’roll-esques qui ont bercées sa jeunesse, et pourtant super originales, le tout dans une ambiance fun et décontractée. La guitare est superbe, ciselée avec  amour, passion, un toucher exceptionnel et un feeling de fou. On se dit immédiatement, à l’ écoute de cet album, que Nono assure un max à la guitare, alors que l’album n’est pas du tout un album de guitar-hero classique. Je parlais à l’instant d’influences rock, mais ce n’est qu’une partie de l’album car il regorge de trouvailles, de moments de génie, de moments fantasques, le tout dans une ambiance fortement typée blues rock. Et oui, Nono est fan de blues, et d’ailleurs il dédie son album à Gary Moore, disparu cette année.

On résume : pas du hard rock, mais du rock, du blues, j’en vois qui font la grimace ? Taratata, vous n'êtes pas si butés, si ? Moi aussi j’avais 16 ans quand Antisocial est sorti et j’ai headbangué comme un fou sur ses riffs avec ma air-guitare, et pourtant je vous le dis, j’ai été totalement séduit par cette album solo, et ce quasiment à la première écoute.

Mais rentrons un peu dans le vif du sujet, avant que vous ne filiez chez votre disquaire. D' abord son groupe est constitué de Nono (guitare et voix), Jimmy Montout à la batterie et au chant, Sly Léon Combettes à la basse et au chant, et Pat Llaberia à la guitare et au chant. A cela vient s'ajouter Greg Zlap à l'harmonica.

L’album s'ouvre sur Blink Of An Eye. Au départ, le son de la batterie m'a semblé un peu étroit, mais cette sensation disparaît vite. Le morceau est assez vif, super rock, le travail de guitare est excellent tant en rythmique slidée (son énormissime), qu’en solo. Très bon refrain, franchement ça part très fort, entre AC/DC et les Rolling Stones, à la fin, la guitare de Nono rappelle un peu Steve Vaï quand il fait discuter sa guitare. On découvre de suite une particularité de l’album, qui est que les morceaux s‘enchaînent, sans silence. Surprenant, mais le résultat donne une sorte de continuité dans l’œuvre, une énergie supplémentaire, du fun aussi. Le deuxième morceau, A Dieu, est le seul chanté en français, et au départ on se dit que ça ressemble à du Christophe Maé (qui aurait appris à jouer de la guitare, quand même), mais rapidement la guitare de Nono le transforme en quelque chose qui ressemble plus à du Hendrix. Nono est un tueur avec sa wah-wah, quel putain de son, c’est énorme ! La fin du morceau est assez surprenante, car elle n’a rien à voir avec le reste. C’est un petit bout sympa de violoncelle, avec Nono qui solote gentiment dessus, le violoncelle me fait penser au Dejeuner en Paix de Stefan Eicher. Ces fins de morceaux en délire est une autre des singularités de cet album, c’est tout simplement fun, original, ça ajoute un brin de folie et ça sert d’intro au morceau suivant. Le morceau d’après, Do It Right, est le premier dont l’influence est clairement les Rolling Stones. D’abord le chant rappelle bien Mike Jagger, c’est clair, mais aussi les chœurs, la guitare, rythmique, solo. C’est un très bon morceau de rock qu’on a hâte d’entendre en live. Enchaînement sur un truc de fou, mon morceau préféré. C’est un morceau quasi-instrumental (il y’a juste quelques phrasés balancés de ci de là), qui commence avec une intro géniale guimbarde et guitare, puis montée en puissance harmonica et guitare. La guitare et l’harmonica se tapent la bourre sur un rythme blues, fabuleux, j’adore ce morceau, dommage qu’il dure si peu de temps. Le morceau sur lequel on enchaîne, Here And Now, est tout à fait étonnant, car on ressent une impression de Beatles, dans la voix et dans l’excellent refrain. J’aime aussi beaucoup. La wah-wah de Nono fait encore des miracles, en fond, en petites touches élégantes et pleines de feeling. Moment de magie. Une voix féminine vient s’ajouter pour nous susurrer le refrain. Vraiment coolos comme truc, On enchaîne avec un des meilleurs morceaux de l’album, encore plus Rolling Stones que Do It Right. C’est She’s Burning Up My Bed, avec une intro parlée par une fille à l’accent français, puis chanté par Pat, qui, pour le coup sonne franchement comme Mike Jagger. Ca fait bouger la tête et taper du pied. Petit solo de saxo sympa,  repris par un harmonica omniprésent. Et un solo de guitare Richards-ien, l’essence même du Rock’n’Roll, les mecs (et les filles). Un vrai bol d’air frais ! Ca a l’air enregistré cru, root, vintage, live, une voix au début annonce « take 2 » mais ça m’a vraiment l’air d’être le cas. La rythmique de You Keep Me Satisfied fait songer à Jimi Hendrix, géniale, le morceau est plus psychédélique. L’harmonica y ajoute encore une fois une touche root. La guitare de Nono est flamboyante. Je veux entendre ça en live, please ! Dans le même genre, How Does it Feel, très rock, bon refrain, énorme son, accentué par la wah-wah de Nono, vraiment très bon morceau, dans lequel le refrain est repris par la guitare wah-wah en même temps que le chanteur, super. Encore un bon passage d’harmonica, qui décidément embellit vraiment cet album. Superbe final, guitare et harmonica, emmené par une batterie hystérique. Pour moi, le seul moment un peu décalé de album c’est l’instrumental suivant, Wavedream, gentillet, à la guitare acoustique accompagnée de synthés, presque du JM Jarre pendant deux petites minutes. Parce qu’après, c’est Vagabondage, que je trouve génial et en même temps qui m’énerve. J’explique : ça commence comme un excellent blues, sorti tout droit du fin fond de la Louisiane, avec un gars qui parle, bref, de la pure tradition blues, et puis tout à coup, vers une minute quarante, et pour vingt secondes, ça enchaîne sur un morceau hard rock, qui n’a rien à voir. Franchement j’aurais adoré que le morceau de blues dure plus longtemps, il est flambant. Ensuite vient la seule reprise de l’album, On the Road Again, de Canned Heat. Cette chanson est un monument. La reprise est originale car dans la première partie, les musiciens jouent leurs instruments respectifs avec la bouche. Assez sympa. Ensuite, c’est plus classique, l’harmonica fait des prouesses, comme dans l’originale. Back To Rock & Roll, comme son nom l’indique, est un boogie rock des plus classiques. Entre Status Quo et les Rolling Stones, pas loin non plus d'un Roll Over Beethoven, il reste irrésistible. Nono y fait un bon solo, on tape du pied, rien à redire. Je trouve le délire final, sorte de petit blues avec un mec qui discute, un peu longuet, cette fois il y a même le black du riz Uncle Ben's qui rigole à la fin. On enchaîne et on termine avec le morceau le moins à mon gout de l’album, Charter 68, qui est un mélange de jazz fusion (le piano surtout) et de rock (tout le reste). C’est encore une sorte de joli instrumental, où Nono alterne des passages de guitare acoustique en arpèges, et des solos un peu flamenco. Des paroles sont chuchotées par moments, quelques chœurs féminins, mais pas vraiment de chant à proprement parler. C’est surtout le morceau de piano qui fait basculer le morceau dans le jazz fusion, pour le reste la guitare et l’harmonica, c’est plutôt rock, lent, mais rock.

Ouaaaah ! Je suis sur le cul. Je ne m’attendais certainement pas à un tel choc. Un tel brûlot de Rock & Roll vrai, cru, et plein de tact. J’adore cette face, jusque là bien cachée, de notre Nono national. En plus, je trouve la pochette super chouette, mais je trouve vraiment la sérigraphie sur le CD un peu de mauvais goût (comparée à la finesse du contenu), mais Nono m’a expliqué que le Rock & Roll, ça doit rester du fun, alors on s’en fout !

 

Tracklist de Nono :

01. Blink Of An Eye
02. A Dieu
03. Do It Right
04. Borderline
05. Here And Now
06. She’s Burning Up My Bed
07. You Keep Me Satisfied
08. How Does it Feel
09. Wavedream
10. Vagabondage
11. On The Road Again
12. Back To Rock & Roll
13. Charter 68

 

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